Attractivité & consolidation industrielle – Les grands chantiers du secteur graphique

Cet article est paru dans Acteurs de la Filière Graphique n°143 (septembre 2023)


A l’occasion d’une journée organisée par l’UNIIC le 6 juillet dernier dans les locaux de Grafipolis à Nantes, l’heure était à repenser les axes stratégiques par lesquels une reconsolidation industrielle du tissu graphique peut s’envisager, tant à l’échelle collective & régionale (celles des Pays de la Loire), qu’à celle des entreprises elles-mêmes…

Bien sûr, rien d’innocent à ce que soit une école – à savoir Grafipolis – qui accueille l’évènement, tant la double thématique attractivité/formation concerne de près le devenir de nos métiers, en proie à des difficultés de recrutement d’autant plus sensibles que le temps presse : avec une pyramide des âges dans les Industries Graphiques qui suggère un renouvellement urgent du personnel, tant au sein des instances dirigeantes qu’au sein des équipes de production, il importe de renouer des liens rapidement avec les jeunes générations.

« Les jeunes ne connaissent pas assez les métiers de l’impression. » John Podlesnik (Grafipolis)

Attractivité : la nécessité d’efforts conjoints

« Notre travail, c’est d’amener ces jeunes à vous dans les meilleures conditions. Nous sommes une porte d’entrée » rappelle John Podlesnik, Directeur de Grafipolis, à la quarantaine d’imprimeurs ayant fait le déplacement. Une mission que l’école s’attache à assurer de son mieux, même si Daniel Legrier (Responsable du développement commercial) ne tarde pas à reconnaître que la complexité de la tâche nécessite des efforts conjoints, à la fois bien sûr des centres de formation, mais aussi des entreprises et organismes représentatifs : « Nous aurons du mal à remplir nos groupes sans votre aide. Sur l’année écoulée, nous avons couvert 19 salons sur la région Grand Ouest. On capte des apprentis, mais nous avons besoin de votre aide pour faire mieux », développe-t-il. La faute à nombre de phénomènes cumulés qui ternissent l’image du secteur ou l’invisibilise, tandis que les métiers du numérique jouissent d’une omniprésence presque obsessionnelle : plus encore avec l’émergence de l’IA, ce sont les « licornes digitales » qui bénéficient en effet d’un appui quasi-inconditionnel des pouvoirs publics, renvoyant ainsi le print à ses perspectives de déclin, sinon totalement fantasmées (soyons de bonne foi), à tout le moins très surévaluées et teintées d’un fatalisme qu’il faut absolument combattre. « Les jeunes ne connaissent pas assez les métiers de l’impression » se désole John Podlesnik, sans manquer de souligner que « lorsque l’on va contre les idées préconçues et que nous leur montrons qui nous sommes, il y a un intérêt ! Je ne suis absolument pas d’accord avec l’idée que les jeunes ne veulent pas bosser et seraient démotivés » insiste-t-il. Un positivisme assumé, qui ne nous laisse toutefois qu’une marge de manœuvre restreinte : à défaut de rayonner suffisamment par eux-mêmes, les métiers graphiques ont en effet besoin – plus que jamais – d’être portés par les entreprises et par le collectif. « Ouvrez-leur vos portes ! J’entends par là au sens premier : les portes ouvertes en entreprise, c’est une manière d’aller chercher ces jeunes, d’être ambassadeur de son métier » s’enthousiasme le Directeur de Grafipolis, conscient toutefois que ce n’est pas forcément la volonté qui manque à des industriels qui les premiers, regrettent de ne pas attirer assez. Or, l’heure n’est plus à chercher des fautifs, mais bien à unir nos forces.

« Il faut mailler les entreprises entre elles à l’échelle locale. » Hervé Le Chevalier (Médiator organisation)

Des diagnostics individuels pour des enseignements collectifs

Au moyen d’une action collective financée par le fonds territorial, sous l’égide de l’UNIIC, un Diagnostic Stratégique Individuel (DSI) gratuit est accessible à chaque entreprise du secteur qui le souhaiterait, de sorte à porter un regard nouveau sur son activité, sur son positionnement dans un contexte ultra concurrentiel et prendre, en toute connaissance de cause, des décisions stratégiques. Si chaque DSI est unique, en cela qu’il résulte des conclusions relatives à la situation particulière d’une entreprise, en fonction de ses propres problématiques et opportunités, il est un prisme écrasant : « À moins d’un an de la Drupa, nous devons réfléchir à la façon dont nos entreprises doivent se rapprocher : optimisations croisées, croissance externe, outils partagés… Aucune voie n’est à négliger » synthétise Pascal Bovéro, Délégué général de l’UNIIC. Une observation partagée par Hervé Le Chevalier (Médiator organisation), qui intervient au sein des entreprises pour conduire lesdits diagnostics et, souvent, rappeler l’importance de « mailler les entreprises entre elles à l’échelle locale », dans un contexte où l’offre (surcapacitaire sur certains produits) peine parfois à s’aligner avec la demande. « Les Pays de la Loire sont une région qui compte parmi les taux de chômage les plus bas, au point qu’il peut être dit ‘frictionnel’ : dans ces conditions, recruter est encore plus difficile » poursuit-il dans un effort de contextualisation, exhortant les entreprises à se rapprocher au-delà du seul secteur graphique pour considérer le cas des industries connexes, où des synergies pourraient se révéler. « Il faut essayer de le faire à l’échelle locale car on a de plus en plus de mal à bâtir des rapprochements pérennes en cas d’éloignement géographique trop important. Et ce pour une raison simple : les exigences de mobilité sont souvent décourageantes pour la main d’œuvre potentielle »  ajoute-t-il, corroborant les observations de nombre de chefs d’entreprise, qui vivent parfois leur relatif éloignement des grands bassins de population comme une forme d’enclavement. A l’inverse, « certaines zones densément peuplées sont devenues inabordables pour des façonniers » précise-t-il par ailleurs, achevant d’illustrer la complexité d’une dynamique à l’emploi extrêmement dépendante de l’économie locale.

Témoigner & partager

C’est Etienne Chartier (à la tête de Brochage 3000, situé en Mayenne) qui se risquera à l’exercice toujours compliqué du témoignage, vantant les bienfaits d’un DSI qui l’a conduit à y voir plus clair. « Ce que j’ai apprécié avec la venue d’Hervé le Chevalier, c’est qu’il n’est pas là pour nous dire ce qu’on a envie d’entendre. Dire les choses franchement permet de vite déblayer le terrain et en l’occurrence, il faut absolument prendre du recul sur sa situation et sur sa stratégie pour prendre les bonnes décisions » reconnaît-il, lui qui comme tant d’autres dirigeants, se trouve prioritairement focalisé sur les urgences de court terme. « La stratégie n’est pas quelque chose qui s’improvise. C’est exactement l’inverse : elle s’établit à très long terme » prend-il soin de rappeler, sans qu’il faille pour autant tomber dans le piège de mener des réflexions génériques et/ou abstraites, puisqu’il l’assure : « Les diagnostics sont des outils extrêmement personnalisés. Ils sont conduits sur-mesure et c’est aussi ce qui les rend précieux ». Si ces DSI sont évidemment confidentiels, il faut le redire : en tirer des constats globaux et collectifs est primordial, à la fois pour impulser une dynamique solidaire entre des entreprises qui auront besoin les unes des autres, et pour réorienter de manière aussi pertinente que possible la politique industrielle du secteur, à la lumière des opportunités qu’offre chaque région. « Je peux paraître négatif, mais en réalité je pense que les marchés du print ont un véritable avenir. Ce sont les conditions d’exploitation qui, à ce jour, ne sont pas bonnes » conclut Hervé le Chevalier. Sûrement faut-il ainsi redessiner notre offre industrielle pour se rendre plus « attractifs » et révéler aux plus jeunes qu’ils y ont évidemment leur place.

Chère IA, dessine-moi un logo

Cet article est paru dans Acteurs de la Filière Graphique n°141 (mars 2023)


Lorsque sur la scène du Software Village du salon C!Print, Aurélien Vaysset (Co-fondateur et CEO – Emersya) présente quelques croquis d’illustration générés par une IA, littéralement « en dix secondes », sur la base d’un brief de quelques lignes, on saisit tout du dilemme éthique vertigineux que recouvre l’usage – ou non – des techniques de création automatique et assistée, dans le domaine du design graphique.

