Cet article est paru en 2016, dans le numéro 115 de notre magazine Acteurs de la filière graphique. Retrouvez tous les numéros sur notre page dédiée.

DU DISQUE À L‘IMPRIMÉ L’OBJET RÉSISTE

Imprim’Luxe organisait la visite des locaux de deux des trois entités françaises du groupe MPO (Moulage Plastique de l’Ouest). Un profil d’entreprise particulièrement intéressant et singulier puisqu’il s’appuie sur les complémentarités d’un savoir-faire lié d’une part au pressage de disques optiques (du vinyle au blu-ray) et d’autre part au packaging et à l’environnement physique (et imprimé) de l’objet…

Combien de fois aura-t-on été averti en ces termes : « Attention à ce que le livre et l’imprimé ne connaissent pas le sort du disque » ? La mise en garde était effectivement tentante puisque la dématérialisation aura incontestablement bouleversé (et fragilisé) le modèle économique du disque, tout d’abord frappé par un phénomène de téléchargement illégal massif, avant de peiner à retrouver un équilibre en développant des plateformes – légales, cette fois-ci – de lecture en streaming. Ainsi les Deezer, Spotify et autres Apple Music proposent-ils des abonnements payants (ou gratuits, en consentant à la diffusion d’annonces publicitaires), pour un accès illimité à un catalogue musical en ligne comptant des millions de références. Insuffisamment rémunérateur selon un nombre croissant d’artistes, dont certains ont même choisi d’être absents de ces plateformes, ces nouveaux modèles n’en sont par conséquent pas encore vraiment. Plus curieux encore, la croissance retrouvée – ressortie de terre, diront certains – du vinyle, qui symbolise à lui seul cette volonté du « retour à l’objet ». Perçue à ses prémices comme une possible mode en forme de feu de paille, voilà plusieurs années que la bonne santé du disque microsillons surprend et séduit. Alban Pingeot, Directeur général du groupe, n’en revient d’ailleurs toujours pas : « Le vinyle connaît chez nous une croissance de 30 à 40 % par an, ça n’en finit plus d’exploser »… Une aubaine pour une entreprise qui, contre vents et marées, ne s’est jamais débarrassée de son équipement dédié à la fabrication des vinyles, via des machines de 80 ans d’âge (!), simplement « retapées » pour les besoins présents.

Du disque au packaging en passant par les services : l’art des synergies

« Nous sommes constitués autour de trois marques commerciales, mais nous avons quatre métiers » fait valoir Alban Pingeot. Leader européen dans le pressage de CD et de DVD, l’entreprise MPO fondée en 1957 et basée à Villaines-LaJuhel, fabriquait en effet à l’origine des disques vinyles, mais a toujours montré une faculté d’adaptation et de développement hors-normes. Aujourd’hui, le groupe articule différentes activités et compétences, sur différents sites : fabrication de disques optiques, vinyles et prestations logistiques à Villaines-la-Juhel, façonnage et conditionnement au Mans et imprimerie à Averton, sans même compter les divisions commerciales et centres de sous-traitance basés à l’étranger. Organisée autour des entités MPO pour le disque, Mpack pour l’impression, l’emballage et les conditionnements spéciaux, et enfin MLink pour une toute nouvelle activité d’accompagnement logistique, telle synergie procède d’un travail sans cesse renouvelé de remise en question, les marchés étant par essence capricieux… Laissé pour mort depuis l’avènement du CD, le vinyle renaît donc effectivement de ses cendres sur des niches extrêmement solides, et c’est paradoxalement aujourd’hui l’écroulement de ce même CD qui pousse à des réflexions nécessaires… « Lorsqu’il le faut, nous essayons de trouver de nouvelles portes d’entrées, l’important étant que nous conservions une logique et que toutes nos activités se rejoignent » nous explique-t-on au sein des ateliers de MLink, département logistique précisément créé pour répondre à une demande potentielle judicieusement identifiée… « Les opportunités créées sont parfois surprenantes. En lançant le département MLink, nous pensions seulement que nos clients allaient s’intéresser à l’extension de notre offre sur de la logistique et du transport, pour couvrir un maillon supplémentaire en termes de service, mais il s’est aussi passé l’inverse. C’est-à-dire que certains clients, inconnus jusque-là de MPO, ont fait appel à nous pour des services logistiques, puis ont demandé à se faire fabriquer des packs, de la PLV etc ».

Le bel objet : increvable ?

