Drupa 2021 – En attendant de se retrouver…

Cet article est livré en avant-première. Il est à paraître dans Acteurs de la Filière Graphique n°134 (juin 2021).


Malgré un effort manifeste en termes de contenus délivrés en ligne, cette Drupa « virtuelle » – la première du genre, mais peut-être pas la dernière – n’aura évidemment pas fait oublier les circonstances difficiles dans lesquelles elle s’est tenue. Annonçant 170 exposants, la Drupa n’évite pas quelques absences notables (Agfa, Ricoh, Manroland, Xerox), ni n’échappe à un relatif manque de grandes nouveautés, dans un contexte où quelques grands noms avaient décidé de réserver leurs principales annonces à des événements propriétaires, également tenus en ligne. En attendant le retour d’un format physique annoncé pour 2024, que retenir de cette édition de transition ?

Qu’elle semble loin, cette image d’une manifestation bondée, qui revendiquait encore 19 halls, 1870 exposants et 314 000 visiteurs en 2016. A juste titre considérée comme la Drupa de l’impression numérique – une tendance symbolisée par la place qu’y avait occupé HP, alors devenu le plus gros exposant du salon, pour la première fois devant Heidelberg –, l’édition 2016 avait marqué un sursaut de positivisme et une relative confiance retrouvée en l’avenir. Il sera plus difficile d’adjoindre une thématique aussi claire à cette édition 2021, qui est en soi le résultat d’une somme inédite de contraintes, qu’elles soient sanitaires ou tendancielles, les restrictions radicales visant les foires et salons étant surplombées d’une inévitable accélération des pratiques digitales. Autant dire que les vents contraires soufflaient très fort… Mais, si c’était donc dans l’adversité que le print révélait pour de bon les meilleures cartes qui lui restent à jouer ? Retour sur l’événement en quelques grandes tendances.

« La prochaine étape consiste à faire cohabiter une intelligence artificielle en temps réel directement intégrée aux machines, avec une intelligence artificielle issue du ‘Cloud computing’ capable de mettre en relation des données plus globales tirées de l’ensemble de nos systèmes d’impression. » – Dennis Rossmannek (Senior program Manager chez Heidelberg)

L’impression numérique a définitivement imposé ses logiques à toute l’industrie

De ce point de vue, la Drupa 2021 ne s’est toutefois pas contentée de répéter la partition de 2016, puisque ce sont moins les matériels d’impression numérique qui ont accaparé le propos que ce par quoi ils peuvent donner leur pleine mesure : la data ! Sur toutes les lèvres, le terme « data » fait notamment dire à Dennis Rossmannek (Senior program Manager chez Heidelberg) que « la prochaine étape consiste à faire cohabiter une intelligence artificielle en temps réel directement intégrée aux machines, avec une intelligence artificielle issue du ‘Cloud computing’ capable de mettre en relation des données plus globales tirées de l’ensemble de nos systèmes d’impression »… Un argumentaire tenu – vous l’aurez noté – par un ténor de l’offset, qui a donc complètement épousé le discours de la flexibilité numérique. Le basculement n’est pas anodin et traduit combien ce sont les mêmes tendances qui nourrissent de façon transversale toute l’industrie, tous procédés d’impression confondus. « Nous sommes en capacité de croiser, via l’ensemble de notre parc machines installé, les données de plus de 60 millions de jobs » insiste Dennis Rossmanek pour vanter les mérites d’une data de qualité interne à Heidelberg, pour servir l’ensemble des clients de la marque. Que reste-t-il alors aux porte-voix de l’impression numérique en tant que telle ? Probablement déjà l’assurance de dicter le cap tenu par l’industrie, et plus encore l’avantage de contenir en son sein l’essentiel de la croissance observable dans un secteur globalement saturé. Une position renforcée par l’épisode pandémique de Covid-19, comme le souligne Alon Schnitzer (Strategic Business Development – HP Indigo) : « Les imprimeurs équipés de machines HP Indigo ont rapidement pu se repositionner sur des marchés plus adaptés à la demande, en temps de crise », citant notamment des segments de marché en croissance dans le domaine du packaging flexible, de l’étiquette ou du carton pliant. Mais plus encore, HP voit en cette période extrêmement contrainte une accélération de tendances déjà engagées, qui renforcera durablement l’omniprésence des technologies numériques. Et selon le fabricant Israélien, l’impression ne fera pas exception : « L’explosion du e-commerce s’est accompagnée d’une volonté encore plus forte de personnalisation chez les consommateurs. Les marques, de leur côté, ont compris qu’elles devaient s’engager et créer des dynamiques de communauté autour de leurs actions » insiste Alon Schnitzer, dans un rapport ambivalent à la crise sanitaire : car si personne ne saurait évidemment s’en réjouir, il demeure tentant d’y voir des opportunités et d’y lire la confirmation d’une stratégie portée de longue date. Une stratégie ainsi légitimée, quitte à à en retraduire les arguments centraux dans des discours ouvertement commerciaux.

« Le papier/carton est encore à ce jour le meilleur substitut « green friendly » auquel les marques peuvent se rattacher pour mettre le plastique sur la touche. »

L’environnement n’est plus une variable verte, mais une priorité

Qu’il s’agisse de minimiser les consommations (de substrat, d’encres, d’énergie…) ou qu’il s’agisse d’ajuster au mieux les flux productifs selon une demande évaluée en temps réel, n’importe quelle optimisation technique en la matière est d’emblée vue sous un angle dit « écoresponsable ». De sorte que là où beaucoup auraient insisté sur une réduction des coûts et donc un avantage concurrentiel et économique, l’accent est aujourd’hui prioritairement mis sur les gains environnementaux permis par des progrès logiciels et/ou hardware. « Le packaging est nécessaire, mais pas n’importe lequel » résume par exemple Comexi, qui aura dédié une large part de sa présentation à exposer des solutions dite « durables ». Hendrik Fritsch (Comexi Group Industries) assure ainsi que tant dans les domaines de la flexographie, que de l’offset ou de l’impression numérique, la marque oriente prioritairement ses efforts vers des innovations « vertes » capables de s’inscrire dans un « phénomène englobant qui modifiera profondément le marché ». Car les exigences viennent désormais de l’extérieur (souvent sous les traits d’une injonction réglementaire) et elles ne laissent guère le choix : il faut faire la chasse aux gaspillages. Un défi industriel qui se traduit jusque dans l’ingénierie des systèmes d’impression, pensés – ou en tout cas vendus – comme des garde-fous permettant de produire mieux, sans surconsommer. Reste toutefois – et entre autres – à s’arranger d’une contradiction apparente, entre d’un côté les attentes « responsables » largement manifestées par les consommateurs et les donneurs d’ordre, et de l’autre les attentes tout aussi élevées en termes de qualité d’impression, voire d’ennoblissement. Deux exigences parfois irréconciliables, quoique selon Linda Gröhn (Business Development Manager Global Brands & Sustainability – Kurz Graphics) il ne faille pas renoncer à embellir, dès lors que des efforts compensatoires sont portés pour « accompagner chaque étape de production d’une exigence d’optimisation ». Car il faudrait certainement commencer par là : optimiser pour minimiser les impacts environnementaux ne doit pas consister à appauvrir l’imprimé lui-même.