Les outils sollicités n’en sont pourtant encore qu’à leurs prémices, mais il faut dire combien les résultats obtenus sont d’ores et déjà bluffants de pertinence et propres à répondre à une foule de demandes « modestes » qui n’exigent pas une authenticité créative inattaquable. Dit très simplement : à condition de décrire précisément votre requête, en des termes aussi justes que détaillés, un Midjourney, un Dall-E, un Imagen ou un Stable Diffusion pourront abattre en un clic le travail d’une journée chez un designer graphique chevronné. De quoi prendre le sujet au sérieux.

« Pourquoi ne pas réfléchir à créer nos propres outils et les entraîner avec nos propres ressources, pour soutenir notre processus créatif ? » Emmanuel Young (Champion du monde Worldskills – Arts Graphiques)

L’Intelligence Artificielle, pire amie ou meilleure ennemie ?

Plutôt que de s’en faire une ennemie imbattable à son propre jeu (car une IA ira toujours plus vite que vous, pour beaucoup moins cher), le défi pourrait être de s’en arroger les services pour s’en faire une alliée nécessairement cadrée et régulée. « Je ne m’en sers pas encore » reconnaît Robin Gillet, designer graphique (Studio Ellair), conscient toutefois que ça ne saurait durer : « C’est quelque chose qui émerge et qui fera forcément partie de nos métiers », le piège de rejeter complètement cette perspective revenant en effet peu ou prou à sombrer dès à présent dans le déni. Mieux encore, on sent chez la jeune génération de designers graphiques, très avantageusement représentée en la personne d’Emmanuel Young, médaillé d’Or des Worldskills 2022 à l’échelle internationale, une ouverture d’esprit sur ces questions, à mille lieues de tout réflexe défensif caricatural. « C’est à nous de nous emparer de l’IA. Pourquoi ne pas réfléchir à créer nos propres outils et les entraîner avec nos propres ressources, pour soutenir notre processus créatif ? » s’interroge-t-il, dans une démarche d’appropriation qui témoigne déjà d’une relative acceptation confinant à la lucidité. Car s’il est une obsession qui transpire des réponses de ces jeunes graphistes, c’est celle de ne pas se faire déposséder d’une sorte de légitimité créative. D’où cette question récurrente : comment faire de l’IA non pas un procédé substitutif, mais un pur soutien à la création ? Une nuance capitale, qui nécessitera le soutien bienveillant de clients qui pourraient hélas être tentés de durcir leur approche, au motif que Dall-E, Midjourney ou tant d’autres leur mâchent le travail. Un raccourci que Robin Gillet qualifie de « malsain », notamment parce qu’il méconnaît la nature profonde du travail d’illustration. « Contrairement à ce que l’on peut penser, l’aspect technique de l’illustration n’est pas ce qui est le plus long. Ça ne prend souvent que quelques heures. En revanche, je peux passer plusieurs jours sur de la recherche d’idées » précise Robin Gillet, qui met là justement le doigt sur la nécessité de ne pas mépriser ce temps de réflexion assez intangible, en cela qu’il sollicite justement la sensibilité humaine. « Quand un client va travailler avec un graphiste ou un illustrateur, il y a un échange qui se crée où on partage sa culture, son histoire. Il y a quelque chose qui relève du feeling » commente-t-il, ajoutant que « l’IA s’appuie forcément sur de l’aléatoire » et donc ne pourra au mieux que simuler des rapports humains. Or, ce sont ces rapports qui peuvent générer de l’émotion et être la sève d’une inspiration créative « unique », là où une IA agit rationnellement en compilant – de façon plus ou moins heureuse, d’ailleurs – de la data.

« ChatGPT vous construit une réponse déjà toute faite, toute biaisée et possiblement erronée soit-elle, avec les apparats d’une vérité ordonnée. »

Un brief de quelques mots soumis à des programmes d’Intelligence Artificielle a permis d’obtenir en quelques secondes des colibris quasi-exploitables en l’état.

Se servir des IA, c’est avant tout savoir s’en protéger

Le risque prégnant d’un recours illimité et quasi-systématique aux outils d’IA génératives tient un mot : celui de la désintermédiation. Car faire aveuglément confiance à un programme algorithmique désincarné, c’est donc effectivement lui confier des décisions, des choix et des interprétations, sans vérification. L’excuse pour y céder est toute trouvée : il s’agit de gagner du temps. « C’est à nous d’instruire les entreprises, nous sommes avant tout un métier de culture. Nous devons nous renseigner sur énormément de choses et nous imprégner de références artistiques pour les faire passer au client » explique Robin Gillet, qui tient légitimement à garder le contrôle sur son travail. Car plus on délègue cette couche nécessaire de recherches, de réflexions et d’analyses, moins on sera en capacité de comprendre le sens de ce que l’on propose. Or, une IA n’est qu’un miroir : elle ne sera « intelligente » que si nous le sommes avant elle, parce que « nous » sommes littéralement ce qui la nourrit. Drôle de paradoxe en effet que de risquer de s’appauvrir en recourant – mal – à une technologie qui voudrait nous délester de tâches dites « inintéressantes » ou « chronophages ». La chose est certes tentante, mais la pente vers laquelle elle pourrait nous emmener est d’ores et déjà identifiée et elle est dangereuse : quand vous posez une question à un moteur de recherche, ce dernier vous liste un ensemble de contenus et de ressources identifiés par mots-clés qu’il vous reviendra ensuite de trier, en ce sens que juger de leur pertinence relèvera de vos propres arbitrages. A contrario, un ChatGPT vous construit une réponse déjà toute faite, toute biaisée et possiblement erronée soit-elle, avec les apparats d’une vérité ordonnée. Le plus conscient de ce problème s’appelle Sam Altman, fondateur d’OpenAI (soit l’entreprise derrière Chat-GPT), qui nous alerte clairement sur sa propre création : « ChatGPT est incroyablement limité, mais assez bon pour certaines choses et pour créer une impression de grandeur. C’est une erreur de s’y fier pour quoi que ce soit d’important ». Nous voilà donc prévenus. Cela ne veut évidemment pas dire qu’il faudra rejeter en bloc tout de cette technologie, de toute façon déjà existante et opérante, mais l’essentiel du cadrage éthique qui nous fait face devra maintenant nécessairement prendre des formes réglementaires. Que Google soit déjà tenté d’évoluer vers une IA générative pour traiter les requêtes soumises à son moteur de recherche (c’est bien là le sens de la création de « Bard », sorte de réponse à ChatGPT) prouve que le débat est de nécessité actuelle. Voire urgente.

Imprimerie Frazier – un industriel à Paris

C’est à l’occasion d’une formation de plusieurs référents Imprim’Vert qu’une visite était organisée au sein de l’imprimerie Frazier. Au programme : une révision sur site du cahier des charges du label (bonne gestion des déchets dangereux, sécurisation de stockage des liquides dangereux, non-utilisation de certains produits CMR, sensibilisation environnementale des salariés et de la clientèle et suivi des consommations énergétiques du site), de sorte à confronter les prescriptions écrites à la réalité du terrain. L’échange sera toutefois bien plus riche encore, tant l’imprimeur parisien – niché intra-muros dans le 10ème arrondissement – conjugue ses engagements au pluriel…

Didier Martin, Président de l’imprimerie Frazier.

On est plus contrôlés à Paris que n’importe où ailleurs.

Un imprimeur parisien qui tient à le rester

C’est peu dire que l’imprimerie Frazier a une vision large de son métier, qu’elle traduit dans des engagements aussi divers que complémentaires. Qu’il s’agisse de RSE (Print’Ethic, Imprim’Vert, ClimateCalc, Ecovadis, FSC, PEFC), d’exigences qualitatives & techniques (ISO 12 647-2, Imprim’Luxe) ou plus globalement d’un souci de défense des intérêts des Industries Graphiques (via Culture Papier, une adhésion à l’UNIIC ou encore à ImpriClub), l’imprimerie Frazier a un pied partout. Une réminiscence, peut-être, de son ADN hyper-urbain. « Nous sommes ici depuis 127 ans, à la même adresse. C’est notre vocation que d’être ancrés à Paris et nous voulons y rester. Cela suppose de fondre notre identité industrielle au sein d’une copropriété, à proximité des habitants » développe Didier Martin, Président de l’entreprise. On devine alors que cette promiscuité relativement inhabituelle doit s’appuyer sur une exemplarité absolument irréprochable, de sorte à ne pas créer de nuisances et de tensions. L’imprimerie Frazier veut en effet épouser le décor, quand les industriels sont par défaut souvent relégués en périphérie des villes, dans des zones éponymes tenues à l’écart des habitations. Là se joue d’ailleurs probablement une part du déficit d’image dont souffre l’industrie, cantonnée qu’elle est loin des « lieux de vie » pour des raisons évidemment pratiques, parfois sanitaires et sécuritaires, sans que l’on ne se demande toujours toutefois si la chose n’est pas trop systématique. Reste que les clients, eux, sont évidemment plus enjoints à se rendre sur site pour assister à des calages ou des BAT, Paris étant la ville éminemment attractive que l’on sait. « Imprim’Vert ce n’était même pas négociable pour nous. On est plus contrôlés à Paris que n’importe où ailleurs » ajoute-t-il cependant, décrivant un contexte à la fois enviable et difficile. « La ville de Paris veut se débarrasser des entreprises et les livraisons sont parfois compliquées, mais on gère ça très bien » glisse-t-il dans un sourire.

