Retour sur Livre Paris 2019

Dans ce que l’organisation du salon qualifie de “contexte et actualité sociale tendus”, Livre Paris enregistre une légère baisse de sa fréquentation (- 2 %) avec 160 000 visiteurs enregistrés. Après deux années consécutives de baisses globales – mais relativement contenues – des ventes de livres en France, l’événement reste cependant un lieu de débat privilégié, et ce probablement d’autant plus que les difficultés identifiées appellent justement à échanger. Retour express et en images sur quelques-unes des problématiques évoquées durant ces quelques jours…

“Comment favoriser les circuits courts ?”, un débat animé sur le stand des Hauts de France…

“Le marché du livre français se situe dans le trio de tête européen, ce qui souligne des résultats et un intérêt pour la lecture plutôt bons. En revanche, sur le plan de la fabrication du livre, la France n’arrive qu’à la 6ème, voire 7ème place européenne” regrette Georges Sanerot (ex-président du directoire du groupe Bayard et Président du comité de pilotage des Assises du Livre), ne manquant pas dans la foulée de rappeler les urgences du présent : “Demain, nous allons devoir intégrer les enjeux de proximité et c’est à nous de prendre les devants”. Or, “prendre les devants”, c’est tirer les leçons de ce genre de constats pour “faire émerger dix chantiers concrets”, promet-il, nous donnant même rendez-vous pour un “bilan” autour de mai/juin prochains, avec la volonté notamment de protéger un réseau de librairies précieux. “Il faut éviter à tout prix de reproduire ce qui se passe dans la Presse, où plus de 900 points de vente ferment chaque année” alerte-t-il en effet. “A nous de trouver de nouvelles hypothèses de réponse pour passer du constat partagé aux solutions, en y intégrant les données économiques pertinentes, en questionnant la pertinence des aides européennes etc.” Georges Sanerot faisant ici notamment référence aux aides directes et indirectes (aides à l’investissement matériel et aides infrastructurelles) dont certains pays peuvent bénéficier au titre des fonds structurels européens, avec les conséquences qui y sont associées en termes de différentiation coût et d’avantages concurrentiels déloyaux. Rappelons d’ailleurs à ce titre qu’une étude portant sur les différentiels de compétitivité affectant le marché du livre est actuellement en réflexion…

 

Comment préserver la diversité éditoriale sans conduire à une surproduction ? Avec Bruno Caillet (Madrigall), Stéphane Marsan (auteur et éditeur), Anne-Laure Walter (Livre Hebdo), Marie Sellier (SGDL) et Grégory Sapojnikoff (librairie Le Bonheur).

Publie-t-on trop de livres en France ? Si la question est régulièrement posée, c’est bien parce qu’avec 68 199 nouveautés publiées en 2017 en France selon les données Livres Hebdo/Electre.com, la réalité d’un encombrement continu des linéaires tient aujourd’hui de l’évidence. “La production éditoriale a augmenté de 113 % en 20 ans. or, les ventes ont augmenté quatre fois moins que la production” détaille Marie Sellier (auteure et Présidente de la SGDL). Si chacun se réjouit de la diversité créative à la source d’une offre pléthorique, la plupart observe que trop de titres ne se vendent pas ou trop peu, voire qu’un phénomène d’imitation conduit les succès-locomotives à produire nombre de répliques plus ou moins pertinentes, sans forcément parvenir à surfer sur les modes. Exhortant les libraires à affirmer leur identité en “choisissant” les nouveautés qu’ils tiennent à mettre en avant – dans l’hypothèse toutefois où ces derniers le pourraient sans être contraints d’ignorer purement et simplement une large part de la production – Bruno Caillet (Madrigall) tient à rappeler que “le fond, c’est encore la moitié de ce qui se vend. Il ne faut pas que l’afflux de nouveautés  freine notre capacité à vendre le fond”. Mais dans ce ce que certains considèrent comme une logique économique absurde en forme de fuite en avant – produire sciemment deux à trois livres pour en vendre un – les bons équilibres de la diversité restent à inventer.

 

 

L’écoresponsabilité du livre en question avec, de gauche à droite, Olivier Le Guay (Culture Papier), Monique Barbaroux (administratrice générale au Ministère de la Culture), Pascal Lenoir (Gallimard), Richard Dolando (Editis) et Yves Chagnaud (éditions Apeiron).