Les habitués auront reconnu le hall d’entrée de la manifestation à Düsseldorf, qui aura donc servi de décorum aux lancements digitaux des keynotes et autres e-conférences.

Le segment du packaging réaffirme sa bonne santé

S’il est un segment de marché qui n’a pas connu la crise – sinon en étant au contraire sur-sollicité – c’est celui de l’emballage. Tiré par le haut par l’explosion du e-commerce, où il faut ré-emballer des produits qui doivent vous arriver en état de parfaite intégrité, le packaging papier/carton aura autant fait la preuve de son caractère « essentiel » qu’il aura répondu aux attentes (encore certes relativement naissantes) de sobriété que l’époque réclame. Car de « sobriété » il est en l’état surtout question pour déplastifier. Non pas que le papier/carton soit exempté d’exemplarité en la matière – et à terme, lui aussi sera tenu de faire sa cure d’amaigrissement – mais c’est encore à ce jour le meilleur substitut « green friendly » auquel les marques peuvent se rattacher pour mettre le plastique sur la touche. Par ailleurs, les « modèles gagnants » autour du packaging semblent suffisamment nombreux pour valider différentes approches : des petites séries personnalisées en impression numérique, aux tirages plus volumiques assurés par des procédés plus traditionnels, la demande est solide et justifie à ce jour des positionnements stratégiques divers. Ainsi cette « Drupa light » a-t-elle donné à voir les exigences de réduction de matière attendues (il faudrait d’ailleurs ici évoquer les efforts fournis en ce sens via des design éco-concçus de plus en plus minimalistes), sans condamner un marché trop protéiforme pour être résumé à ce seul aspect.

Les effets de la pandémie sur les usages et pratiques ont forcément fait l’objet d’une réflexion particulière.

De l’impression 3D à l’intelligence artificielle, la Drupa en pointe sur la veille technologique

La chose tiendrait presque de la menace : « Les 15 % d’entreprises qui s’investiront le plus dans les logiques d’intelligence artificielle capteront 65 % du ROI qui y est lié » prévient dans sa keynote Michael Gale, spécialiste décrété de la transformation numérique et auteur notamment du best seller « The Digital Helix : Transforming Your Organization’s DNA to Thrive in the Digital Age ». De la même manière, il s’attache à faire comprendre que les moins enclins à embrasser le phénomène le subiront, avec le risque de disparaître. Difficile de s’emparer d’une telle généralité sans nuancer, mais il est certain que les industries graphiques ne seront pas un secteur étranger à cette (r)évolution. Il y a même déjà pris sa part, développant des systèmes de pilotage de production plus automatisés et « intelligents » que jamais. Pas seulement d’ailleurs en impression numérique, la chose valant tout autant – notamment – en offset, via des progrès logiciels continus depuis près d’une dizaine d’années. A celles et ceux qui argueront que l’automatisation n’est pas stricto sensu de l’IA, c’en est toutefois incontestablement la première marche. De fait, si le vocabulaire a sensiblement changé depuis l’édition 2016, passant de celui de l’automatisation des flux à celui du machine learning et des analyses prédictives, la logique est restée la même : aller aussi loin que possible dans l’absorption des imprévus et la volonté grandissante de produire des « justes volumes » personnalisés, sans contretemps. Tous font ainsi le constat qu’à condition de nourrir les systèmes d’une data pertinente, les machines sauront désormais automatiser des tâches qui nécessitaient jadis des interventions humaines traduites en interruptions des flux de production.

De façon concomitante, l’impression additive occupe une place grandissante dans le champ des sujets abordés au sein du salon – tout virtuel qu’il soit – comme si la perspective d’une industrialisation des « niches de marché » qu’elle abrite semblait (enfin!) se préciser. Peut-être faudra-t-il attendre 2024 pour en avoir le cœur net, car si cette « Virtual Drupa » s’est avérée généreuse en contenus, difficile de prendre le pouls d’une industrie au travers d’un événement ainsi amputé de sa dimension physique, délesté d’une part substantielle de ses exposants habituels et attaché à faire bonne figure, dans un contexte économico-sanitaire encore très incertain. Alors saluons cet avant-goût, mais malgré tout : vivement notre revanche !

Thomas Rudelle (Carrefour) – « Il n’y a pas de remise en cause de l’importance du papier »

Si l’heure n’est pas à remettre en cause l’efficacité maintes fois démontrée du support papier en tant que véhicule publicitaire et promotionnel, les mesures restrictives visant actuellement l’imprimé non-adressé contraignent les enseignes de grande distribution à penser de nouveaux équilibres. Entretien avec Thomas Rudelle, directeur du marketing digital chez Carrefour, pour qui le print est l’allié objectif de ses déclinaisons numériques…

Thomas Rudelle (©Amélie Marzouk).

Vous êtes directeur du marketing digital chez Carrefour, ce qui ne vous empêche pourtant pas d’insister sur l’efficacité du prospectus papier pour drainer du trafic en magasin… Comment voyez-vous évoluer la complémentarité des supports print et numérique, à l’avenir ?