Faire au mieux : une démarche d’amélioration continue

Si l’imprimerie Frazier a déjà entamé un travail exemplaire de transparence et de progrès, son Président est conscient que le chemin est encore long : « On parle de démarches qui en soi nous poussent à expérimenter et à aller plus loin. Les sujets liés à la décarbonation nous ont par exemple amenés vers ClimateCalc et nous nous sommes engagées sur dix ans avec Print’Ethic ». Un parcours qui n’a rien du long fleuve tranquille que fantasment certains, tant la complexité des problématiques approchées contraint parfois à tâtonner. « Il arrive que les formulations d’encres changent en raison de nouvelles obligations légales. On n’est pas toujours prévenus et c’est à la faveur de problèmes en production que l’on s’en aperçoit, au travers de soucis d’imprimabilité notamment » illustre-t-il, ce qui est d’autant plus inconfortable qu’un imprimeur soucieux de maîtriser ses impacts – ainsi que la qualité de son travail – aime évidemment savoir de quoi il retourne. « Dans l’impression numérique, l’encre est devenue un consommable fourni avec la machine. Nous n’avons pas le loisir de les choisir, ce sont des encres propriétaires et il faut pousser les marques à nous en dire plus, si l’on veut savoir ce qu’elles contiennent », alors qu’en impression offset, il reconnait avoir dû faire marche arrière… « On est revenu au développement de plaques avec chimie, parce qu’on s’est aperçu que la qualité n’était pas au rendez-vous en impression offset UV » regrette-t-il notamment, non sans laisser entendre que les choses devraient évoluer dans le bon sens, pour demain imposer des CTP sans chimie et ce sans altérer la qualité d’impression, qui doit évidemment demeurer une priorité non négociable. Et il y a ce qui est encore moins directement à portée, comme le poids de l’énergie dans ses impacts, au gré de l’explosion des coûts que les industriels ont subie l’an dernier. « Le photovoltaïque est interdit à Paris. Il nous est impossible d’avoir notre propre transformateur et les offres d’énergie verte sont rares, sans par ailleurs être une solution suffisante. Il y a beaucoup à faire sur ce point, mais les bonnes volontés sont souvent stoppées par l’augmentation drastique des prix que nous avons connue » se désole-t-il, ne voyant guère d’autres solutions que de « recourir aux groupements d’achat comme ImpriClub pour être plus forts face aux fournisseurs d’énergie », même s’il ne manque pas de souligner que bien des machines récentes s’attachent – avec succès – à réduire leurs consommations électriques.

Les clients impriment moins, mais ils adoptent une autre démarche : ils sont prêts à payer plus cher pour se différencier.

Qualité & créativité : plus que des incantations, de vraies valeurs de résilience

« Sur huit millions d’euros de chiffre d’affaires, six vont à nos activités offset et deux à l’impression numérique. Nous sommes positionnés depuis deux ans sur du numérique grand format et c’est au global quelque chose qui tend à progresser » précise Didier Martin, qui répond à des typologies de clients variés, de l’annonceur traditionnel aux marques de luxe, « avec de fait une attention particulière portée à la colorimétrie ». S’il constate une réduction indéniable des volumes de production – tous procédés confondus – via une baisse objective du nombre d’exemplaires demandés et une diminution continue des paginations associées, les effets n’en sont encore que faibles sur le chiffre d’affaires de l’entreprise. « Les clients impriment moins, mais ils adoptent une autre démarche : ils sont prêts à payer plus cher pour se différencier » explique-t-il, ce qui implique de savoir motiver ces positionnements différenciants, depuis son expertise d’industriel/fabricant. Une capacité d’accompagnement qui se valorise d’autant mieux lorsque l’on se veut être un imprimeur à la recherche constante d’optimisations, de progrès et d’innovations, au regard d’un marché qu’il faut prendre le temps d’analyser. « Il y a une appétence pour les papiers texturés de création ou les façonnages complexes et ce n’est que de cette façon – en misant sur une différenciation par la qualité et la créativité – que l’on peut faire face à des réalités économiques qui sont celles d’une baisse des volumes sur les marchés graphiques » analyse-t-il de façon lucide, alors que dans le même temps, Didier Martin dit observer « une prise en compte grandissante des impacts du numérique » dans les causes identifiées du réchauffement climatique. De sorte qu’un point d’équilibre finira par affleurer. Un point d’équilibre qui porte un réajustement de raison, dont les imprimeurs sont et resteront un modeste maillon.

Un nouveau BTS Industries Graphiques pour 2024 en Île-de-France

Le Lycée des métiers Alfred Costes, situé à Bobigny (93) annonce l’ouverture du BTS ERPC (Etude et Réalisation d’un Projet de Communication) en apprentissage pour septembre 2024. Il assurera ainsi la continuité des formations en apprentissage en Île-de-France, après la fermeture annoncée par Gobelins.

Aurélie Journée, Proviseure du Lycée Alfred Costes, a accueilli sur place les représentants de la branche (UNIIC, partenaires sociaux, Groupe Lourmel, imprimeurs, Presse professionnelle), le Délégué à la Formation Professionnelle, conseiller de la Rectrice de l’Académie de Créteil, pour échanger autour du projet d’établissement qu’elle porte avec l’équipe enseignante : “Le BTS ERPC proposera une continuité d’enseignements pour les 144 jeunes issus des BAC professionnels que nous proposons déjà sur l’établissement (les trois BAC Pro’ de la filière, le BAC Pro’ communication, le BAC Pro’ maintenance d’équipement et le BAC pro’ systèmes numériques). Les entreprises des industries graphiques trouveront ainsi une solution concrète aux difficultés de recrutement. Si à ce jour, le Lycée est essentiellement masculin – 75 % de nos élèves sont des garçons – l’accès aux métiers des industries graphiques pour les filles figure parmi les grands chantiers que nous devons mener”.

“C’est un projet tout à fait stratégique pour la filière” appuie ainsi Richard Navez (Directeur Formation de l’UNIIC). “Nous avons un an de travail devant nous et nous devrons nous inspirer de ce qui a bien fonctionné aux Gobelins, assurer la continuité afin d’avoir toutes les chances de succès pour les jeunes et les entreprises qui seront engagés autour de ce BTS en apprentissage” souligne-t-il.

Les axes de travail en question sont déjà bien identifiés, poursuit la Proviseure Aurélie Journée. Ils feront l’objet d’une collaboration active avec la branche : “Il y a trois points sur lesquels nous devrons concentrer nos efforts. Le premier c’est la formation des enseignants, car s’ils sont parfaitement opérationnels pour des BAC Pro’, il faudra organiser une mise à niveau pour un BTS. Le second c’est l’aspect matériel. Il faudra compléter le parc machines en ateliers afin de disposer d’un plateau technique ouvert vers la formation des adultes. Enfin, il faudra travailler sur la visibilité du BTS, qu’il faudra promouvoir massivement, pour toucher plus de candidats et intéresser les entreprises” [Le BTS prévoit 12 places dès la rentrée, NDLR].

Un ensemble de points qui mobilisera des énergies collectives et solidaires, afin de mener le projet à terme et constituer un “modèle réplicable en territoires” ajoute Guillaume Trias (Président de Lourmel et membre du Bureau exécutif de l’UNIIC).

