Certifications forestières – Une nécessaire mise au clair

Il s’agissait d’un petit-déjeuner particulièrement attendu, puisque Culture Papier proposait de revenir sur l’émission « Cash Investigation » diffusée le 24 janvier dernier, intitulée « Razzia sur le bois » et remettant notamment en cause la validité des certifications forestières. L’occasion était ainsi donnée à Stéphane Marchesi (Secrétaire général de PEFC France), Benjamin Mattely (Responsable environnement pour l’UNIIC et animateur national de la marque Imprim’Vert) ainsi que Cyril Hergott (Responsable RSE chez Riposte Verte) de réagir et de réaffirmer le caractère responsable d’une Filière (in)directement visée…

« Le papier est-il responsable ? ». C’est en ces termes que Culture Papier avait choisi de cadrer son petit-déjeuner thématique, qui pouvait apparaître de prime abord plutôt conventionnel, mais qui prenait en réalité une résonance toute particulière, en écho à une actualité bouillante. Visant plus particulièrement le label PEFC, l’émission d’Elise Lucet faisait en effet la démonstration accablante de certifications délivrées quasiment à l’aveugle, à des exploitations forestières qui n’en étaient pas, le reportage moquant sans vergogne la facilité qu’ils ont eue à faire certifier le Mont Ventoux ou encore une discothèque… Stéphane Marchesi ne tardera d’ailleurs pas à revenir sur ce point, pour évacuer d’emblée l’attaque la plus frontale visant PEFC. « Ce que le reportage ne dit évidemment pas, c’est que la grande majorité des hectares de forêts certifiés PEFC bénéficie d’un contrôle continu via l’ISO 14001. Il n’y a que pour les petits propriétaires forestiers que nous appliquons effectivement un contrôle par échantillonnage dans le cadre d’une certification de groupe, mais quitte à parler franchement, nous aurions tout à fait pu ne pas nous y intéresser et ainsi nous débarrasser du problème. Nous avons préféré leur donner également la chance de suivre nos programmes de certification, pour étendre autant que possible les bonnes pratiques aux propriétaires les plus modestes. Pour ces derniers, nous nous basons donc effectivement sur une présomption de bonne foi et en 20 ans, nous n’avons jamais eu à gérer de plaintes. Il a fallu que Cash Investigation invente de faux dossiers parce que sans ça, ils n’avaient rien trouvé ». Car si les déclarations farfelues sont dans un premier temps effectivement possibles – « Comme vous pouvez tout à fait déclarer n’importe quoi sur votre feuille d’impôts » peste Stéphane Marchesi – elles feront l’objet, tôt ou tard, d’une sanction via le système de contrôle PEFC, nous assure-t-il.

Cyril Hergott (expert environnement chez Riposte Verte), Stéphane Marchesi (Secrétaire général de PEFC France) et Benjamin Mattely (Responsable Environnement pour l’UNIIC et animateur national de la marque Imprim’Vert).

Soulignant par ailleurs qu’à faire certifier des sites qui ne produisent rien et n’émettent donc pas de bois sur le marché, la manœuvre apparaît à Stéphane Marchesi d’autant moins probante, même s’il concède toutefois réfléchir à la façon dont PEFC pourrait corriger la faille – réelle – exploitée par le reportage : « Nous étudions plusieurs pistes et demander un titre de propriété avant d’attribuer une certification figure parmi les possibilités. Mais nous voulons prendre le temps de réfléchir à notre action suite à cette émission et dans un premier temps, nous avons porté plainte auprès du CSA pour non-respect de l’éthique journalistique d’une part, et contre le Directeur général de Greenpeace France d’autre part, qui a clairement affirmé qu’une seule certification forestière était crédible. Ce n’est évidemment pas vrai ».
Rappelant à ce titre que les cahiers des charges respectifs de FSC et PEFC étaient effectivement « très proches », il n’y a guère « que les modes de gouvernance » qui, de l’un à l’autre, diffèrent selon Daniel Bozonnet, expert environnement chez UPM.

L’autre inquiétude qui a pu émerger suite à la diffusion de cette émission concerne les éventuelles répercussions collatérales sur la Filière dans son entier, une partie de ladite émission ayant d’ailleurs mis la focale sur les pratiques, déjà mises à défaut par le passé, d’un papetier Indonésien (en l’occurrence, Asia Pulp & Paper), accusé d’avoir asséché les tourbières et donc d’avoir joué un rôle malheureux dans les graves incendies qui ont ravagé la forêt tropicale Indonésienne en 2015. Une triste mise en lumière qui ne doit pas faire oublier, comme l’a rappelé Benjamin Mattely, « que la forêt est d’abord mise en danger par le changement d’affectation des sols, et donc principalement par l’agriculture et l’élevage ». Les effets éminemment positifs d’une généralisation des certifications ne doit donc, de fait, pas être minorée : « Cette Filière travaille la question du développement durable depuis 1992 et s’est saisie des problématiques de déforestation depuis longtemps. Aujourd’hui, on compte en France environ 600 imprimeurs certifiés PEFC, dont 400 bénéficient de la double certification FSC/PEFC, et plus de 2000 imprimeurs sont labellisés Imprim’Vert. Ces labels ont été crées pour répondre à un manque de contrôle des Etats, et ils ont eu des effets bénéfiques indéniables » argue le Responsable environnement de l’UNIIC.

Cyril Hergott souligne toutefois que si les labels apparaissent « de plus en plus importants pour les entreprises et les donneurs d’ordre », c’est avant tout pour « un souci d’image de marque », ajoutant donc qu’il était encore « important de sensibiliser les parties prenantes sur un engagement RSE ». Un travail toujours mené de front par les acteurs d’une Filière concernée, voire exemplaire à de nombreux égards, et qui n’en a pas fini de progresser…

Un article plus complet sur le sujet est à paraître dans « Acteurs de la Filière Graphique » n°117. Pour vous abonner, n’hésitez pas à en faire la demande par e-mail : contact@uniic.org 

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