Porté par la volonté de fonctionner en “filière directe”, Yves Chagnaud (éditions Apeiron) a tenu à faire fabriquer ses livres “à moins de 100 kilomètres autour de la maison d’édition”. Illustrant son propos avec le livre “Histoire de l’Oiseau qui avait perdu sa chanson”, récompensé par un prix décerné par La Nuit du Livre en 2015, il précise notamment avoir fait appel à Maugein Imprimeurs, élaboré une couverture en carton recyclé fabriquée en Creuse grâce à la cartonnerie Jean et veillé à n’imprimer les exemplaires (mille, en tout) qu’à la demande, sans prendre le risque de générer un surplus de stock. Conscient d’opérer ici en quasi-militant (soulignons d’ailleurs une nouvelle récompense cette année avec “Effraie Ma Nuit”), Yves Chagnaud ne sera pas surpris d’entendre notamment Pascal Lenoir (Directeur de production chez Gallimard) souligner qu’avec plus de 60 000 nouveautés par an, un phénomène de péréquation économique voit les gros tirages, difficilement solubles dans des logiques 100 % locales, permettre l’existence de ces initiatives dites “de niche”. Il ajoute : “70 % du bilan carbone d’un livre est lié au papier. le sujet de l’écoresponsabilité du livre a donc naturellement tendance à se focaliser sur cette problématique”, exhortant d’abord la filière à “mieux estimer le juste besoin, un livre écoresponsable étant d’abord un livre qui trouve son lecteur”. Là encore, le débat appelle d’imminentes suites, puisqu’une seconde journée de rencontres professionnelles “Livre, lecture et environnement, une histoire à poursuivre”, organisée par le ministère de la Culture, la Bibliothèque nationale de France et le Centre national du livre, se déroulera le jeudi 28 mars de 9h30 à 18h au Centre national du livre…

Livre Paris 2019 – La fabrication à l’honneur

La présence très remarquée du robot Gutenberg One – une avant-première mondiale – dans les travées du salon Livre Paris 2019 aura eu de nombreux mérites, dont celui de restituer face à un public fasciné la magie de la fabrication du livre. Au-devant de gens curieux, souvent enthousiastes, les questions relatives aux différentes étapes de fabrication ont fusé : impression, encollage, façonnage, massicotage… Nul doute que la gestuelle théâtrale du robot a participé à rendre ces quelques minutes hypnotiques, avant d’amener à des considérations plus stratégiques : à quoi – et surtout à qui – tel robot peut-il servir ?
Destiné à imprimer et façonner du livre unitaire en quelques minutes, Gutenberg One se veut être le tout dernier rempart imprimé avant l’écran. Car il ne s’agit nullement de “courtes séries” ou même “d’impression à la demande” stricto sensu, mais bien de fabrication unitaire quasi-instantanée, avec une ambition claire : aller plus vite qu’Amazon. Pertinent sur la myriade de références dites de “longue traîne” ne se vendant qu’exceptionnellement et trahissant donc souvent une absence de stock disponible, des éditions spéciales hyper-personnalisées, les ouvrages libres de droit ou encore – à terme – l’offre autoéditée, Gutenberg One est une réponse concrète visant à rendre l’imprimé le plus disponible possible.

Porté, via Gutenberg & Co, par un concept de cafés littéraires conceptualisés et construits autour de la machine (il devrait s’en créer 222 en France, dans le sillage du Plan Cœur de Ville), souhaitons à cette initiative innovante un succès la hauteur de son culot.

Fabrication du Livre – Identifier & comprendre les écarts de compétitivité

A l’examen de la balance commerciale déficitaire, concernant ce champ d’activité spécifique (loisirs et vie pratique, livre scolaire et parascolaire, beaux livres, guides touristiques, livres pour enfants, littérature générale etc.), le secteur des industries graphiques a souhaité, à la demande de l’UNIIC et des instances paritaires, lancer une étude portant sur les différentiels de compétitivité coût et hors coût qui affectent le marché du livre et mesurer ainsi l’influence exercée par les aides directes et indirectes (aides à l’investissement matériel et aides infrastructurelles) dont certains pays peuvent bénéficier au titre des fonds structurels européens, avec les conséquences qui y sont associées en termes de différentiation coût et d’avantages concurrentiels déloyaux.

Ainsi l’étude en question aura pour objectif :

– De proposer une grille de lecture multifactorielle pour identifier les écarts de compétitivité et leurs causes (management, outils industriels, intégration verticale, créativité, marketing de la valeur, soutien public, faiblesse de la normalisation de certains pays, coût et statut de la main d’œuvre, productivité apparente du travail, ingénierie financière des entreprises etc.).

– D’éclairer les autorités publiques nationales et européennes sur les écarts de compétitivité qui s’inscrivent dans le libre jeu de la concurrence et supposent une réflexion sur nos propres défaillances et la recherche d’optimisations collectives, et ceux qui procèdent d’une concurrence faussée au sens du droit communautaire (aides directes d’Etat notamment).