Evidemment, c’est une affaire à suivre, pour de plus amples développements dans nos colonnes…

   

Décret tertiaire : les arguments de l’UNIIC ont été entendus

Nombre des adhérents de l’UNIIC nous ont fait part de leurs inquiétudes quant à l’assimilation des métiers de l’impression au secteur tertiaire, dans le cadre des obligations instaurées par le décret éponyme. A savoir : imposer une réduction des consommations énergétiques au sein des bâtiments dits « tertiaires » pour répondre à des objectifs planifiés de sobriété. L’UNIIC s’est attachée à rappeler aux pouvoir publics la nature profondément industrielle des imprimeurs Labeur, qu’on ne saurait – à tout le moins sur ce type de dispositions – amalgamer aux activités de reprographie par exemple. Un argumentaire qui a été entendu puisque la plateforme OPERAT, via la réponse A31 de la Foire Aux Questions (FAQ) autorise désormais, à notre demande, des disjonctions de cas : ainsi les imprimeurs ne sont-ils plus automatiquement assimilés au secteur tertiaire, ce qui est une première avancée dans un dossier que l’UNIIC continue bien évidemment de suivre.

Lire la réponse A31 de l’ADEME

Le challenge StudyPrint 2022 a rendu son verdict

Marion Fournier et Hugo Bouladou, élèves de 1ère année BTS de Gobelins, L’Ecole de l’image, vainqueurs de la 5ème édition du Challenge StudyPrint.

La remise du Trophée Challenge StudyPrint, organisé par Presseedtion.fr, sous le patronage de l’IDEP, Key Graphic et l’UNIIC, s’est déroulée le 9 novembre dernier au campus de Gobelins,  L’Ecole de l’image, 247 avenue Gambetta Paris 20ème, en présence de Bernard Trichot, directeur de l’IDEP, Philipe Teyssier, directeur de KEY GRAPHIC, pour ses partenaires et de Nathalie RODET, Direction de la marque, communication, fundraising, Philippe AUCLERE, manager pédagogique de la filière communication imprimée et plurimédia de Gobelins et Arnaud MASÉDA, Formateur prépresse, pour Gobelins,  L’Ecole de l’image. Et de Daniel Dussausaye, directeur de la rédaction de presseedition.fr et de David Dussausaye, directeur de David OK, chargé de l’organisation du Challenge StudyPrint.

RAPPEL DU CAHIER DES CHARGES

Les métiers de l’imprimerie et les supports imprimés sont de plus en plus victimes de campagnes de dénigrement, notamment de la part de certaines associations écologiques. Les élèves des établissements qui participent au challenge StudyPrint devaient imaginer un support pour promouvoir les métiers de l’imprimerie et les supports imprimés et mettre en avant l’écoresponsabilité des professionnels de la filière.

L’objectif du support que devaient créer les candidats

Faire la promotion de l’imprimé auprès d’un public de professionnels de la communication et des médias. Ils étaient libres de choisir la forme ainsi que le contenu et de s’associer, si nécessaire, avec la section création graphique de leur établissement ou d’un établissement extérieur. Les concurrents devaient envoyer à Pressedition.fr un prototype imprimé du support proposé et un dossier dans lequel ils décrivaient les étapes de création et le processus d’impression du support.

Afin de laisser une liberté de création aux candidats, aucun format n’était imposé.

Constitution des dossiers

Les concurrents devaient envoyer à PresseEdition un prototype du support imaginé et réaliser un dossier complet dans lequel figurait :

  • La description du support de communication imprimée qu’ils ont imaginé.
  • Le processus de création.
  • Leur démarche technique (procédé d’impression) en argumentant leur choix.
  • La liste du matériel existant dans le lycée.

Le jury composé de :

Bernard TRICHOT, directeur de l’IDEP

Philippe TEYSSIER, directeur de Key Graphic

David DUSSAUSAYE, directeur de David OK

a désigné vainqueurs du 5ème Challenge StudyPrint

Marion Fournier et Hugo Bouladou, élèves de 1ère année BTS Etudes de réalisation d’un projet de communication, option Etudes de réalisation de produits multimédia Gobelins, Ecole de l’image Enseignant référent, Arnaud Maséda.

Qui ont obtenu un total de 31 sur 40 pour l’ensemble des critères de sélection, à savoir.

  • Qualité du prototype
  • Pertinence du support
  • Présentation du dossier
  • Démarche technique (processus, procédé d’impression)

Note d’intention de Marion Fournier et Hugo Bouladou

Pour le challenge StudyPrint, nous avons décidé de réaliser un jeu de cartes à visée ludique et éducative afin de promouvoir l’imprimé auprès des professionnels. Ce jeu est un jeu de gestion de ressources dans lequel le joueur a pour but d’améliorer son imprimerie en équilibrant temps, argent et savoir-faire à travers différents événements. Les événements choisis sont en cohérence avec les réels enjeux d’amélioration des modèles d’affaire en vigueur dans les industries graphiques comme le développement durable et les améliorations sociales.
Nous avons pris également en compte ces enjeux dans notre réalisation du support imprimé. D’une part la boîte est réalisée sans colle et d’autre part les cartes contiennent une faible surface imprimée et une seule couleur d’impression. Dans le cas d’une réalisation en grand nombre, nous veillerons à choisir des imprimeries aux normes et labellisés. Également, nous veillerons à impliquer des personnes en situations de handicap ou d’exclusion en leur confiant le façonnage de la boîte grâce aux CAT ou au ESAT. Nous aimerions aussi pouvoir réaliser ce produit avec des moyens professionnels afin de répondre un peu mieux à nos envies quant au rendu du jeu. Par exemple, faire appel à un graphiste ou utiliser la méthode de la forme de découpe pour la forme des cartes. En effet, à terme, nous aimerions pouvoir distribuer le jeu dans différentes structures des métiers de l’imprimé afin d’informer de manière ludiqu
e”.

Les Partenaires du Challenge StudyPrint

  • IDEP
  • Key Graphic Groupe Maury
  • UNIIC

“Il y a un potentiel de développement non-exploité dans les Industries Graphiques”

Philippe Robert-Tanguy est sociologue des organisations, fondateur du cabinet Alis Management et à ce titre, il a été missionné sur une enquête menée en deux volets. Au gré dans un premier temps de diagnostics prospectifs socio-économiques réalisés dans des TPE, puis dans des PME de plus de 50 salariés, il s’agissait de dégager les facteurs de changement et les tendances d’évolutions des métiers, emplois et qualifications, au sein des Industries Graphiques. Un travail au long cours dont il livre ici quelques enseignements…

On attend souvent des études telles que celle que vous avez menée, qu’elles nous donnent des enseignements englobants et généraux sur une industrie. Mais est-ce que ce n’est pas compliqué de définir des traits communs dans une branche d’activité très hétérogène en termes de taille d’entreprise, de technologies d’impression et bien sûr de produits imprimés, les logiques n’étant pas les mêmes selon que l’on soit positionné sur de la presse, de la notice pharmaceutique, du prospectus publicitaire ou du livre ?

Le secteur des industries graphiques est effectivement difficile à cerner, dans le sens où délimiter son périmètre est complexe en soi. Statistiquement, on a du mal à le faire : les entreprises qui impriment peuvent être rattachées à différentes nomenclatures – codes NAF et IPCC – et toutes ne sont pas identifiées comme des imprimeries. Par ailleurs, on se trouve face à des marchés et des produits finis très différents : la presse, la notice pharmaceutique, le packaging, l’imprimé commercial, les imprimés administratifs etc. Mais en dépit de dynamiques et de perspectives différentes, on observe que les métiers de la chaine graphique, depuis la composition jusqu’à la finition en passant par tous types d’impressions (offset, impression numérique, sérigraphie, flexographie etc.) sur tous types de supports, sont amenés à évoluer en profondeur en termes de relation client. On constate une forte montée des exigences chez les donneurs d’ordre, alors que les compétences techniques chez ces derniers ont diminué. Le raccourcissement des délais et une volonté d’aller plus loin dans les services additionnels amènent beaucoup d’entreprises à se développer sur de nouvelles activités, notamment en termes de gestion de stocks et de logistique. On voit donc, malgré les disparités évoquées, des tendances très similaires quant à la façon de traiter la demande.

« L’imprimeur doit monter en puissance sur les notions de conseil et de services. »

Est-ce que cette évolution s’est déjà traduite dans les entreprises ? Les imprimeries ont-elles concrètement et massivement endossé ce rôle de prescripteur ?