Nous pouvons nous appuyer sur de nombreuses études qui ont déjà démontré l’efficacité du tract promotionnel papier. Nous savons que c’est un driver majeur de trafic pour nos magasins. Nous n’avons donc aucune raison de nous en passer, sauf si le régulateur nous y oblige. Auquel cas, il nous faudra trouver des alternatives. Le prospectus imprimé aujourd’hui reste un levier publicitaire qui demeure très puissant, même si les usages changent et qu’il nous faut constamment nous adapter. Ce qui nous importe, c’est de coller à ces usages pour proposer le bon média, au bon public, au bon moment. Nous portons là-dessus un regard pragmatique d’efficacité : en fonction des publics cibles, nous actionnons le meilleur levier de communication. Dans la pratique, cela nous amène à combiner le papier et le digital, sans nous arrêter à des oppositions stériles. Bien sûr, nous essayons différentes choses, expérimentons différentes approches et affinons notre stratégie, mais les meilleures réponses s’appuient toujours sur une forme de complémentarité des supports promotionnels.

« Nous savons que le papier est un driver majeur de trafic pour nos magasins. »

Est-ce que l’imprimé publicitaire non-adressé n’est pas encore aujourd’hui une arme concurrentielle, de telle sorte que s’il vous fallait vous en passer sur certains territoires, la déperdition de trafic en magasin se ferait au profit d’enseignes voisines ?

Nous procédons régulièrement à des tests et observons quels peuvent en être les effets, mais nous savons que ces tests sont très observés en magasin. Il est donc parfois difficile de mesurer la part de rationnel dans les résultats que nous mesurons. Les grands acteurs du numérique américains  vous diront que le digital c’est formidable, les industriels de l’impression vous diront que le papier c’est formidable, ce qui importe pour nous c’est d’arbitrer au mieux en gardant à l’esprit que toutes les études qui concernent ces sujets sont interprétables. Nous restons donc prudents et vigilants, en ce sens que nous sommes autant que possible à l’écoute de l’évolution des pratiques. Nous mobilisons sur ces sujets des « équipes études » pour mesurer au mieux l’efficacité de nos différents supports de communication, tout en ayant conscience que les tendances sont changeantes et qu’il faut y réfléchir en permanence. Mais aujourd’hui, il n’y a pas de remise en cause de l’importance du papier : nous savons qu’il est incontournable pour la grande majorité de nos magasins.

A la fois conspué tel le symbole d’un consumérisme aveugle et guetté par de nombreux consommateurs avides de bonnes affaires, le Black Friday cristallise les contradictions d’une époque complexe. Il n’est notamment pas rare que des autocollants Stop Pub disparaissent des boites aux lettres à l’approche de l’événement, comme si certains craignaient de rater des offres importantes…

Avez-vous senti une « pression verte » poussant à la digitalisation de la communication ?

J’ai abordé ces sujets avec les GAFA avec lesquels je travaille, et je leur ai posé directement  cette question : est-ce que vous pensez que vos canaux sont plus vertueux que ceux du print ? En l’occurrence, ils se savent perfectibles sur certains points, notamment concernant l’efficience environnementale de leurs data center. Ils sont conscients des critiques dont ils peuvent être la cible et ne se présentent pas comme une solution verte face au prétendu « gâchis de papier ». En l’occurrence, je ne suis pas un spécialiste du print, mais j’entends les gens dont c‘est le métier chez Carrefour assurer que le papier que nous utilisons est issu de forêts gérées durablement, que les encres respectent un strict cahier des charges RSE. C’est un message parfois difficile à faire entendre auprès du grand public, mais en termes d’écoresponsabilité, comparer le papier et le digital est quelque chose de complexe. Il y a certainement ici une forme d’injustice, mais entre ce que le destinataire voit concrètement dans sa boite aux lettres, et ce que l’on cache derrière la « dématérialisation » numérique, il y a un possible déficit d’image pour le papier. Tout le monde n’a pas encore le réflexe de se demander ce que pèse un e-mail, alors que ce n’est évidemment pas neutre.

« Plus l’offre promotionnelle est forte et impactante, plus le support papier est pertinent. »

Est-ce que l’imprimé publicitaire adressé, moyennant une possible personnalisation des contenus, fait pour vous figure de solution d’avenir ? Ou est-ce qu’à vos yeux, c’est le digital qui se prête le mieux à ces évolutions ?

C’est une réflexion que nous avons menée en Espagne et que nous aimerions reconduire en France : nous avons demandé à nos clients titulaires d’une carte de fidélité par quel canal ils souhaitaient recevoir nos informations. E-mail, messagerie instantanée, application mobile, prospectus, courrier adressé… Les consommateurs demandeurs d’informations uniquement papier sont plutôt les moins nombreux et les plus âgés. Une grosse majorité réclame du multicanal. Il faut prendre en compte les spécificités d’un pays comme l’Espagne, où l’application de messagerie instantanée Whatsapp est extrêmement répandue, mais ce que l’on observe, ce sont surtout des combinaisons digital + print. Certaines familles de produits, lorsqu’elles bénéficient de grosses offres promotionnelles, comme ce peut être le cas sur des produits électroniques, se prêtent extrêmement bien au catalogue papier, là où les offres un peu plus « standard » liées à des produits de consommation courante, sont plus solubles dans une communication digitale. En quelque sorte, plus l’offre promotionnelle est forte et impactante, plus le support papier est pertinent. Nous réfléchissons aussi à d’autres pistes, comme celle de la Presse Quotidienne Régionale : cela permet de rentrer dans les boîtes aux lettres en générant une émotion, via un médium encore très puissant localement, tout en adressant un contenu publicitaire pertinent. Autre possibilité que ces tests ont soulevée : proposer le catalogue papier en magasin sur des présentoirs scénarisés à cet effet, avec ceux de la semaine en cours à l’entrée du magasin, et ceux de la semaine à venir en sortie de magasin. L’important encore une fois, c’est de proposer du papier au bon moment.

En développant à la fois une gamme de produits spécifiques ainsi même qu’une enseigne « Carrefour Bio », l’enseigne a déjà prouvé qu’elle ne restera pas sourde aux tendances écoresponsables.

La digitalisation massive de la communication subit elle aussi de nombreuses critiques : on commence à mesurer et dénoncer ses impacts environnementaux tout autant que l’on s’inquiète de la collecte de données personnelles qu’elle peut engendrer. Qu’est-ce que cela inspire au directeur du marketing Digital que vous êtes ?