– De proposer la construction d’opérations collectives nationales et locales fédérant l’ensemble des acteurs de la chaîne de fabrication du livre (labélisation, co-innovation, RSE, circuits courts, transparence, bonnes pratiques communes, expérimentation de relocalisation par segments, événements en commun etc.).

Lire le Projet de livre blanc portant sur les causes des écarts de compétitivité entre les entreprises spécialisées dans la fabrication du livre en France et leurs concurrents.

Créativ’Book – Le livre au futur ?

Alors que le chiffre d’affaires des biens culturels, tous segments confondus, atteignait encore 8,37 milliards d’euros pour l’année 2017 (+ 2,5 % versus 2016), témoignant ainsi d’une certaine stabilité, le poids global des contenus dits « dématérialisés » au sein dudit CA est passé de 3 % en 2007, à 33 % en 2017. Une progression menée à pas de géants qui traduit, selon Anne Filiot (Directrice Panel Livres – GfK) « des dynamiques internes hétérogènes et bouleversées ». Car les produits sont, par nature, différemment affectés : « Le streaming audio pèse à lui seul, sur la période considérée, pour 50 % de la hausse de la dématérialisation » précise-t-elle, ajoutant que le streaming de livres n’excédait pour sa part pas 1,6 % d’un CA toujours très nettement dominé par le print. Car le livre reste cette exception flagrante qui le voit, en France, ne céder qu’à la marge aux logiques de dématérialisation. Ainsi, 92 % du CA global du livre est toujours généré par son itération imprimée, l’ebook se heurtant à un plafond de verre même en Angleterre ou aux USA, des territoires pourtant a priori plus enclins à l’y voir triompher. De sorte que la question n’est plus tant celle d’une possible substitution des supports, que celle d’une diminution du temps de loisir réservé aux lectures longues, plus challengées que jamais par des distractions numériques de plus en plus fragmentées et mobiles. « Il y a un impact sur les usages, mais il est plus incrémental que concurrent » précise Anne Filiot, rappelant que « les plus gros lecteurs sur liseuses sont aussi les plus gros consommateurs de livres papier » dans un monde où le smartphone roi (80 % des foyers équipés à fin 2018) ne vient pas tant entraver des équilibres visiblement solides :

« À fin octobre 2018, le marché du livre a perdu 0,2 % en volume, mais gagné 0,1 % en valeur. Si la fin d’année demeure cruciale, avec 30 % des ventes historiquement concentrées pendant la période des fêtes, le livre est encore loin de décrocher » conclut Anne Filiot, non sans omettre de préciser que les progressions conjointes des Best Sellers & des livres à courts tirages, continuent d’étendre un marché qui fait le grand écart

Attention toutefois : il serait certainement précipité d’en conclure que le livre papier n’a plus à se soucier des phénomènes qui l’environnent, quelques très gros éditeurs n’hésitant pas à anticiper de possibles mutations, alors que les passages de témoin générationnels rendent chaque jour un peu plus plausible l’émergence d’usages nouveaux. D’où la prudence exprimée par Fabrice Bakhouche, Secrétaire Général, Responsable de la Stratégie et du Développement (Hachette Livre) : « Nous constatons un taux de croissance très fort sur l’audiobook, un format qui permet de toucher de jeunes nouveaux lecteurs, qui n’avaient pas forcément de lien avec le livre papier. Cette tendance nous interpelle forcément beaucoup et nous irons toujours chercher de la croissance dans des univers connexes, comme le jeu mobile par exemple, pour y déployer nos propriétés intellectuelles. Nous avons la volonté de préserver nos marges et pour cela, il faudra développer des synergies »

Un compte-rendu plus détaillé à venir dans le prochain numéro d’Acteurs Graphiques…

J’aime lire et mes enfants aussi

On parle beaucoup d’une jeunesse dont les besoins primaires supposés se résumeraient à s’armer d’un smartphone et d’un code wifi. Pourtant, il ne faudrait pas occulter la réalité concrète de signaux contraires, puisque la presse jeunesse – très majoritairement imprimée – se porte comme un charme…

Les termes Générations X, Y, Z, ne nous y trompons pas, sont avant tout des termes marketing. Ils servent à définir une cible. Probablement ont-ils également servi un coupable raccourci : celui d’une jeunesse quasi-exclusivement soumise aux écrans. Car si la littérature jeunesse est en bonne santé, la presse jeunesse l’est au moins tout autant : 286 magazines et 9,6 millions de lecteurs, le secteur se porte bien. Un succès qui n’est pas étranger au soin apporté à des contenus certainement moins naïfs qu’on ne se les figure parfois, abordant en effet aussi des thématiques à la fois actuelles et difficiles : réchauffement climatique, conflits armés, polémiques sociétales etc. France TV info partait ainsi à la rencontre de Bayard Presse, leader du marché, afin de découvrir pourquoi diable les enfants continuent de lire sur du papier imprimé :

Et pour vous réjouir un peu plus de la place qu’occupe le livre et le magazine dans le cœur des nouvelles générations, vous avez rendez-vous au 34e Salon du livre et de la presse jeunesse en Seine-Saint-Denis (Montreuil) du 28 novembre au 3 décembre 2018.