Oui, et si on prend le labeur traditionnel qui est beaucoup tiré par des marchés dits « historiques » – prospectus et communication, notamment – ce besoin d’apporter du service est encore plus prégnant. Les communicants sont aujourd’hui surtout formés aux modes de communication numériques et ils sont plus à l’aise pour parler de digital que de Print. C’est à l’imprimeur d’être force de proposition et de s’attacher à comprendre les problématiques de communication exprimées par leurs clients. C’est à l’imprimeur/fabricant d’en déduire les traductions « techniques » : quels procédés d’impression ? Quels formats ? Quels papiers ? Quelle finition ? Comment intégrer des exigences de production responsable ? Comment éco-concevoir et diminuer la consommation d’encres, par exemple ? Etc. Le fabricant doit mettre sa maîtrise technique au service du dialogue avec le client. Il doit le faire dans un langage que les clients comprennent et en l’occurrence, les connaissances techniques liées au print sont de plus en plus faibles chez ces derniers. C’est vrai sur les marchés de la communication, mais si l’on se place sur des marchés plus industriels comme ceux de l’étiquette, de l’impression fiduciaire ou encore de la notice pharmaceutique, qui se caractérisent par une technicité et des contraintes très fortes, les clients ont plutôt fait le chemin inverse. Les niveaux d’exigence sont également très élevés mais ils sont cette fois exprimés en des termes techniques très précis, avec parfois des demandes pointues qui sortent du cadre technique habituel. Là encore, le fabricant doit s’ajuster pour comprendre la demande au mieux et satisfaire les besoins exprimés. C’est particulièrement sensible dans le secteur du packaging, où les exigences liées au contact alimentaire sont en progression très nette. Cette montée globale des exigences doit donc autant aux attentes du client qu’à de nouvelles règlementations, mais ce qui est certain, c’est qu’en conséquence, l’imprimeur doit monter en puissance sur les notions de conseil et de services.

Est-ce que cette montée des exigences n’est pas parfois perçue comme injuste ou intenable, dans la mesure où les contraintes réglementaires peuvent être plus lâches à l’extérieur de nos frontières ? De même que les prix d’ailleurs : difficile de s’aligner sur les tarifs pratiqués en Europe de l’Est notamment…

Cette concurrence étrangère, effectivement souvent concentrée en Europe de l’Est, beaucoup des acteurs que nous avons rencontrés y sont confrontés. Mais tous ne sont pas en difficulté, loin de là. Il me semble important de souligner que certains s’en sortent même très bien ! Et ceux-là ont fait le pari de ne pas aller se battre sur des prix. Parce que c’est une bataille perdue d’avance. Mais cela soulève un problème plus structurel : beaucoup de petits acteurs, des TPE souvent, n’ont pas les moyens de se différencier et de conduire des stratégies ambitieuses en termes de repositionnement de leur offre. Ceux-là ont tendance effectivement à jouer sur les prix, parfois malheureusement jusqu’à descendre en-dessous de leur coût de revient. De fait, ils se mettent en difficulté et cela explique certainement beaucoup de disparitions. Ce réflexe est une menace aussi pour les autres : les prix cassés tirent tout le monde vers le bas. On doit travailler à optimiser ses coûts, bien évidemment, mais il faut que ce soit fait de pair avec la volonté de monter en compétences et de répondre au mieux à des besoins nouveaux. La meilleure façon de préserver ses marges est de monter en qualité et en spécificité. Cela peut venir du service ; c’est pour cette raison que beaucoup se développent sur l’aval, en faisant de la gestion de stock et de la logistique. Cela permet d’être meilleur sur les délais, les coûts de stockage ou les coûts d’intermédiaires, par exemple. Cela peut aussi venir d’un travail sur l’innovation, qu’elle soit technique, technologique ou centrée sur le produit, choix que l’on observe surtout chez les plus grosses PME. Il faut dans l’idéal pouvoir se permettre d’avoir une à trois personnes en charge de la R&D pour jouer les intermédiaires entre les commerciaux et les fabricants. Pour concevoir des produits nouveaux, il faut du temps de veille, de réflexion et de conception. L’innovation dépend aussi des marchés : des techniques de pliage ou de collage spécifiques, l’utilisation d’encres fonctionnelles, la création de puces RFID, l’assemblage de produits, etc. L’important, c’est de montrer aux clients qu’on est en capacité de leur proposer des choses qui entrent en résonance avec leurs besoins.

Est-ce qu’il n’est pas difficile d’établir des diagnostics d’entreprises pérennes quand la conjoncture est à ce point défavorable, avec notamment la flambée des prix des matières premières, mais aussi de l’énergie, le tout dans un contexte de conflit en Ukraine ?

On a effectivement vu monter tout cela quasiment en temps réel puisque la première entreprise que nous avons visitée, c’était en mai 2021. La dernière, c’était en juin 2022. C’était déjà assez clair en 2021, mais les choses se sont effectivement aggravées. Ce sont bien évidemment des préoccupations fortes, notamment sur le papier, pas seulement du fait de l’explosion des prix, mais tout simplement aussi pour des questions de disponibilité. C’est la raison pour laquelle, d’ailleurs, une des entreprises que nous avions prévu de visiter n’a finalement pas pu nous recevoir. Le contexte très instable dans lequel les entreprises évoluent depuis plus d’un an ne leur a pas permis de nous accorder ce temps. Ils étaient focalisés sur des impératifs de court terme, ce qui accentue un trait caractéristique de cette industrie, où les TPE sont surreprésentées : déjà en temps normal, il est difficile pour de petites structures de dégager ce temps de réflexion stratégique, c’est évidemment pire encore quand la conjoncture subit de tels aléas.

« Les Industries Graphiques peuvent se targuer d’être innovantes depuis plus de 400 ans. Il y aurait certainement beaucoup à faire pour que cela se sache enfin. »

Vous soulignez, hélas sans surprise, la dégradation de l’image du secteur, qui affecte durement son attractivité. L’influence des entreprises au cas par cas n’est-elle pas insuffisante pour infléchir sur ce phénomène ? Est-ce qu’il n’y a pas plutôt à mettre en œuvre ici des dynamiques collectives ?

Sur un plan micro, en effet, il semble compliqué pour une entreprise d’agir individuellement quand c’est l’image de tout un domaine d’activité qui est affecté. Néanmoins, ce que l’on constate et qui n’est pas forcément propre à ce secteur, c’est que les TPE et PME communiquent très peu sur leur marque employeur. Les sites Web des imprimeurs ont beaucoup progressé : ils sont passés de plaquettes techniques à des vitrines orientées clients, qui donnent à voir ce qu’ils sont capables de faire. En revanche, les sites en question ne s’adressent presque jamais à leurs candidats potentiels : qui nous recrutons, comment nous fonctionnons et quelle est « l’ambiance » de l’entreprise ? C’est comme si l’entreprise renonçait à véhiculer une image de ce qu’elle est ou de ce qu’elle veut être. Présenter son offre et ses produits ne suffit pas, il faut donner envie. C’est à mon sens un levier important et il est sous-exploité.

Par ailleurs, s’agissant d’un secteur très éclaté avec 4000 entreprises aux profils variés, il y a forcément un travail à faire à l’échelle collective. Un des problèmes, c’est que la filière graphique n’est pas complète en France : il n’y a presque plus de fournisseurs de matériel français et peu de papetiers. En France, l’industrie en général ne fait plus rêver et les métiers de l’impression – comme d’autres – en pâtissent. Pour les Industries Graphiques, cette image de secteur un peu « sale » et passéiste lui colle à la peau et en soi c’est assez injuste. J’ai été frappé du dynamisme avec lequel nombre d’entreprises s’attachent à innover : ce trait caractéristique des Industries Graphiques est mal connu et pourtant, il est très clair. Les innovations, qu’elles soient produits, techniques, RSE ou autres, sont aussi concrètes qu’elles sont finalement peu visibles. On a beaucoup parlé de la « Start-up Nation » ces dernières années, alors que finalement les Industries Graphiques peuvent se targuer d’être innovantes depuis plus de 400 ans. Il y aurait certainement beaucoup à faire pour que cela se sache enfin.

Enfin, si le numérique a dans un premier temps donné l’image d’un secteur d’activité à la fois plus moderne et plus écologique, les impacts qui lui sont attribuables sont de plus en plus évidents et partagés. De fait, l’on commence enfin à voir à quel point une communication « tout numérique » est plus nocive qu’un mix raisonné où le Print a encore sa place.