Sur cette question sensible des données personnelles, nous sommes déjà soumis à des contraintes réglementaires que le groupe Carrefour prend on ne peut plus au sérieux. Le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) a déjà largement balisé les objectifs à tenir et mobilise des équipes pluridisciplinaires chez nous, dans tous les  pays. C’est devenu de toute façon inhérent à la construction-même d’une stratégie globale de marketing digital : nous savons que les notions de transparence et de consentement sont centrales et qu’elles le seront de plus en plus. Ça ne signifie pas pour autant que nous renonçons à la valorisation de la data. La technologie numérique amène à gérer les choses autrement, avec certainement plus de granularité et des remontées statistiques en temps réel, mais je reste convaincu que sur le fond, c’est une méthodologie que nous appliquions déjà avant l’avènement d’Internet. Une enseigne a toujours cherché à connaître ses clients et décrypter les pratiques d’achat. Les outils dont nous disposons aujourd’hui sont en revanche plus puissants, raison pour laquelle la réglementation s’est adaptée.

« Si demain une municipalité comme Grenoble décidait d’instaurer un « Oui Pub », voire d’en faire la règle par-delà son expérimentation, nous réfléchissons déjà à des solutions multicanales d’ajustement. »

Des expérimentations dites « Oui Pub » sont à l’étude dans le cadre du projet de Loi portant lutte contre le dérèglement climatique et ses effets, lui-même extrait des travaux menés pendant neuf mois par les cent cinquante personnes tirées au sort constituant la Convention citoyenne pour le climat… Concrètement, il serait question d’expérimenter pendant trois ans un dispositif d’opt-in sur boites aux lettres, pour les imprimés publicitaires non-adressés, au sein des territoires concernés. Est-ce que ce n’est pas de nature à accélérer un basculement vers une stratégie de communication plus numérique, pour une enseigne telle que la vôtre ?

Nous suivons évidemment cela comme le lait sur le feu… De fait, oui, nous travaillons à des solutions de substitution si le « Oui Pub » devait opérer une percée importante et modifier les équilibres sur lesquels nous avons construit notre stratégie de communication. Nous ne pouvons pas ignorer les répercussions potentielles qu’aurait ce dispositif s’il était largement appliqué. Au-delà de ce que nous percevons aujourd’hui comme étant plus efficace, il y a ce que nous serons en droit de distribuer, tout simplement. Des décrets d’application liés à cette expérimentation peuvent être déposés dès cette année et s’il sera difficile d’être totalement prêts, nous ne pouvons pas nous permettre d’être démunis. Pour autant, il n’est aucunement question de précipiter des décisions qui méritent d’être finement analysées. Si demain une municipalité  décidait d’instaurer un « Oui Pub », voire d’en faire la règle par-delà son expérimentation, nous réfléchissons déjà à des solutions multicanales d’ajustement : est-ce que je fais plus de digital ? Plus de PQR ? Plus de radio ? Est-ce que je mets plus de catalogues en libre-service en magasins ? Est-ce que je pousse vers la distribution adressée ? Etc. Ce sont autant de réflexions qui sont menées actuellement, parce que nous ne pouvons pas nous permettre de nous retrouver sans solutions. Nous raisonnons toutefois toujours « à la maille locale » parce que là encore, il serait malvenu de généraliser une seule approche sur l’ensemble du territoire. Comme je l’ai déjà dit, nous tâcherons d’être dans l’analyse la plus fine possible, pour être en phase avec la réalité du terrain.

Le livre, un bien essentiel

Nous reproduisons ci-dessous in extenso le communiqué co-signé par le Syndicat national de l’édition (SNE),  le Syndicat de la librairie française (SLF) et le Conseil permanent des écrivains (CPE) quant à la nécessaire qualification du livre en “bien essentiel”, justifiant la continuité d’activité pour la Filière Livre – fabrication comprise – durant la période de confinement.

L’UNIIC s’associe sans réserve aux constats dressés par ses partenaires auteurs, libraires et éditeurs, avec la volonté ferme de ne pas revivre l’épisode de mars dernier, les librairies ayant en effet toute légitimité à se présenter comme un indispensable rempart culturel, face au risque d’isolement. 

[COMMUNIQUE]

La lecture de livres est une activité essentielle à nos vies citoyennes et individuelles.

L’extraordinaire appétit de lectures chez les Français, jeunes ou adultes, s’est à nouveau confirmé ces derniers mois ; les livres assouvissent notre besoin de compréhension, de réflexion, d’évasion, de distraction, mais aussi de partage et de communication, y compris dans l’isolement.

Le premier confinement n’avait pas permis hélas de maintenir les librairies ouvertes, blessant au cœur toute la filière du livre ; les professionnels n’y étaient pas préparés. Mais depuis, les librairies de proximité, qui maillent tout notre territoire, se sont organisées et équipées. Elles peuvent être parfaitement en mesure d’accueillir les lecteurs dans la perspective d’un nouveau confinement, dans des conditions sanitaires sûres et éprouvées.

Le « click and collect » est indispensable et d’ores et déjà en place dans un très grand nombre de points de vente. Mais il ne saurait combler toutes les attentes des lecteurs, notamment dans les deux mois précédant les fêtes de fin d’année où plus d’un quart des livres sont achetés. Les livres sont, depuis plusieurs années, le cadeau le plus offert par les Français. Comment y renoncer ?

Aussi, auteurs, illustrateurs, éditeurs et libraires lancent un appel solennel, solidaire et responsable, au gouvernement : laissez nos librairies ouvertes pour que le confinement social ne soit pas aussi un isolement culturel. Nos lecteurs, attachés à la librairie indépendante, ne le comprendraient pas et le vivraient comme une injustice.

Nous sommes prêts à assumer nos responsabilités culturelles et sanitaires.

Syndicat national de l’édition (SNE)
Syndicat de la librairie française (SLF)
Conseil permanent des écrivains (CPE)

Source : site du SNE

Mon mailing est ROI : retour en images

Dans un contexte sanitaire évidemment compliqué, les équipes de l’UNIIC et du SNCD ont uni et conjugué leurs efforts pour maintenir un événement qui n’a pas échappé aux questionnements : devant tant d’incertitudes, fallait-il repousser ou opter pour un format numérique ? Non sans quelques contraintes – certains intervenants n’ont effectivement pu faire entendre leur voix que par écran interposé – Mon Mailing est ROI s’est bel et bien tenu ce lundi 14 septembre au Grand Rex, réunissant près de 100 participants et occasionnant des échanges à ce point riches qu’ils qui auront sans mal justifié la décision des deux organisations. Retour en images sur les temps forts d’une journée qui n’en a pas manqué…

Bruno Florence, Président du SNCD.