Considéré à juste titre, par nombre de puristes et de passionnés, comme le support le plus qualitatif qui soit, le vinyle incarne certainement la survivance d’une forme d’attrait intemporel vers le Beau, l’extrêmement qualitatif, le luxe etc. Car non seulement le support garantit une qualité d’écoute inégalée (alors que les supports numériques ont indéniablement généré, voire banalisé, la compression et l’aseptisation du spectre sonore), mais surtout, il est l’occasion d’une mise en scène premium : packaging de luxe, livrets collector, éditions personnalisées etc. L’objet ressuscite la passion, et réciproquement. Le parallèle avec le livre serait tentant, mais il ne se justifie qu’à moitié. Car si en effet, l’attrait pour l’objet opère évidemment dans les deux cas, le livre reste un bien culturel de masse – le premier, faut-il le rappeler – quand le vinyle illustre plus volontiers la bonne santé des « niches à collectionneurs ». Pesant en effet un peu moins de 3 % du marché du disque, le microsillons sous ses différentes formes (33, 45 ou 78 tours, maxis etc.) attire très majoritairement un public d’initiés. Chose notable toutefois, il s’agit d’une population assez jeune en moyenne, autour de 25 ans, qui a grandi avec le MP3 et la culture de la musique dite « jetable ». De quoi se convaincre que l’objet, quand il rime avec émotion, saura séduire au-delà des générations. Et de quoi se convaincre également qu’il est des choses qui se gardent jalousement : des objets matériels, en l’occurrence.

Disque & livre : des comparatifs biaisés

La comparaison avec le livre ne tient guère non-plus pour une raison simple : si l’ebook peine toujours à exister face à son homologue papier, les plateformes de streaming en ligne pour la musique ont largement passé le cap des usages. C’est certes bien le disque physique qui domine encore les deux tiers du marché, selon le Syndicat National de l’Edition Phonographique (SNEP), mais sur la base de tendances claires qui voient les ventes physiques globalement s’effondrer, et les sites comme Spotify et consorts progresser à pas de géant (+ 45 % en 2015). Précisons toutefois que les chiffres relatifs aux ventes de vinyles, établis en France en 2015 à 750 000 unités, ne prennent pas en compte ce qui est écoulé chez les disquaires indépendants, pourtant premiers pourvoyeurs de vinyles auprès d’un public de passionnés souvent fidélisés. L’excellente santé du support reste donc probablement sous-évaluée et pose une nouvelle fois la question du rôle des lieux physiques de vente : de la même manière qu’une librairie aide à flâner et suscite des achats d’impulsion, les « petits » disquaires installent une proximité et un service qui se justifient d’autant plus lorsque l’objet se veut séduisant. Pour autant, les mises en garde évoquées en introduction de cet article – le livre connaîtra-t-il le sort du disque ? – ont probablement été proférées à la hâte et font état d’un raccourci peu pertinent. Car l’expérience de lecture, plus qu’aucune autre, diffère selon le support – un texte se reçoit fondamentalement différemment selon qu’on le lit sur un smartphone, une liseuse ou un livre papier – au point que jamais, télécharger un livre n’a pu être aussi tentant que de télécharger un disque. Plus malléable dans des espaces dématérialisés où les flux sont rois, la musique s’est vite fondue dans un nomadisme qui a accéléré le phénomène, quand le livre papier était « déjà » pratique à transporter : pas besoin de batterie et une capacité à résister aux ravages du temps qui se compte en siècles. La supériorité anthropologique du livre papier est à ce point écrasante qu’il n’a finalement rien, ou si peu, à gagner à être dématérialisé. Il faudrait certainement faire un tout autre constat pour le cas du disque – un vinyle n’est pas fait pour vous suivre partout – et pourtant, lui aussi montre d’étonnants signes de résistance. Des signes qui durent, et font même naître de drôles de paradoxes : un rapport économique de la Recording Industry Association of America (RIAA) révèle que la vente de vinyles aurait en effet rapporté plus d’argent en 2015 que les revenus publicitaires du streaming. De quoi le répéter une énième fois : la dématérialisation à outrance ce n’est pas que le désenchantement, c’est aussi, si elle manque de mesure, une destruction de valeur qui ne paie pas…

CD

  • 20 lignes de productions (15 France + 5 Espagne)
  • Capacité de production journalière de 360 000 CD

DVD

  • 12 lignes de production (8 France + 4 Espagne)
  • Capacité de production journalière de 434 000 DVD

BluRay BD50

  • 2 lignes de production (France)
  • Capacité de production journalière de 34 000 disques
  • One mastering Cristaline

Impression

  • Machines Offset & Sérigraphie : 17
  • France : 7 Offset + 4 Sérigraphie
  • Espagne : 4 Offset + 2 Sérigraphie
  • Capacité de production journalière Sérigraphie : 288 000 disques
  • Capacité de production journalière Offset : 624 000 disques

Packing

  • DVD : 6 lignes
  • CD : 3 lignes
  • Pochette : 6 lignes
  • Digipack : 2 lignes

Activité vinyle

  • 16 lignes de presse
  • Capacité de production journalière : 40 000
  • Formats : 14
  • 7″ ; 10″ ; 12″180g-140g
  • 2 lignes de packing
  • Capacité de production journalière : 40 000

Packaging : manufacturing MPack.