« Les exigences écoresponsables des donneurs d’ordre vont encore monter d’un cran et imprimer loin, mais de façon low cost, sera de moins en moins facile à assumer. »

Vous évoquiez le dynamisme des innovations, or il semblerait que les jeunes soient particulièrement sensibles à celles qui ont trait à l’environnement…

La thématique environnementale monte effectivement clairement, poussée notamment par la réglementation. Les imprimeurs avaient souvent déjà engagé des démarches, ils n’ont pas attendu la Loi AGEC. Il faut certainement encore pousser le curseur mais c’est là aussi un des coups à jouer par rapport à la concurrence internationale : les exigences écoresponsables des donneurs d’ordre vont encore monter d’un cran et imprimer loin, mais de façon low cost, sera de moins en moins facile à assumer. Par ailleurs, ce travail d’écoresponsabilité est beaucoup plus simple à conduire lorsque le donneur d’ordre et le fabricant sont en proximité : cela permet de discuter, d’échanger des idées et de progresser.

« Chez les entreprises qui comptent moins de cinquante salariés, on constate un déficit de stratégie tout simplement parce que cela prend du temps. »

Vous dîtes – je cite – que “le champ de la stratégie reste encore largement à labourer voire à défricher”. Comment expliquez-vous ce déficit global de vision et de réflexion stratégique ? Est-ce que ce n’est pas d’ailleurs paradoxal quand dans le même temps, vous dîtes constater un dynamisme très marqué en termes d’innovation ?

Il y a effectivement du dynamisme et des envies de faire. Mais globalement, chez les entreprises qui comptent moins de cinquante salariés, on constate un déficit de stratégie tout simplement parce que cela prend du temps. Lorsqu’on a un dirigeant, souvent seul, et des équipes de taille réduite, priorité est donnée à la production. La stratégie n’est pas délaissée par manque d’envie, mais parce qu’on éprouve des difficultés à appréhender le sujet : souvent, les dirigeants n’ont pas les outils et les connaissances pour se lancer, sauf à y passer beaucoup de temps. Or, ils n’en disposent pas. Cela n’empêche pas une forme de dynamisme, mais on n’est pas dans des stratégies construites. On observe plutôt des mouvements d’opportunités qui parfois, a posteriori, constituent des stratégies improvisées, presque non-intentionnelles. On suit son intuition. Beaucoup de petites entreprises se sont développées de cette façon, sans que ça ne soit forcément un problème. Mais cette façon de fonctionner est rendue beaucoup plus simple lorsque l’on se situe dans des marchés en croissance. A l’inverse, quand on est positionné sur des marchés en contraction, arrive toujours le moment où il faut faire des choix et prendre des décisions. Soit on repense son parc machines et on investit, soit on cherche à étendre son offre, soit on se réorganise etc. Mais un investissement insuffisamment préparé peut coûter cher… Il faudrait donc aller vers plus de vision stratégique à moyen terme. Les entreprises qui s’en sortent le mieux aujourd’hui sont celles qui ont un positionnement clair, avec des capacités de production parfaitement adaptées à leur offre. Soit elles se sont spécialisées sur un marché, soit elles maîtrisent tout particulièrement une technologie, soit elles s’adressent à un secteur spécifique etc. De fait, elles sont beaucoup mieux identifiées auprès de leurs clients. Ce travers peut même parfois s’observer chez de grands groupes récemment constitués, justement parce qu’ils n’ont pas eu le temps de de se redéfinir. Mais je pense qu’il faut voir cela positivement : c’est la preuve qu’il existe un potentiel de développement non-exploité. Certains s’en sortent finalement sans vision stratégique très claire, de fait peut-on considérer que ces entreprises n’usent pas de leur plein potentiel et pourraient performer encore plus.

Vous êtes parfois sévère quant au défaut de culture managériale constaté dans l’entreprise. Est-ce que c’est d’ailleurs une cause – directe ou indirecte – du déficit de vision stratégique dont vous venez de parler ?

La stratégie et le management relèvent effectivement plutôt de la même sphère, mais il faut faire une distinction à mon avis : la stratégie concerne plutôt des réflexions quant aux évolutions qu’il faudrait impulser à l’entreprise. Le management, au sens où nous l’entendons ici, sera plus tourné sur l’animation interne.

Vous parlez même de “solitude”, qui est un terme qui revient plusieurs fois dans l’étude. A la fois celle du dirigeant, mais aussi celles des collaborateurs en général. Est-ce que cela trahit selon vous un fonctionnement encore très vertical, voire mutique, en interne ?

On retrouve effectivement souvent cette solitude à la tête des entreprises et c’est seul que le dirigeant prend les décisions stratégiques. Si l’on descend un peu et que l’on parle de management d’encadrement pour conduire l’animation des équipes, ce sont en effet des éléments souvent défaillants ou faiblement développés. Il y a là une raison certainement culturelle : c’est un secteur encore très ancré dans la technique. On a vu beaucoup d’industries qui se sont modernisées ces vingt dernières années aller sur des approches de type lean management [méthode de gestion qui vise à corriger les dysfonctionnements et à réduire les gaspillages en associant fortement les opérateurs avec un « management participatif », NDLR] et travailler sur leur cohérence collective. Dans les Industries Graphiques, on l’a finalement peu fait. Nous avons même été surpris d’entendre, de la part de l’encadrement intermédiaire, des termes qu’on ne trouve plus ailleurs. On nous a par exemple parlé dans certains cas de « contremaîtres », là où aujourd’hui on parle communément d’agents de maîtrise. Or, le contremaître reste justement très tourné sur la maîtrise technique. Ceux qui prennent des responsabilités dans les ateliers sont toujours les meilleurs techniciens : ils prennent du plaisir dans le réglage de leurs machines et sont soucieux d’optimiser la qualité de production. C’est bien souvent grâce à eux que certaines entreprises bénéficient d’une image d’excellence, mais ils sont souvent en difficultés sur le management : comment je transmets ? Comment j’accompagne ? Comment je donne à voir l’activité de l’entreprise ? Comment je propose des retours d’expérience et des analyses de situation quand on a des erreurs à répétition ? Sur certaines de ces questions, ils ont tendance à se focaliser sur la technique alors qu’il faudrait aller plus loin et interroger les modes de fonctionnement, comprendre comment les choses se passent entre les départements prépresse et les ateliers, puis entre l’impression et la finition etc. C’est de cette façon que l’on se rend compte que parfois, les informations sont tout simplement mal transmises. Dans certains cas, c’est la façon dont on note et collecte les informations qui peut induire en erreur et générer des dysfonctionnements. Le management, c’est bien évidemment cela, mais c’est aussi donner des perspectives et donner à voir ce que pourra être l’entreprise demain. C’est d’ailleurs là un point essentiel en termes d’attractivité : les jeunes ont besoin d’un projet dans lequel se projeter, on ne peut pas se contenter de leur attribuer un poste. Cela veut dire qu’il faut leur ouvrir les sphères du développement et de la stratégie de l’entreprise, quand aujourd’hui on a l’impression qu’elle n’appartient guère qu’à un dirigeant esseulé. C’est quelque chose qui nous a vraiment surpris : quand on discute avec les salariés en ateliers, on est face à d’excellents techniciens, mais qui ont souvent une très faible connaissance des marchés sur lesquels ils sont positionnés. Pire encore, ils sont assez fréquemment ignorants de la situation de l’entreprise elle-même. Il y a un manque clair de culture économique, preuve que ce n’est pas un sujet suffisamment abordé et partagé en interne. Parfois on constate même des manquements très prononcés en termes de contrôles de gestion : on en sait pas dire ce qui fait gagner ou perdre de l’argent à l’entreprise. Sur ces points, c’est à l’encadrement d’être plus présent, car on ne peut pas prendre de décisions éclairées sans se comprendre soi-même.

« Quand la circularité de l’information entre le prépresse, les ateliers et la finition ne consiste qu’à faire transiter des dossiers, on ne se parle pas vraiment. »

Est-ce que les collaborateurs se plaignent de ce que vous décrivez, à savoir une forme d’invisibilisation de la situation de l’entreprise et de ce vers quoi elle va ?

Ce n’est pas forcément un malaise et ce n’est en tout cas pas vraiment exprimé comme tel. Il y a en revanche clairement de l’incertitude alors que paradoxalement, dans les petites entreprises, il y a une grande proximité avec le patron. Mais il se noue en conséquence une confiance un peu aveugle : les collaborateurs ont conscience que le secteur est en tension sur ses marchés historiques, mais on se dit que le dirigeant saura prendre les bonnes décisions. Certains regrettent quand même qu’il n’y ait pas plus régulièrement des réunions destinées à faire le point, pour répondre à cette simple question : où en est-on ? Encore une fois, on est obligé d’observer que les entreprises qui s’en sortent le mieux sont parvenues à créer un véritable collectif, avec du liant entre les différents services. Pour faire très simple, quand la circularité de l’information entre le prépresse, les ateliers et la finition ne consiste qu’à faire transiter des dossiers, on ne se parle pas vraiment.