 

 

 

 

Rencontres – Livre, lecture et environnement, une histoire à poursuivre

Ne manquez pas la première journée consacrée à la filière durable du livre et de la lecture, à la Bibliothèque nationale de France, le Mardi 4 décembre 2018, avant une seconde journée qui se tiendra au Centre national du livre en mars 2019. Ci-dessous, la première partie d’un rendez-vous en deux temps… 

9h : Accueil et introduction
Par Denis Bruckmann, Directeur général adjoint de la Bibliothèque nationale de France, Directeur des collections ; le Centre national du livre ; la Direction générale des Médias et des Industries culturelles ; la Haute fonctionnaire au Développement durable du ministère de la Culture.

10h : La fabrication d’un livre aujourd’hui
Par Pascal Bovéro, Délégué général de l’Union nationale des Industries, de l’Impression et de la Communication (UNIIC) et Pascal Lenoir, Président de la Commission Environnement et Fabrication du Syndicat national de l’Édition (SNE).

10h30 : La filière du livre et les écolabels
Par Richard Dolando, Directeur des Achats manufacturing du groupe Editis et Matthieu Prevost, Responsable Environnement et RSE à l’UNIIC, Animateur national Imprim’Vert.

11h : Table ronde
La chaîne de production du livre au prisme de l’environnement
Modérateur : Hervé Hugueny, Chef des Informations à Livres Hebdo avec Pascal Bovéro, Délégué général de l’UNIIC ; Pascal Lenoir, Président de la Commission Environnement et Fabrication du SNE ; Jérôme Mielle, Directeur général d’Arctic Paper ; Hélène Rajcak, Auteure illustratrice, membre du Conseil Permanent des Ecrivains (CPE).

12h30 : Pause déjeuner libre

14h : Café offert par la BnF

14h30 : Table ronde
Les diffusions du livre au prisme de l’environnement

Modérateur : Jean-Guy Boin, Économiste, avec Françoise Berthoud, Ingénieure de recherche au CNRS, Directrice du groupe EcoInfo ; Karima Gamgit, Directrice générale du Centre de diffusion de l’édition (CDE) ; Guillaume Husson, Délégué général du Syndicat de la Librairie française (SLF) ; Jean-Luc Treutenaere, Directeur des
relations extérieures de Cultura.

16h30 : Grands témoins – Trois témoignages pour mettre en perspective les enjeux du jour
Une distribution écoresponsable du livre, de l’éditeur au libraire, l’exemple de la plateforme interprofessionnelle du livre
Par Sophie Salmon, Secrétaire générale de la Commission de liaison interprofessionnelle du livre (CLIL/Prisme).
Durabilité, patrimoine et temps long : la conservation et le développement durable
par Jean-Loup Fossard, Expert en reliure et conservation préventive à la BnF.
La bibliothèque du XX e siècle, une institution écoresponsable
par Manon Le Guennec, Responsable des Services aux chercheurs et du Service des thèses, Service commun de la Documentation de l’Université Paris Nanterre.

17h15 : Conclusion
par Monique Barbaroux, Haute fonctionnaire au Développement durable du ministère de la Culture.

17h30 : Fin des échanges de la première journée

 

Entrée libre sur inscription (01 53 79 49 49 ou visites@bnf.fr).

Prix Littéraires, des imprimeurs à l’honneur

Sans prétendre à l’exhaustivité – à l’heure où nous écrivons ces quelques lignes, tous les prix n’ont pas encore été décernés – saluons le travail de l’Imprimerie Floch et Normandie Roto, pour leur implication respective dans la fabrication des titres déjà récompensés…