Benoît Duquesne, Président de l’UNIIC.

Les Présidents respectifs du SNCD et de l’UNIIC ont rappelé l’importance de maintenir un événement physique porteur de sens, en des temps où les alternatives numériques ont tendance à s’imposer par défaut. Ils trouveront un écho bienvenu en l’intervention – filmée et retransmise par écran, pour le coup – du Sénateur de la Haute-Vienne, Jean-Marc Gabouty : “Il y a une nécessité de tisser des liens entre les différents métiers de la chaîne graphique” déclarait-il en effet, convaincu que “la diversité des techniques et des savoir-faire est un atout pour demain”. Des velléités de rapprochements et d’actions croisées incarnées par l’événement lui-même, dédié à situer au plus juste le print dans le monde sensiblement digitalisé du marketing direct. Car Jean-Marc Gabouty n’en doute pas, le tout-numérique est une impasse dont nous apercevons déjà les failles, dénonçant notamment un “manque de hiérarchie” dans des contenus volatiles et mal ciblés.

Christophe Barbier, Directeur de rédaction de l’hebdomadaire L’Express.

Homme de Presse, mais aussi homme de scène et de théâtre, Christophe Barbier s’est livré à une un monologue passionné en forme d’hommage au papier, célébrant notamment “une noblesse qui est le miroir de sa prestance intellectuelle”. Sans nier évidemment “la force grandissante du véhicule digital”, le journaliste a insisté sur les atouts du support imprimé qui lui sont exclusifs : il est générateur d’émotion via la sensorialité du matériau, meilleur outil de mémorisation, porteur d’une symbolique sociale forte etc. Et ce alors que, souligne-t-il, “le numérique paye aujourd’hui son immaturité : on ne sait pas encore le réguler et à certains égards, c’est une jungle où la haine donne à se répandre”. Faisant notamment ici référence aux échanges pour le moins tendus qui s’observent au quotidien sur les réseaux sociaux, Christophe Barbier n’a par ailleurs pas manqué de louer la capacité du matériau à être conservé : “Le papier n’est pas éternel, mais on sait à quel point il peut durer. En revanche, on ne connaît pas la capacité des contenus digitaux à durer, eux qui ont plutôt tendance à être volatiles et éphémères”.

Un collectif malicieusement baptisé “Vilain petit canal” s’est attaché à lire un manifeste théâtralisé, autour des atouts du mailing papier. Un autre moment de scène, qui derrière sa légèreté apparente, n’en a pas moins permis de prendre à rebours les idées reçues et rappeler les avantages de l’imprimé, notamment en termes de retour sur investissement.

Bernard Trichot, Directeur de l’IDEP.

Bernard Trichot (IDEP) puis Xavier Guillon (France Pub) ont nourri de leur expertise la séquence “Analyse économique du secteur” pour l’année 2019. Une année charnière puisqu’elle permettra de poser un socle pré-Covid-19, en forme de repère d’avant-crise. “Les volumes en marketing direct sont certes en baisse, mais il faut souligner à quel point ils restent massifs : cela représente 2,8 milliards d’euros pour les imprimés sans adresse (ISA) et 2,5 milliards d’euros pour le courrier publicitaire. C’est encore considérable, d’autant que la tendance baissière n’est pas continue : il y a des à-coups qui correspondent à l’arrêt de certaines grosses campagnes quand dans le même temps, une multiplicité de campagnes moins massives sont en plein essor” précise Xavier Guillon, illustrant notamment la chose avec le secteur caritatif, qui s’est distingué à la hausse sur la période considérée. “On trouve d’autres contre-exemples, notamment dans la PQR (Presse Quotidienne Régionale)” poursuit-il, expliquant combien “ces journaux locaux ont bien résisté pendant la crise sanitaire, par besoin d’informations locales et par la pertinence des circuits courts”.

Une table ronde bien nommée “Vis ma vie de mailing” a permis de présenter les différentes étapes de la création d’un mailing, ainsi que les innovations technologiques visant à optimiser la production des campagnes. Du donneur d’ordre à l’opérateur de data en passant par l’imprimeur/routeur, le cas d’une campagne caritative chapeautée par Fondation de France (qui se définit comme le “premier réseau philanthropique de France”) a ainsi été décortiquée dans ses moindres aspects pour mettre en exergue l’imbrication nécessaire des mondes du print et du numérique. Une façon de rendre concrets les rouages d’une “complémentarité” érigée comme un mantra tout au long de l’événement…

Restrictions sanitaires obligent, certaines interventions ont bel et bien pu être menées “en live” mais à distance. Ce sera notamment le cas de celle de Salvatore Spatafora, Directeur marketing de la Blancheporte. A l’occasion d’un test dont il aura exposé les enseignements et hypothèses de développement, 50 000 catalogues classiques ont été envoyés en même temps que 50 000 catalogues innovants et personnalisés. “Il ne s’agit aucunement de versioning mais bien de 50 000 catalogues uniques, ciblés sur la base des historiques d’achats de nos clients. Cela a généré des recommandations produits que nous avons incluses dans des catalogues personnalisés” détaille-t-il, avant de préciser, pêle-mêle, que “deux fois plus de clients se souviennent avoir reçu un catalogue quand il est personnalisé (89 %) avec un panier moyen qui augmente en moyenne de 7 %. On constate également un fort effet drive-to-Web grâce à ces catalogues : deux tiers du chiffre d’affaires est réalisé sur le site, par effet de redirection” souligne-t-il également. S’il ne désigne encore la chose que comme un “Test” qui demande à être validé en des conditions de production plus habituelles, Salvatore Spataforta ne cache pas combien l’expérience est encourageante : “Ces catalogues accomplissent un formidable travail d’avant-vente. ce sont des outils de séduction précieux avec un taux de transformation à deux chiffres” s’emballe-t-il en effet, évoquant à terme des catalogues à la fois plus singuliers, mais également plus enclins à “intégrer des contenus éditoriaux ainsi que du conseil”, conclue-t-il, non sans rappeler qu’il faudra pour cela tirer profit des nouvelles technologies qui rendent la chose possible (IA, impression numérique etc.)