Parmi les motifs d’optimisme, vous notez que les initiatives RSE sont souvent l’occasion de repenser l’organisation de l’entreprise à la racine. Certains considèrent que c’est pourtant un “luxe” que l’on peut se permettre lorsque les fonctions business pures sont avantageusement assurées. Est-ce qu’il ne faudrait pas pourtant porter les réflexions RSE ailleurs que dans les entreprises déjà “premières de la classe” ?

Il est vrai qu’il y a encore ce côté « premier de la classe » chez les entreprises les plus investies en RSE, mais dans la mesure où les attentes des clients en la matière ne font que monter, ça ne peut pas rester en l’état. Le risque à ne pas y aller est clair : on peut perdre des marchés ! Il faut redire que les donneurs d’ordre eux-mêmes ont de plus en plus de pression sur cette question et il y a une attente qui va continuer de grandir. Heureusement, le secteur peut capitaliser sur un travail qui a été déjà largement engagé – notamment via Imprim’Vert – mais il va falloir aller plus loin. Sur cette thématique RSE, c’est Print’Ethic qui tient la corde aujourd’hui et nous avons vu quelques entreprises qui s’y sont lancées. L’approche est intéressante puisque l’engagement est progressif et dimensionné aux moyens de l’entreprise, qui pourra entamer une démarche « à sa main ». C’est encore trop tôt pour tirer des conclusions, mais c’est une piste prometteuse.

Si vous deviez résumer en quelques mots l’enseignement principal de votre étude…

Le diagnostic que nous avons établi fait certes ressortir un certain nombre de points noirs et de faiblesses, notamment sur les notions de stratégie et de management. Mais je suis plutôt optimiste pour le secteur : il faut y voir un potentiel de progression énorme. Sur des marchés tendus et fortement perturbés depuis quinze ans, la révolution numérique étant passée par là, on voit des entreprises capables de s’en sortir sans même avoir abattu toutes leurs cartes et joué tous leurs atouts. En travaillant à renforcer le management, améliorer la cohérence organisationnelle en interne, construire des collectifs soudés, faire de l’amélioration continue, consolider la dimension ‘conseil & services’, faire de la R&D pour mieux préparer ses investissements et en déduire des solutions commerciales viables et, enfin, travailler son positionnement sur le marché en développant une réelle vision stratégique avec une forte identité de marque, il y aurait de quoi faire émerger de vrais champions économiques. Cette marge de progrès existe et il faut s’en réjouir.

Worldskills 2022 – Les finales internationales se préparent

Parce que la pandémie de Covid-19 continue de perturber sévèrement l’économie chinoise, les finales internationales des Worldskills 2022, qui devaient se dérouler à Shanghai, ont finalement nécessité une réorganisation expresse. Au gré d’un éparpillement contraint des différentes disciplines, les métiers des Arts graphiques livreront pour leur part leur verdict en Suisse, d’ici quelques jours maintenant. En pleine préparation, nous avons interrogé nos deux représentants français…

C’est à Aisey-sur-Seine (Bourgogne-Franche-Comté) que Louis Leichtnam (22 ans, région Grand Est) et Emmannuel Young (22 ans, région Sud Provence Alpes Côte d’Azur) aiguisent leur préparation, en tant que représentants français respectivement pour les catégories « Imprimerie » et « Arts graphiques & prépresse ». Tous deux auréolés d’une médaille d’Or à l’échelon national lors des finales qui se sont tenues à Lyon en janvier dernier, tous deux d’ailleurs à l’occasion de leur seconde participation après les finales caennaises de 2018, ils nourrissent légitimement des ambitions élevées pour ces épreuves internationales.

Consolider ses connaissances & travailler l’approche mentale

En choisissant comme lieu d’entraînement « La ferme de bon espoir » dans le département de la Côte d’Or – ça ne s’invente pas – le préparateur mental Lou Ken (OOMyCoach) ne s’y serait pas mieux pris s’il avait voulu multiplier les signes. « Aujourd’hui, nous sommes prêts techniquement. Ce module est là pour nous recadrer mentalement. L’objectif c’est d’être le plus motivé, stable et performant possible le jour de la compétition » précise Emmannuel Young, dans ce qui constitue à la fois un exercice métier mais aussi une épreuve à dimension sportive où les paramètres physiques et mentaux sont primordiaux. En l’occurrence, définir les bons objectifs est le premier pallier nécessaire d’une bonne préparation. « Nous savons ce que nous avons à travailler. C’est quelque chose que l’on définit avec nos coaches : on confronte nos points de vue et on tombe rapidement d’accord » tranche Louis Leichtnam. « Les marges de progrès techniques sont assez simples à identifier lorsque l’on reprend les sujets sur lesquels nous avons travaillé. Sur le plan mental, il y a beaucoup de dialogue pour voir s’il y a des fragilités. Aujourd’hui, nous savons tous les deux que nous avons toutes les compétences pour réussir dans la compétition, l’approche mentale sert surtout à optimiser la motivation et se débarrasser de nos peurs » complète, lucide, Emmannuel Young. Lorsqu’on leur demande s’ils observent et/ou connaissent leurs compétiteurs, on a très vite la confirmation que le travail de concentration mentale paie, parce qu’il n’est pas question de se décentrer de l’essentiel : « J’ai eu deux jours de formation avec une candidate suisse et un candidat allemand, donc oui, nous connaissons un peu nos adversaires. Mais si nous sommes concentrés sur eux, c’est que nous ne sommes pas assez concentrés sur nous » clarifie Louis Leichtnam. « Ce qui est intéressant, c’est que nous allons rencontrer des gens du métier venant du monde entier, c’est toujours enrichissant… Mais on prendra ce temps surtout après les résultats, quand on pourra profiter de moments plus conviviaux » confirme Emmanuel Young. Mais la question que ne manqueraient pas de se poser bien des chefs d’entreprise en proie à des difficultés de recrutement, devant deux jeunes à ce point surmotivés, est celle de leur point de vue sur la faible attractivité du secteur… « Je pense que les jeunes ne savent pas ce que c’est que d’être imprimeur. Quand je dis que je suis imprimeur, on pense que j’appuie sur un bouton et que je regarde les documents sortir. Moi-même j’ai eu envie de faire ce métier suite à une sortie dans les ateliers où l’on imprime le journal ‘Les dernières nouvelles d’Alsace’, parce que j’ai vu les machines tourner et que j’ai compris à ce moment-là ce que c’était réellement. C’était finalement presque un hasard » témoigne Louis Leichtnam, preuve que le métier n’a rien perdu de sa capacité d’enchantement. Est-ce que cela en fait pour autant des lecteurs plus attachés que la moyenne au support physique ? « On est forcément plus sensibles que la moyenne à ce qui est imprimé. Surtout Louis, parce que moi finalement je fais un métier en amont de l’impression. Malgré tout, je me projette un peu plus facilement dans les projets qui sont destinés à être imprimés que dans du 100 % numérique. J’ai besoin de ce résultat-là, d’avoir quelque chose de palpable : la récompense est encore plus grande sur un objet physique » confirme Emmanuel Young.

“On ne sort pas de sa zone de confort. On l’élargit”. Lou Ken (OOMyCoach) offre ici un extrait du travail de préparation mentale par lequel passent les compétiteurs.

Le début d’une (longue) histoire ?