L’imprimerie Floch, une habituée de ce genre de sollicitations, est cette année encore plutôt gâtée :  Elle imprime les Prix Renaudot, Médicis, Fémina et Décembre, tandis que le prix Goncourt est imprimé au tiers par Floch (et au deux tiers par Normandie Roto, comme précisé ci-dessous). Pour Hubert Pédurand, son Président, ces succès sont un des signes de l’excellente santé de l’entreprise. “Nous nous remettons à embaucher parce que la demande est en progression. Nous nous félicitons de voir que nos prestations sont très appréciées des éditeurs et les Prix Littéraires n’en sont finalement qu’une illustration”. Il complète : “Il y a évidemment une part de chance. Floch est là pour rendre service à ses clients éditeurs, avec son savoir-faire, sa “signature”, son historique et son aura. Après, dans le hasard de la production éditoriale, il peut y avoir des titres qui vont se retrouver sur les listes des prix littéraires”. Évoquant pour cette rentrée une fourchette large qui balaie entre 50 000 et 200 000 impressions liées aux prix littéraires – sans s’autoriser pour autant à nous en préciser le détail – Hubert Pédurand insiste sur cette fameuse signature Floch : “Un éditeur est capable de reconnaître un livre qui a été imprimé chez Floch, avant même de regarder l’achevé d’imprimé. Déjà parce que Floch utilise une technologie ROTOPAGE qui est unique en France. C’est une technologie flexographique mais il y a aussi des machines qui sont en anilox et qui ont été construites par Floch. Il en existe trois au monde et elles sont toutes les trois chez Floch, parce qu’à l’époque l’entreprise n’avait pas les moyens d’acheter une Cameron. Ils se sont donc mis à construire leur propre copie des Cameron qui sont aujourd’hui des prototypes” développe-t-il, précisant par ailleurs être passé, début 2018, à une capacité de 30 millions de livres par an, avec la mise en production récente de la troisième ROTOPAGE… “D’où la nécessité d’embaucher désormais”, conclue-t-il alors.

L’imprimerie Normandie Roto ne tire rien de moins que le gros lot en imprimant aux deux tiers le prix le plus prestigieux – a minima le plus populaire – puisque c’est le Goncourt qui tombe dans leur escarcelle. Mais là encore, l’entreprise est une habituée : “C’est pour nous une opération prestigieuse et un véritable challenge industriel. En effet, livrer en quelques heures plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires et passer la barre des 200 000 ex. en moins de trois jours requiert une grande maîtrise des outils de productions et des plannings. Dès l’annonce de la seconde sélection du Jury du Prix Goncourt, les équipes de Normandie Roto Impression coordonnent leurs actions avec les éditeurs en lice. Tout doit être prêt à démarrer dans l’heure qui suit l’annonce du lauréat : personnel/papier/machines/transports… Normandie Roto Impression imprime le Goncourt pour la quatrième année consécutive. Les équipes de Normandie Roto Impression ont acquis une expérience et une maîtrise incomparables pour la production de ces prix littéraires” nous explique Christophe Pillon, Directeur général de l’entreprise. Plus de détails à venir dans un article qui leur sera dédié, bientôt en ligne…

Et puisque ces victoires sont aussi les leurs, bravo aux imprimeurs (ceux deux-là, mais bien évidemment les autres aussi) qui participent à faire rayonner la littérature française partout dans le monde.

Liste des Prix Littéraires 2018

CirclePrinters (ex. Quebecor), le retour !

Circle Media Group, propriétaire de CirclePrinters annonce ce jour la finalisation du rachat de CPI.

Le premier opérateur du livre noir en Europe passe donc sous contrôle néerlandais.

CPI a CA de 360 000 000 €, 2,500 employés et 16 sites de production répartis sur 5 pays (France, Royaume-Uni, Allemagne, Espagne, et République Tchèque). L’entreprise produit 400 000 000 de livres par an et son histoire remonte à 1713. De son côté, Circle Media Group compte 2,700 employés et un chiffre d’affaire de 550 000 000 €. Avec ce rachat le groupe comptera désormais 26 sites de production dans 10 pays européens, 135 presses dont 29 sont numériques et dépassera le million de tonnes de papier par an.

Lisez l’intégralité du communiqué de presse.

Clic.EDIt – “Tous les voyants sont au vert”

Conçu et porté par le SNE (Syndicat National de l’Edition) et l’UNIIC, Clic.Edit (relire notre entretien) a commencé ses travaux… Ainsi les différents Groupes de travail ont-ils été lancés et les premières ébauches de descriptifs techniques d’ouvrages posées, chose dont l’association se réjouit : “Tous les voyants sont au vert. les coanimateurs se sont emparés du sujet avec motivation et dynamisme” fait savoir un membre du Bureau. De sorte à nourrir les réflexions de manière aussi large que possible, c’est Pierre Esquibet (Cabinet Kalpa), en tant que Directeur de projet, qui a pour charge de gérer les équilibres directement au sein desdits Groupes de travail et insuffler un cap au projet. L’objectif : s’assurer que toutes les voix seront représentées et entendues, pour faire de Clic.EDIt la juste synthèse des attentes collectives.

L’association travaille par ailleurs “sur la mise en place d’une solution de gestion électronique de documents et d’un espace de travail collaboratif” nous fait-on savoir, ce qui permettra, via une plateforme dédiée, de centraliser de manière sécurisée les apports “d’une centaine d’utilisateurs”.

