Enfants & écrans : un problème d’adultes ?
Alors qu’une tribune publiée dans les colonnes du Monde dénonçait déjà en 2017 les “graves effets d’une exposition massive et précoce des bébés et des jeunes enfants à tous types d’écrans : smartphone, tablette, ordinateur, console, télévision”, d’autres alertes émanent d’un récent rapport sur les enfants et les écrans, remis le 4 juin au ministre de la Culture.
Si ladite tribune avait jadis vu émerger diverses contestations, notamment à l’encontre du concept – scientifiquement invalidé – d’ “autisme virtuel” porté par Anne-Lise Ducanda, les effets potentiellement délétères des écrans sur les plus jeunes font l’objet d’un quasi-consensus scientifique, moyennant ensuite de tenaces divergences quant aux conditions de développement des troubles comportementaux associés. Mais cette fois, la psychanalyste Sophie Marinopoulos évoque “une culture entravante” où “l’utilisation de l’écran comme évitement de la relation pose problème”. De fait – et c’est assez inédit – il est ici question d’effets indirects liés non pas à ce à quoi les écrans exposent, mais plus globalement liés à ce dont leur omniprésence peut priver les enfants. “Les adultes sont constamment sur leur portable, si nous sommes bien là physiquement, nous ne sommes pas là psychiquement. C’est tout cela la malnutrition culturelle : un ensemble de comportements que nous avons aujourd’hui et qui entrave la qualité du lien parent-enfant et in fine du lien social. Pour moi, il s’agit d’un nouveau défi sanitaire” développe-t-elle, posant donc la chose comme relevant d’un problème d’adultes. Ainsi comprend-on que les temps d’écrans – les nôtres, plus ceux de nos enfants – s’additionnent et font chuter les moments d’interaction structurants, à plus forte raison depuis que lesdits écrans sont multiples et nomades.
S’il est probable que telle hypothèse fasse une nouvelle fois débat, il est certainement judicieux que nous interrogions effectivement jusqu’à nos propres usages et leurs possibles conséquences, pour ne pas enfermer le débat dans un cadre limitatif où seuls les écrans directement exposés aux enfants pourraient poser problème.
En savoir plus sur le rapport de la psychanalyste Sophie Marinopoulos : “Une stratégie nationale pour la Santé Culturelle – promouvoir et pérenniser l’éveil culturel et artistique de l’enfant de la naissance à 3 ans dans le lien a son parent”, remis à remis à Franck Riester, ministre de la Culture, mardi 4 juin 2019.