Jérôme Martel, Directeur commercial d’Adrexo.

Florent Huille, Direction commerciale du Groupe La Poste.

Si l’efficacité du média courrier n’est plus démontrer, conviennent conjointement Jérôme Martel et Florent Huille, il convient toutefois d’observer la baisse des volumes qui transitent par les boites aux lettres, pour prendre acte des évolutions à engager… “Il est exact de dire que la boite aux lettres s’est vidée. mais le paradoxe, c’est qu’elle est devenue d’autant plus précieuse : le papier demeure ainsi un média ROI-iste dont il est difficile de se passer” affirme le Directeur commercial d’Adrexo. “Mieux on ‘toilettera’ nos adresses, mieux on ciblera et plus le média papier fera la preuve de sa pertinence” enchaîne Florent Huille, insistant par ailleurs pour rappeler que “la moindre requête Google a la même empreinte carbone que la production d’un sac plastique”, faisant ici écho aux attaques environnementales dont font continuellement l’objet les ISA.

Pascal Bovéro (Délégué général de l’UNIIC) et Nathalie Phan Place (Secrétaire générale du SNCD).

En conclusion, Nathalie Phan Place a voulu rappeler combien “la data est l’arme de personnalisation du papier. Ce n’est en rien un atout réservé au digital”. S’appuyant sur le même constat, Pascal Bovéro estime pour sa part que “la volumétrie imprimée ne pourra pas être maintenue et notre défi, c’est de passer d’une économie de volumes à une économie de valeur” met-il effectivement en garde. Un défi qui nécessite précisément d’intégrer de la data au print intelligent de demain, même si “notre travail sur l’ennoblissement des imprimés est plombé par des normes environnementales qui sanctionnent la qualité”, regrette le Délégué général de l’UNIIC, pointant là un autre chantier majeur : celui d’une responsabilité soutenable pour les Industries Graphiques, sommées d’évoluer au centre d’injonctions contradictoires. Se refusant toutefois de finir sur autre chose qu’un bon mot, il l’assure : “Bien que nous soyons dans le République de la créativité, on peut dire vive le ROI”.

A venir : un article sur cette journée d’échanges et de réflexion dans le prochain numéro d’Acteurs Graphiques…

Dominique Schelcher : “Ce n’est pas notre vocation que d’aller faire imprimer nos supports en Allemagne ou en Belgique”

Les magasins Système U – un groupement coopératif qui figure au quatrième rang des distributeurs alimentaires en France – ont fait savoir, par la voix de leur Président, Dominique Schelcher, qu’ils rapatriaient l’impression de 350 millions de prospectus dans l’hexagone. Une décision forte qui intervient dans un moment particulier, où les questions relatives à la relocalisation et au soutien de l’économie sont particulièrement vives. Nous avons à ce titre voulu en savoir plus sur les motivations stratégiques de Système U, l’heure étant par ailleurs à questionner le bien-fondé de la communication publicitaire, sur fond de poussée verte…

La communication est en pleine transformation et chez certains agents économiques, y compris chez certains de vos concurrents, on s’interroge sur la substituabilité print/autres canaux. Au-delà de votre décision stratégique de relocaliser vos imprimés publicitaires (IP) dans une logique vertueuse de circuits courts, vous avez rappelé l’importance de l’imprimé publicitaire toute boites, à un moment ou un bruit de fond laisse entendre que les publicités incitatives conduisent à la société du gaspillage et de la surconsommation. Dans ce contexte, comment l’imprimé publicitaire, qui demeure un support du pouvoir d’achat, doit selon vous évoluer pour s’inscrire dans cette volonté de desserrer l’étreinte consumériste ?

L’imprimé publicitaire est un composant important de la communication promotionnelle des enseignes de distribution, mais en même temps il incarne pour certains l’image du gâchis et de la pollution générée par la société de consommation volumique. Les Magasins U sont conscients de cette situation et ont déjà travaillé avec leurs partenaires pour limiter l’impact de ce support : en utilisant du papier recyclé et recyclable, en privilégiant des encres plus respectueuses de l’environnement, mais également en travaillant à un « ciblage » des zones de distribution magasin par magasin. C’est  dans ce sens que doit évoluer l’imprimé publicitaire pour être en lien avec les évolutions qui traversent la société.

D’autres ne tiennent pas ce discours…

Vous pensez probablement à des enseignes telles que Monoprix… qui est un distributeur urbain. Or aujourd’hui, quand on vit en région parisienne par exemple, le prospectus n’obéit pas du tout aux mêmes logiques. Pour les enseignes généralistes telles que la nôtre, davantage implantées en zones rurales, le prospectus gardera une place importante. Il devra certainement en partie s’effacer pour laisser se développer d’autres formes de communication, mais il restera, à condition de se transformer : il devra apporter une plus-value par rapport à ce qu’il est encore aujourd’hui. Quand j’observe les prospectus que nous produisions il y a vingt-cinq ans, ils ont déjà sensiblement évolué. Ils évolueront certainement encore plus dans les années à venir. Il n’est pas question de se contenter de faire des maquettes statiques uniquement basées sur la juxtaposition de photos de produits avec des prix, le prospectus de demain n’aura pas cette seule identité.

Pour Dominique Schelcher, Président de Système U, “L’imprimé publicitaire toutes boites constitue encore la meilleure réponse à la demande de [ses] clients”. (DR)

Faire évoluer l’IP semble être dans votre ADN. Comment concrètement faire muter ce support vers un outil pédagogique portant sur l’origine et la traçabilité de vos produits ? Vers un support d’aide à la décision pour comparer votre offre à celle de vos concurrents ? Vers une hybridation de votre communication mariant le print et les autres canaux de vente ?

Tous ces sujets majeurs sont sur la table et vu la nécessité de prendre en compte l’expérience client, il nous faut travailler sur un nouveau parcours d’achat fondé sur l’attractivité, l’animation et la transparence.

Que pensez-vous des enseignes qui ont notamment mis en avant le fait que la consommation a repris suite au confinement, sans l’appui des imprimés publicitaires habituels ? Est-ce la preuve qu’il serait possible de s’en passer ?