Mais la priorité reste le recrutement de nouveaux adhérents, les Groupes de travail Clic.EDIt n’étant à ce jour pas définitivement constitués et nécessitant encore d’enrôler différents profils – dont des éditeurs – pour une efficacité optimale.

Pour prendre une part active et concrète au projet et connaître les modalités d’adhésion à Clic.EDIt, un contact : clic.edit@gmail.com

 

Entretien – Conçu et porté par le SNE et l’UNIIC, « Clic.EDIt est devenu un projet incontournable »

Ce n’est plus une option : mettre en place un langage commun visant à faciliter, accélérer, standardiser et sécuriser les échanges de données informatisés entre les différents acteurs de la chaîne du livre, fait aujourd’hui figure de passage quasi-obligé, dans un contexte de baisse continue du tirage moyen et avec lui, de hausse des coûts administratifs associés. Clic.EDIt est le projet ouvert qui se veut élaborer tel langage unique, sur la base d’un travail de filière forcément collectif et représentatif de la diversité de ses acteurs. Nous avons rencontré Jean-François Lyet et Loïc Ménage, respectivement vice-président et secrétaire général de l’association, pour en savoir plus…

Le Bureau Clic.EDIt est constitué, de gauche à droite, de Frédéric Fabi (trésorier), Jean-François Lyet (vice-président), Pascal Lenoir (président) et Loïc Ménage (secrétaire général).

Clic.EDIt a pour but de définir un langage structuré commun, ayant vocation à automatiser les échanges entre tous les acteurs de la filière livre et éliminer  les coûts de non qualité liés aux données administratives et techniques. C’est une ambition de filière mais nombre d’acteurs n’ont-ils  pas déjà optimisé tous leurs process ? Est-ce que certains n’ont pas déjà une belle longueur d’avance sur les flux de gestion ?

Jean-François Lyet : Il y a des expériences qui ont effectivement pu être menées par certains grands acteurs, mais elles ont été conduites à chaque fois de point à point. C’est-à-dire qu’il faut réexpliquer voire redéfinir les règles dès lors que l’on change de prestataire. Et le problème, même pour les structures les mieux armées, c’est que plus on travaille avec de nombreux acteurs, plus cela suppose des réécritures et des redondances dans la conduite des échanges. Si nous parvenons à définir tous ensemble un langage unique et ouvert, sur un périmètre suffisamment large pour s’adapter à toutes les tailles d’entreprises et toutes les configurations, il ne sera plus nécessaire de retraduire les données reçues ou envoyées. L’objectif est vraiment de faire en sorte que le travail d’intégration d’un langage commun soit fait en interne, une seule fois, et peu importe ensuite que l’on travaille avec 10, 20 ou 100 acteurs différents : ça ne génère plus de coûts supplémentaires, tant pour le donneur d’ordre que pour le fournisseur papetier, le professionnel du prépresse ou l’imprimeur. Tout le monde y est gagnant, dans un contexte où l’on cherche à produire au plus proche de ce que l’on vend, réduire les stocks et optimiser la logistique. Le tirage moyen est à la baisse depuis au moins 15 ans et la réduction des tirages s’est accompagnée d’une augmentation des actes de fabrication. Qui dit actes de fabrication dit supports de gestion avec son corollaire, une augmentation de la charge des coûts administratifs liés aux ressaisies et autres rigidités dans les échanges de données qui va devenir proportionnellement insoutenable.

Loïc Ménage : Pour un dossier de fabrication qui m’est envoyé par un éditeur, qu’il s’agisse d’imprimer 20 000 ou 2000 exemplaires, le temps de traitement est rigoureusement le même. Or, je reçois de plus en plus de dossiers à 2000 exemplaires et cela génère des situations où il faut pouvoir enchaîner les jobs avec le plus de fluidité possible, faute de quoi, c’est le chiffre d’affaires qui est touché…

Jean-François Lyet : Un point me semble fondamental : nous ne souhaitons pas qu’il s’agisse d’un projet de langage utilisable seulement par une partie des acteurs, nous veillons à ce que tel langage puisse s’adapter à toutes les situations et toutes les tailles d’entreprises. Au sein du SNE notamment, nous avons voulu que de toutes petites maisons d’édition puissent nous rejoindre et il s’avère que certaines, parfois des maisons de seulement 5 à 6 personnes, ont manifesté un véritable intérêt pour la démarche. Nous espérons que certains rejoindront non seulement l’association, mais pourront aussi figurer dans les groupes de travail que nous avons constitués pour ne pas créer une sous-représentativité des petites et moyennes entreprises. C’est en effet un problème que nous rencontrons notamment pour l’activité prépresse, où le groupe n’est à ce jour constitué que de moyennes et grandes maisons, ce qui n’est pas assez représentatif de la réalité du métier. Il en est de même pour l’UNIIC qui veut offrir à ses membres de toute taille la possibilité d’entrer dans un système fluide dans lequel les codes sont harmonisés.

