Presse au Futur – La distribution en question
Au vu d’une année 2018 qui le justifiait certainement comme jamais, le salon « Presse au Futur » a réservé une large part de ses débats et réflexions à la thématique sensible de la diffusion/distribution… Compte-rendu complet à retrouver dans le prochain numéro d’Acteurs Graphiques.
Avec une diffusion France payée de 3,1 milliards d’exemplaires écoulés entre juillet 2017 et juin 2018, Jean-Paul Dietsch (Directeur de l’ACPM/OJD) évoque « des chiffres de diffusion Presse encore en baisse » (3,2 milliards en 2016/2017, ndlr) quoique ladite baisse décélère significativement, dans le sillage d’une offre numérique qui, de son côté, convainc et progresse…
Moderniser les kiosques & points de diffusion
Si Jean-Paul Dietsch ne manque pas de rappeler que « la Presse est toujours majoritairement vendue sur papier et au numéro », les équilibres sont en train de changer et les réticences à payer pour une presse non-imprimée cèdent petit à petit. Pour autant, il serait évidemment précipité – et probablement suicidaire – de ne plus porter ses efforts d’innovation que sur les écrans. « On ne peut plus se permettre de perdre 750 à 1000 points de vente chaque année » déplore ainsi Serge Hayek (Directeur des Relations Extérieures du groupe Prisma Média), affirmant que « c’est parce que le réseau se désagrège que les ventes baissent ». Selon Jean-Paul Abonnenc (Médiakisok), les premiers retours d’une opération de modernisation des kiosques montrent en effet des résultats éminemment concluants : « Avec 105 kiosques déjà modernisés à Paris à fin novembre 2018, sur un objectif de 356 à fin octobre 2019, nous constatons déjà des effets sur les ventes très positifs. En moyenne, les titres de Presse s’y vendent entre 9 et 14 % mieux qu’ailleurs, selon qu’on parle respectivement de Presse quotidienne ou de Presse magazine ». Le même souci d’optimisation est avancé par Arnaud Eyrolles, Président de la société NAP et dont l’enseigne bien connue – la Maison de la Presse – demeure le premier réseau en termes de volume de ventes (11 % du chiffre d’affaires global). « Le diffuseur de Presse doit devenir, ou redevenir, un marchand. Il faut le remettre au contact du client » assure-t-il, évoquant à son tour une vaste initiative de modernisation de l’enseigne : codes couleurs revus, agencement des titres repensé, façade plus digitalisée etc. Là encore, les premiers résultats sont bluffants : « Les premiers magasins que nous avons modernisés ont vu une nette recrudescence du trafic ainsi qu’une forte hausse du panier moyen » s’enthousiasme-t-il.
Un marché d’offre en recherche d’équilibre…
« Il est important de préserver un réseau d’hyper-spécialistes de la Presse et à ce titre, attention au choc de l’offre ! Si le nombre de titres se réduit de façon trop soudaine, c’est notre attractivité qui est touchée » fait-il également entendre, sans pour autant entrer frontalement en dissonance avec une requête récurrente de rationalisation de l’offre dans des espaces parfois bien plus exigus et/ou moins fréquentés, nécessitant en effet des assortiments adaptés aux capacités de chaque diffuseur. « Il faut apporter aux points de vente le meilleur assortiment possible, le meilleur palmarès possible, en fonction du chiffre d’affaires maximal estimé, selon les réalités locales » appuie José Ferreira (Président des Messageries Lyonnaise de Presse), assurant toutefois que « la multiplicité des titres ne rend pas ingérable leur diffusion ». Or, si tout le monde s’entendra sur cette idée de pluralisme plus ou moins synthétique, au cas par cas, selon la place disponible et la réalité des ventes – quel intérêt en effet pour l’éditeur d’alimenter des kiosques où il ne vendra rien, ou si peu ? –, l’exact point d’équilibre reste aujourd’hui à déterminer.
La Presse numérique passe la vitesse supérieure ?
De fait, les « changements » tardent et les problèmes demeurent, au grand regret de Michèle Benbunan, intronisée Présidente de Presstalis quasiment à la veille des révélations que l’on sait sur ses difficultés financières. « Nous n’avons plus le temps de gâcher du temps » fait-elle alors entendre, elle qui porte un plan de relance censé voir la société de distribution hyper majoritaire (pour rappel, Presstalis gère 75 % de la distribution en France) repasser dans le vert en 2019, après un exercice déficitaire cette année encore évalué autour de 9 millions d’euros. Car à trop attendre, les opportunités s’envolent et les pratiques, elles, changent vite… « Nous finirons l’année avec plus de 18 000 abonnés numériques exclusifs » s’enorgueillit notamment Louis Dreyfus (Président du Directoire – Groupe Le Monde), évoquant des abonnements de plus de dix euros et 25 % du chiffre d’affaires « seulement » encore attaché aux rentrées publicitaires. « C’est aujourd’hui une réalité : il y a beaucoup plus de monde prêt à payer pour des contenus numériques » insiste-t-il, ajoutant avoir « stoppé la possibilité d’acheter les articles à l’unité » pour privilégier « la découverte d’une expérience complète ». Pas encore de quoi imaginer basculer « Le Monde » en titre 100 % numérique, loin s’en faut, mais les preuves tangibles d’une rentabilité digitale qui affleure et fait bouger les lignes…