Enfin, parce qu’il ne s‘agit pas là « que » d’une compétition spontanée, mais d’une étape dans parcours professionnel qui reste à écrire, on ne pouvait que les interroger sur leurs intentions de carrière…  « L’avantage de cette compétition, c’est qu’on est mis en relation avec énormément de gens, dans énormément de domaines. C’est une aubaine parce que dans nos métiers on peut être amené à travailler avec n’importe quelle entreprise qui voudrait communiquer, et qui plus est on est entourés de gens qui visent l’excellence. C’est donc beaucoup d’opportunités et un réseau potentiellement énorme. Pour ma part, je sais que j’ai la volonté d’entreprendre et la compétition peut être un tremplin pour ça ou une source d’inspiration » s’enthousiasme Emmanuel Young, qui ne s’arrête pas là. « Au-delà de la compétition en elle-même, le fait d’avoir travaillé avec des experts passionnés, ça nous a donné l’envie de transmettre. Ce qu’on a appris ici, on a envie de le transmettre à notre tour » ajoute-t-il, rejoint en cela par son compère d’équipe de France des Arts Graphiques : « On est déjà contactés par des entreprises et il est clair que l’on est ici beaucoup plus visibles. Et de la même façon, plus le temps passe, plus l’idée d’entreprendre fait son chemin. Ce n’est pourtant pas quelque chose que j’avais forcément en tête en arrivant, mais je commence à y réfléchir »  explique à son tour Louis Leichtnam, pour qui tout ça ne doit être que le début…  « Le fait de se dire que l’aventure se termine dans quelque jours, ce n’est vraiment pas possible pour moi : je vais continuer de m’investir dans ce concours et j’ai envie d’entraîner les futurs vainqueurs dans ma région pour les prochaines finales nationales en 2023 ». Comment dès lors douter de la motivation de nos deux représentants ? A ce titre, et quels que puissent être les résultats de ces finales, c’est déjà une belle partie de gagnée…

Parole d’experts – Des jeunes bien entourés
Robin Gillet (Arts graphiques & prépresse) et Dominique Gendre (imprimerie) sont à la fois des coaches, des experts métiers, mais aussi des chefs experts désignés par les représentants des autres pays participants pour assurer la bonne conduite de la compétition. Un statut à part qui les engage et rappelle combien la France est une nation respectée, voire référente, sur nos métiers. « Notre rôle est multiple : pendant la compétition, nous n’évaluerons pas les épreuves, à l’inverse des autres experts. Nous avons un rôle global de management : nous assurer de la bonne organisation de la compétition, du bon enchainement des épreuves et du respect des règles, tout en prenant en compte les particularités de chaque pays pour que chaque compétiteur ait sa chance » détaille Dominique Gendre. Une mission en forme de reconnaissance qui mériterait peut-être elle aussi sa médaille…

Congrès 2022 – L’UNIIC et l’UNFEA marquent leur rapprochement

Un des maîtres-mots du Congrès de la Filière Graphique 2022 était le décloisonnement. Preuve en était donnée dès les premiers échanges de la journée puisque l’événement a été l’occasion d’officialiser un rapprochement concret entre l’UNIIC et l’Union Nationale des Fabricants d’Etiquettes Adhésives (UNFEA)…

Pierre Forcade, Délégué général de l’UNFEA, aux côtés de Benoit Duquesne, Président de l’UNIIC.

“C’est un grand moment pour nos deux fédérations” n’hésite pas à affirmer Pierre Forcade, Délégué général de l’UNFEA. Ce “moment” est en l’occurrence la matérialisation d’une approche commune sur les thématiques RSE au sens large. “Les adhérents de l’UNFEA pourront bénéficier de ce que l’UNIIC propose sur le volet environnemental, comme nos propres adhérents” annonçait en effet Pascal Bovéro, Délégué général de l’UNIIC, quelques minutes plus tôt. Une ouverture qui, il l’assure, “n’est que le début d’une histoire, pour créer la maison de tous”. Comptant 111 adhérents à ce jour (soit environ 400 sites de production en France, pour un chiffre d’affaires de 1,8 milliard d’euros), l’UNFEA, par la voix de son délégué général, identifie en effet “de nombreuses problématiques communes” et n’entend “pas recréer des approches qui existent déjà à l’UNIIC”. Ce sont plus particulièrement les labellisations Print Ethic et le recours à l’outil en ligne ClimateCalc (lequel permet d’évaluer ses émissions de gaz à effet de serre, de façon spécifique pour les entreprises du secteur graphique) qui deviennent dès lors des opportunités communes, tant pour les adhérents de l’UNIIC que pour ceux de l’UNFEA. Mais ce ne devrait effectivement être qu’une première pierre : “Les problèmes de recrutement et de formation seront nos thèmes de travail avec l’UNIIC également” évoquait ainsi également Pierre Forcade. Affaire à suivre, donc..

Les Conventions Nationales d’Objectifs sont reconduites

La convention nationale d’objectifs de l’édition, imprimerie, reprographie et autres activités connexes, ainsi que la convention nationale d’objectifs transversale dédiée spécifiquement aux troubles musculo-squelettiques et aux accidents liés aux activités de manutention manuelle et de port de charges, ont été signées par les organismes agréés le 23 juillet 2021 (voir document) auprès de la CNAM.

Comment seront mises en application ces CNO ?

Il demeure, toutefois, que ces conventions ne seront applicables qu’après signature des différentes instances représentatives patronales auprès desquelles elles sont applicables. Leur entrée en application souffrira d’un délai de carence d’environ 5 à 6 mois.

L’ancienne CNO applicable à la branche imprimerie a fait l’objet de 55 demandes de contrats, dont 28 ont été signés par les CARSAT, demandes étant à ce jour encore en cours d’instruction puisque cette CNO qui devait prendre fin en octobre 2020 a été prorogée exceptionnellement, compte tenu des circonstances sanitaires, jusqu’au début avril 2021.

Toutefois, il est à retenir que 20 contrats ont été initiés par les Caisses régionales alors que 6 seulement ont été initiés par les entreprises, ce qui semble insuffisant, il conviendrait qu’à l’avenir nos entreprises soient plus demanderesses.

Les causes de non signature d’un contrat résident dans l’abandon par l’entreprise de son projet, ou dans les refus des CARSAT pour défaut d’éligibilité administrative (ex. cotisation non à jour, document unique d’évaluation non établi, pièces du dossier non remises).

Enfin, 8 contrats dans la branche imprimerie ont été signés par l’intermédiaire de la CNO transversale.

La CNAMTS nous fait savoir que les 28 contrats déjà signés ont concerné 939 salariés pour des investissements totaux (Caisses + entreprises) de 2 437 684 €. Les Caisses ont participé à une hauteur moyenne de 31 % (758 809 €), soit 27 100 € par contrat en moyenne.

Quels sont les risques professionnels concernés ?

Une méthodologie vous est offerte pour réaliser l’évaluation des risques des activités de votre entreprise et traduire, le plus simplement possible, cette évaluation des risques dans un document unique. En savoir plus

Il vous suffit, en un clic, de répondre aux questions posées. Le document unique sera réalisé automatiquement à la fin de ce travail, ainsi que le plan d’actions à mettre en œuvre dans votre entreprise, pour remédier aux risques si nécessaire.

Dans le cadre de ce dispositif des subventions spécifiques peuvent vous être offertes, hors champ CNO, ce sont des subventions plurisectorielles, applicables aussi au secteur de l’imprimerie, par exemple :

  • L’activité de filmage manuel des palettes expose les salariés à des risques de TMS lorsque le salarié filme, dos courbé ou bras tendu, les extrémités de la palette. Par ailleurs, il peut être exposé à des risques de chutes de plain-pied par manque de visibilité, ou de hauteur pour les palettes de haute dimension.

Une subvention s’applique aux équipements concernés pour les entreprises de moins de 50 salariés, elle représente un montant de 50 % de l’investissement plafonné à 25.000 euros, elle s’applique aux matériels suivants :

    • Filmeuse à plateau rotatif ;
    • Filmeuse à bras tournant ;
    • Housseuse automatique.

Sont inclus dans le programme Filmeuse + : les équipements de sécurisation de la zone de travail et les aménagements ergonomiques permettant d’éloigner les salariés de la machine et de protéger les équipements.

  • Un autre programme Risques Chimiques Equipements : Les équipements de captage financés sont les sorbonnes de laboratoire et les armoires ventilées de stockage. Les équipements réduisant les risques d’exposition financés sont les fontaines de dégraissage, les bacs de rétention, les dispositifs de brumisation pour abattage des poussières et les aspirateurs de chantier.

L’imprimerie pourra bénéficier de la subvention « Risques Chimiques Pros Equipements » :

  • 50% du montant hors taxes (HT) des sommes engagées pour les équipements destinés au captage des polluants ou réduisant les risques d’exposition et pour la compensation de l’air extrait associée ;
  • La subvention est plafonnée à 25 000 euros pour montant minimum d’investissement de 2000 € HT. Les demandes sont acceptées dans la limite du budget alloué à cette aide financière.

N’hésitez pas à contacter votre CARSAT dans le cadre d’un projet précis et avant de passer commande auprès d’un prestataire. Si vous êtes adhérent de l’UNIIC, n’hésitez pas non plus à solliciter notre service HSE sur ces questions : nous pouvons vous accompagner.