Comment fonctionnent et s’organisent les différents groupes de travail au sein de l’association ?

Jean-François Lyet : Depuis quelques mois, tous les groupes de travail ont été lancés, avec à la tête de chacun d’eux, deux co-animateurs, dont l’un représente systématiquement les donneurs d’ordre et l’autre les fournisseurs. Ces groupes de travail regroupent une demi-douzaine à une douzaine d’acteurs, ce qui les rend gérables et permet à chacun de prendre la parole s’il le souhaite. Si toutefois on constate des déséquilibres, c’est le rôle des co-animateurs de distribuer le temps de parole de façon équilibrée. Les groupes aujourd’hui actifs sont ceux du prépresse, du papier, de l’impression noir (auquel on a rattaché le brochage) et de l’impression couleur (auquel on a plutôt rattaché la reliure). Il existe un support transversal qui prend la forme d’un groupe de coordination technique, son rôle est de donner une impulsion générale, de déterminer vers quel type de langage il faut aller et qui s’assure de la bonne délimitation des périmètres.

Pourquoi ne pas avoir impliqué les éditeurs de progiciel ?

Jean-François Lyet : Nous n’avons pas voulu, malgré des demandes en ce sens de leur part, répondre tout de suite aux sollicitations des développeurs de logiciels. Nous voulions vraiment que tel langage soit d’abord entre les mains des acteurs de la filière, sans l’enfermer dans un progiciel donné. Alors même si c’est encore prématuré, il est bien entendu d’ores et déjà prévu d’informer les acteurs du logiciel (entre autres) de cette démarche, en leur expliquant ce que ça peut leur apporter, de façon à ce que eux puissent également développer de façon native, dans leurs versions logicielles à venir, la capacité de transmettre, de livrer ou de sortir, des données, en s’appuyant sur ce langage. Et de la même façon, les éditeurs de progiciel en question n’auront à intégrer ces informations qu’une seule fois.

Loïc Ménage : L’idée effectivement, c’est bien d’éviter qu’un éditeur d’ERP s’approprie la technologie pour la refacturer à chacun de ses clients. Il vendra bien sûr toujours ses logiciels, mais avec le langage commun déjà intégré, en tant que standard. Mais une phase de communication/information est prévue en amont et c’est aussi sur cette base que la demande pour l’intégration d’un langage commun aux progiciels du marché aura du poids et donc, d’autant plus d’intérêt pour les éditeurs de progiciel.

Est-ce qu’en standardisant, on ne risque pas de perdre une forme de singularité ? Est-ce que certaines différences ne constituent pas une sorte de propriété intellectuelle ?

Jean-François Lyet : Non, je ne le pense vraiment pas. C’est d’ailleurs pour ça qu’un de nos premiers travaux a consisté à établir un glossaire commun. Il s’agit donc de s’entendre autour de définitions et en l’occurrence, donner un nom différent à quelque chose ne constitue en rien un avantage concurrentiel. Au contraire, c’est davantage un élément de confusion dans la tête de celui qui va recevoir l’information… Et contribuer au risque de se tromper, au nom d’une forme de différenciation, ce n’est profitable à personne. Pour autant, aucun glossaire ne sera en mesure de couvrir 100 % du spectre des échanges entre deux acteurs, d’autant qu’on ne sait pas ce qui pourra être créé demain. Après, encore une fois, l’objectif c’est bien de couvrir l’essentiel de ce qui fait le volume d’échange administratif entre les donneurs d’ordre et les fournisseurs.

L’automatisation et la suppression de certaines étapes, ça ne va pas engendrer l’abandon d’éléments contractuels ? On aura toujours des bons de livraison, des bons de commande, des ordres de lancement… ?

Loïc Ménage : L’objectif c’est d’éviter les ressaisies, pas de supprimer les documents contractuels, dont il restera effectivement toujours des traces papier. L’absence de ressaisie n’empêche pas non-plus les contrôles, ça laisse au contraire plus de temps pour mieux contrôler. Il faudra toutefois peut-être effectivement s’assurer qu’il reste des gens chez les imprimeurs qui font encore ce travail-là. Il en va du niveau de service que l’on est en mesure d’assurer et peut-être que certains devront prendre conscience que c‘est important. Ce qu’il faut voir, c’est que c’est du temps de gagné pour peaufiner son niveau de service, ce qui est très positif.