C’est une contrevérité parce qu’il est hasardeux de tirer de telles conclusions générales, à une période qui redeviendra bientôt normale, d’une situation à ce point anormale. La vérité réclame comme souvent mesure et plus de finesse d’analyse. La consommation elle-même pendant la période de confinement n’avait plus rien à voir avec ce que nous connaissions, la composition des paniers moyens l’a largement illustré. Dans ce que j’appelle « une situation normale », le prospectus continue d’avoir pour nous une importance certaine. Ce que nous pouvons toutefois garder de cette période « d’anormalité », c’est que l’on va continuer à aller vers des campagnes qui seront plus pointues et mieux ciblées. Le prospectus doit trouver sa place à côté d’autres médias dotés chacun de leurs atouts : la télévision c’est l’image, la radio c’est la promotion et le prospectus c’est le trafic. Bien sûr, Internet est venu s’intercaler et c’est un mode de communication qui se développera, mais la réalité c’est qu’aujourd’hui encore 15 % des Français n’ont pas accès à Internet, c’est une fracture qui existe dans la société française.

L’imprimé publicitaire massifié va décroître oui, mais je suis encore incapable de dire quand et dans quelles proportions.

Est-ce quand même à dire que la haute volumétrie sera remise en cause à moyen terme ?

Aujourd’hui, il est difficile d’anticiper : l’imprimé publicitaire massifié va décroître oui, mais je suis encore incapable de dire quand et dans quelles proportions. Il faut rester relativement prudent : entre les déclarations du citoyen et le comportement du consommateur, il y a souvent une marge. Oui le prospectus est vu comme un polluant publicitaire pour beaucoup, mais ce sont parfois les mêmes qui l’utilisent, voire le réclament quand on ne le distribue plus. On nous dit souvent qu’il est nécessaire pour comparer les promotions entre différents magasins et faire ses choix. La question du pouvoir d’achat était déjà cruciale avant la crise sanitaire, elle va évidemment le rester voire s’amplifier, la crise économique qui se profile à la rentrée aura pour conséquence de renforcer l’offre de promotions et  l’imprimé publicitaire a un rôle prépondérant à jouer dans un tel contexte.

Au-delà du support, que pensez-vous des critiques à l’encontre des promotions ?

Le problème relatif aux promotions est là encore plus subtil que ce qu’on en dit : le débat devrait également se porter sur la notion de volume. Ne pas vendre les yaourts par 48 pour en avoir deux gratuits ! Il s’agit là effectivement d’une dérive, mais qui ne disqualifie pas en soi la légitimité des promotions quand elles n’incitent pas à la surconsommation, puisqu’elles permettent simplement d’optimiser ses dépenses. Je pense qu’il y a sur ce sujet une déconnexion majeure de certaines élites ou de certains décideurs : quoi qu’on en dise, ce ne sont évidemment pas des gens qui font leurs courses comme celles et ceux issus de foyers à revenus modestes. Il faut veiller à ne pas parler à la place des premiers intéressés, qui savent comment et pourquoi les promotions les aident. Bien sûr, l’idéal serait que tout le monde n’ait pas à se soucier outre mesure des promotions, mais ce n’est pas la réalité de la vie de beaucoup de nos clients. Et je pense qu’il faut les écouter, plutôt que de décider à leur place.

Le prospectus est vu comme un polluant publicitaire pour beaucoup, mais ce sont parfois les mêmes qui l’utilisent, voire le réclament quand on ne le distribue plus.

Dans le calcul de votre coût complet, vous intégrez évidemment le coût de l’écocontribution, qui pèse sur les metteurs sur le marché et qui n’existe pas sous cette forme en Europe…

C’est exact et tous nos choix doivent composer entre une rationalité économique qui est incontournable et une logique de proximité qui fait notre force. Ce n’est pas notre vocation profonde que d’aller faire imprimer nos supports en Allemagne ou en Belgique pour le plaisir. Mais la question qui se pose aujourd’hui est celle de la part de surcoût que nous pouvons intégrer pour rendre « supportables » ces relocalisations. Actuellement, les efforts des imprimeurs français sont incontestables et notre choix est fondé sur une option de soutien au secteur, mais le différentiel de coût existe encore, ce qui doit nous amener à entrer dans une démarche de progrès collective avec les imprimeurs, dans la durée. Cela étant, je ne nie pas non plus qu’il faille améliorer et optimiser des choses également chez nous, en interne, par exemple au sein des circuits de relecture, pour nous appuyer sur des processus plus efficaces et donc, moins coûteux.

Les efforts des imprimeurs français sont incontestables et notre choix est fondé sur une option de soutien au secteur, mais le différentiel de coût existe encore, ce qui doit nous amener à entrer dans une démarche de progrès collective.

À un moment où des expérimentations « Oui pub » décentralisées sur les boîtes aux lettres vont commencer dans certaines régions, imaginez-vous un jour basculer à l’IP adressé ?

Il s’agit là d’un imprimé intelligent, incontestablement, et en même temps d’une approche complètement différente. Nous avons déjà tenté des expériences analogues, notamment avec des cartes de fidélité et différents dispositifs qui nous permettent d’aller vers l’imprimé adressé/personnalisé, mais le surcoût est encore lourd. L’efficacité, via entre autres la possibilité du profilage et des offres différenciées, est incontestable, mais cela nécessite tellement d’ingénierie liée à la gestion de la data, que ce n’est pas encore pour nous le support le plus pertinent en termes de ROI. Ça le deviendra un jour, mais j’insiste encore une fois sur les réalités du présent : l’imprimé publicitaire toutes boites constitue encore la meilleure réponse à la demande de nos clients, tout en étant pour nous le meilleur outil pour générer du trafic en magasin. Et il faudra sans doute du temps avant que cela puisse changer…

Presstalis : un dépôt de bilan et des urgences qui se précisent

Nouvelle étape dans le dossier Presstalis : la société a été déclarée en cessation de paiement ce lundi 20 avril. Une audience d’ouverture relative au jugement de la procédure collective devrait se tenir ce vendredi 24 mai, sauf à ce qu’un possible report la décale courant mai. Ce sont plus de 900 salariés qui sont concernés, dans ce qui s’annonce être une restructuration douloureuse… Si la procédure est « sans conséquence immédiate » sur ses activités, toujours assurées selon son PDG Cédric Dugardin (comprendre : aucune interruption de l’acheminement des journaux et magazines vers les points de vente n’est à craindre, à ce stade), l’urgence de convenir d’un plan de continuité ébranle toute la filière. Deux plans s’affrontent en effet :

– Un plan porté par Presstalis et les journaux quotidiens (réunis au sein d’une Coopérative de la Distribution des Quotidiens), pour constituer une structure de distribution unique basée sur la mutualisation des flux, notamment financiers.