Jean-François Lyet : On pourra même aller vers une dématérialisation totale des échanges. Clairement, la loi le prévoit déjà sur de la facture, il n’y a aucune raison qu’un document dématérialisé ne puisse pas avoir valeur contractuelle, à partir du moment où il comprend les éléments nécessaires. Ce qu’il faut entendre aussi, c’est que la ressaisie est à double tranchant : incontestablement, c’est l’occasion d’un niveau de contrôle supplémentaire. Mais c’est aussi l’occasion de faire de nouvelles erreurs… J’aurais plutôt tendance à dire qu’il faut contrôler la donnée à la source et l’enrichir à chaque étape des échanges. C’est dans ce mouvement de va-et-vient que doivent s’effectuer les contrôles, pas lors de ressaisies.

Jusqu’à quel point souhaite-t-on harmoniser les échanges ? Est-ce que cela va jusqu’à calibrer les contenus et imposer un nombre de lignes de données par exemple ?

Jean-François Lyet : Non, on veut qu’il y ait une étendue qui soit la plus large possible, mais après subsiste une relation entre deux acteurs qui feront leurs propres choix. Et ce sont ces deux acteurs qui décideront du volume d’échanges, des éléments qu’ils seront prêts à partager ou non etc.

En termes de calendrier, il était prévu 4 phases (rédaction des documents techniques, formation des acteurs, déploiement & mise à disposition, communication élargie & suivi du projet) + une phase « Zéro » (pilotage), est-ce que vous êtes en mesure de nous en repréciser l’avancement ?

Jean-François Lyet : Nous avons pratiquement bouclé la phase zéro, celle du pilotage du projet, et en l’occurrence, un point en particulier a fait l’objet de beaucoup d’attente, c’est celle de la nomination d’un Directeur de projet. Parce que des groupes ont commencé à travailler dans le cadre de la Phase 1 – celle de la rédaction des documents techniques – mais sans un minimum de coordination, ce travail-là aurait tendance à se perdre. Il était donc important de ne pas brûler les étapes et suivre une méthodologie de projet. C’est la raison pour laquelle, après avoir reçu plusieurs candidatures et présélectionné trois acteurs susceptibles d’occuper ce poste, nous avons choisi un Directeur de projet (Pierre Esquibet, ndlr) qui va nous accompagner au moins les deux prochaines années et qui va assurer ce rôle de leadership, que nous avions nous-même un peu de mal à assurer en plus de nos responsabilités quotidiennes, en tant que membre du bureau. Il fallait quelqu’un capable d’intervenir dans un projet complexe car multifacettes et qui fait intervenir des parties prenantes très diverses. Le langage Clic.EDIt veut s’inscrire dans la durée et ce nouveau Directeur de projet, nous le pensons, a toutes les qualités requises pour mener à bien cette mission.

Est-on capable de dire quand ces différentes étapes seront achevées ?

Jean-François Lyet : Non, même si nous avons constitué un macro-planning, longuement rediscuté pour l’instant. Un travail va maintenant s’opérer avec les co-animateurs de chacun des groupes de travail, de façon à tronçonner ce macro-planning en un planning plus détaillé pour chacun des groupes. Nous allons tâcher de gérer un avancement équilibré, sans générer de trop grands écarts entre des groupes de travail qui ne progressent pas forcément tous au même rythme. Chacun devra d’ailleurs être conscient que des retours en arrière restent possibles : une question traitée en avance, même prévalidée par les autres groupes, peut devoir être reconsidérée.

A-t-on des éléments pour déterminer un ROI lié à ce langage commun ?

Jean-François Lyet : Il n’est pas mesurable en l’état. Ce que je sais, c’est que c’est un avantage concurrentiel pour tous les acteurs qui s’y grefferont. Le temps gagné se traduira forcément en gain de valeur ajoutée. Il est certain que si nous ne faisions que de gros tirages, nous n’aurions pas besoin de Clic.EDIt. Le problème, c’est bien que c’est l’inverse qui se produit : on fait de plus en plus de tirages entre quelques centaines et 2000 exemplaires et par conséquent, ils doivent s’enchaîner plus vite. C’est ce qui rend tel projet incontournable aujourd’hui.

L’association Clic.EDIt (Coordination langage informatique commun – Edition de livres) est créée par le Syndicat national de l’Edition (SNE) et l’Union Nationale des Industries de l’Impression et de la Communication (UNIIC), associés aux principaux acteurs et prestataires de la chaîne du livre. Ce projet est soutenu par la DGE. 

Pour prendre une part active et concrète au projet et connaître les modalités d’adhésion à Clic.EDIt, un contact : clic.edit@gmail.com