– Un plan porté par les Messageries Lyonnaises de Presse (constituant avec avec les éditeurs de Presse magazine une Coopérative de Distribution des Magazines), scindant les activités liées d’une part à la distribution des quotidiens, et d’autres part la distribution des magazines. Il s’agirait plus concrètement ici de rompre les liens capitalistiques entre journaux et magazines.

Ces deux plans, rejetés l’un et l’autre par la SGLCE CGT, font toujours l’objet de tractations tendues, à mesure que l’urgence se précise. Ainsi le dépôt de bilan de Presstalis est-il vu par Cédric Dugardin comme « un accélérateur de négociations », alors que les pertes qui lui sont liées sont évaluées à 120 millions d’euros. Un plan de financement défendu par Hélène Bourbouloux, conciliatrice, s’appuie sur la possibilité d’engager les pouvoir publics pour couvrir 83 % desdites pertes (soit 100 millions d’euros sur 120) sous la forme de subventions et de prêts à 6 ans, contre la promesse des éditeurs de soutenir massivement le schéma industriel qui sera finalement retenu… Un pari osé, dans la mesure où le schéma en question n’est donc pas encore arrêté. Sans prendre explicitement parti, Hélène Bourbouloux précise toutefois que « l’existence d’un opérateur unique aurait tout son sens », à condition d’étaler son évolution dans le temps, le rapprochement quotidiens/magazines pouvant être construit « à un horizon plus lointain » du plan global de continuation et de restructuration.

MISE A JOUR [24/04/20] : Comme nous vous le laissions entendre ci-dessus, Presstalis a obtenu un report de l’audience d’ouverture de la procédure collective au 12 mai prochain. Ce temps supplémentaire devrait être mis à profit pour convenir d’une solution commune de sortie de crise alors que par ailleurs, La Correspondance de la Presse confirme que le versement aux quelques 18 000 diffuseurs spécialistes de leur commission complémentaire, de 16,2 millions d’euros, sera bel et bien assuré. Ces versements seraient adressés par Presstalis les 29 et 30 avril prochains.

Sortir la Presse d’une situation critique

La presse quotidienne va mal : on se déplace peu pour acheter le journal et il est à craindre que pour ceux qui s’y seront essayés, l’habitude de l’abonnement numérique perdure et que BFM ou autre LCI dont on se nourrit à longueur de journée ne viennent grignoter encore des parts de marché…

Et ce n’est pas la distribution pléthorique de la Poste qui a décidé de ne plus servir nos boites aux lettres les lundis et mardis qui va arranger les choses… Pas plus que la disparition programmée de Presstalis qui entraînerait aussi toute la presse magazine et une partie du livre dans cette spirale infernale avec l’effet domino que l’on imagine sur les imprimeurs concernés, les rotativistes du magazine bien sûr mais pas que, si l’on prend en compte leurs sous-traitants.

C’est pourquoi l’UNIIC continue à se battre avec l’appui des principaux adhérents concernés pour sauver, non seulement la distribution, mais une partie de la filière et a interpellé le CIRI (Comité Interministériel de Restructuration Industrielle) et l’ARCEP (Autorité de Régulation des Communications Électroniques et des Postes) afin qu’ils prennent en compte les difficultés du secteur, actuelles mais aussi celles qui vont apparaître après la reprise, et fassent remonter au Gouvernement toutes les données du problème : l’écoute a été attentive, les discussions constructives, les réponses et les décisions sont espérées rapidement car les imprimeries qui relèvent du champ d’activité du labeur sont des contributeurs essentiels à la continuité du devoir d’information, de culture et de distraction et de « déconfinement » que les autres canaux gérés par l’instantanéité anxiogène ne sauraient apporter. L’écosystème édition/impression/distribution/diffusion (kiosquiers) s’organise autour de maillons interdépendants dont tout lecteur/consommateur peut bénéficier, quel que soit sa situation professionnelle ou son positionnement géographique…

Pour un secteur comme le nôtre, qui réalise un CA de 5 milliards d’euros toutes activités confondues et compte les plus belles entreprises d’Europe positionnées sur ce marché, une fragilisation de l’activité des éditeurs de périodiques entraînerait une condamnation irréversible de tous les acteurs de l’amont à l’aval de ce segment (acteurs du prépresse, imprimeurs, façonniers, routeurs, transporteurs rédacteurs, kiosquiers, etc.) avec les conséquences qui y sont associées en terme d’emplois et de vitalité des territoires….

À la suite de nos interventions nous apprenons que les MLP viennent de déposer un projet visant à assurer la continuité du secteur de la distribution : nous vous en dirons plus dès que possible…

L’imprimerie Malherbe sera au CFIA à Rennes

Beaucoup de nos adhérents spécialisés dans le packaging s’exposent sur les salons dédiés au luxe, certes, mais pas que… Pour preuve : le CFIA, Carrefour des Fournisseurs de l’Industrie Agroalimentaire. Avec plus de 22 000 professionnels et 1 600 sociétés de toutes tailles représentant l’intégralité de l’offre du secteur, la position stratégique du salon au cœur de la Bretagne, première région agroalimentaire européenne, constitue un lieu privilégié pour les industriels et les fabricants de packaging. C’est pourquoi l’imprimerie Malherbe, l’un de nos adhèrent normands, y présentera cette année encore une de ses innovations :

Le fourreau permet de regrouper différents types et formats de fromage ou tout autre produit alimentaire. Le fenêtrage permet de visualiser les différents produits. 100% recyclable et apte au contact alimentaire, il est composé d’un carton pure cellulose et imprimé avec des encres végétales. Ce fourreau de regroupement est adaptable en fonction des besoins des industriels et du marché de l’agro-alimentaire. Il permet d’améliorer la visibilité des produits.

Si vous passez par Rennes les 10, 11 ou 12 mars prochains rendez-leur visite sur le stand A4 dans le hall 9, ils vous y accueilleront avec plaisir.