Pousser les murs jusqu’à… Gand
Les 17 et 18 septembre, l’UNIIC vous donne rendez-vous pour des journées techniques et créatives dédiée à la décoration et à l’automatisation des flux de production en partenariat avec ESKO.
Les 17 et 18 septembre, l’UNIIC vous donne rendez-vous pour des journées techniques et créatives dédiée à la décoration et à l’automatisation des flux de production en partenariat avec ESKO.
Si les bien nommés “circuits courts” destinés à rapprocher les acteurs de la fabrication des metteurs sur le marché ne recueillent guère que des commentaires bienveillants, le livre peine encore à en profiter. Quoique des “signaux faibles” tendent enfin à affleurer, puisqu’un label “Imprimé en France” est d’ores et déjà arboré en quatrième de couvertures de ses livres par les éditions Calmann-Lévy, ces derniers appelant même leurs confrères à faire de même…
En moyenne, 30 à 40% des livres français sont réalisés à l’étranger.
Made in France : à l’État de montrer l’exemple ?
Certainement faut-il commencer par rappeler une évidence : le localisme ne saurait être imposé, dans la mesure où le code des marchés publics l’interdit. Plus précisément, la commande publique ne pourrait incliner à solliciter des prestataires locaux – ou même nationaux – qu’à la condition de mettre en avant des critères d’exception liés par exemple à la nécessaire rapidité d’exécution (l’urgence pouvant alors justifier alors d’aller au plus près), ou indirectement en faisant la démonstration que les exigences environnementales spécifiques d’une commande conduisent à solliciter des entreprises de proximité. Des solutions qui n’ont toutefois rien de systématique et qui, mal justifiées, peuvent être rapidement taxées de délit de favoritisme et contrevenir à la fois aux principes communautaires (défendus par la CJUE) et constitutionnels (défendus par le Conseil Constitutionnel) de la liberté d’accès à la commande publique. La chose est toutefois difficile à entendre, dans la mesure où l’époque semble réclamer de l’écoresponsabilité en circuits courts, pour des raisons tant strictement environnementales que plus globalement sociales, sociétales et économiques. C’est ainsi que l’on s’émeut parfois de constater que les budgets publics manquent de nourrir le tissu industriel local, au profit de concurrents étrangers par ailleurs possiblement éligibles à des subventions européennes d’investissement qui distordent plus encore un équilibre concurrentiel déjà malmené par les différentiels sociaux qui distinguent les coûts d’une impression en Europe de l’Est (Pologne, Estonie, Lituanie etc.) de ceux d’une impression en France. Il ne faudrait toutefois pas grossir le phénomène : pour le cas du livre, la commande publique se maintient en France dans 90% des cas (source : “Imprimer en France : l’avenir de la filière Livre” – DGE/UNIIC, 2015). C’est la balance commerciale du livre dans sa globalité qui pose question : “En moyenne, 30 à 40% des livres français sont réalisés à l’étranger” pouvait-on lire au sein dudit rapport. Une proportion qui est restée peu ou prou la même, neuf ans plus tard, même si des pistes d’amélioration sont engagées et prometteuses…
Au-delà des seuls engagements RSE qui inclinent nombre d’éditeurs à faire rimer “responsabilité” avec “proximité”, les circuits courts semblent asseoir leurs bienfaits économiques.
Relocalisations : les raisons d’y croire
Les raisons de cet exode partiel, si elles sont connues, n’offrent pas toutes des solutions directes : reconstruire l’outil industriel adéquat – notamment sur les activités de reliure et de façonnage – pour traiter un volume supérieur de livres complexes et semi-complexes prendra du temps (l’Atelier Partagé du Livre Complexe est à cette fin un projet industriel collectif de rapatriement de travaux de façonnages semi-complexes, appelé à sortir de terre ces prochaines années), alors que les arbitrages moins-disant conduisant à imprimer moins cher mènent soit vers l’Europe de l’Est, soit à nos principaux concurrents frontaliers que sont l’Allemagne, l’Italie, la Belgique et l’Espagne. Impossible en effet pour un industriel français de s’aligner sur des prix cassés sans sacrifier sa marge, ni même toujours de rivaliser – sur des segments de marché hors livre noir, où la compétitivité française n’est pas mise à mal – avec la puissance graphique allemande qui, bien qu’en deçà de la productivité française, a su s’armer (et sous-traiter) pour optimiser ses coûts. Les raisons en relevant pour partie de disharmonies fiscales et sociales, de telles distorsions concurrentielles appellent des ajustements politico-économiques sur lesquels une filière industrielle n’a de fait que peu d’emprise. En pareil cas, les meilleurs réflexes sont donc toujours les mêmes : miser sur l’innovation, travailler la qualité de ses services pour mieux accompagner la demande et faire émerger de nouvelles capacités de production par le co-développement. C’est ce qui a été notamment entrepris pour le livre complexe et semi-complexe, mais cela ne dispense ni de promouvoir le savoir-faire français pour sensibiliser le grand public, ni de rappeler que de relocalisations il ne pourra y avoir qu’avec le concours actif des donneurs d’ordre, qu’il ne s’agit pas de contraindre, mais bien de convaincre. Un objectif à vrai dire déjà bien engagé : au-delà des seuls engagements RSE qui inclinent nombre d’éditeurs à faire rimer “responsabilité” avec “proximité”, les circuits courts semblent asseoir leurs bienfaits économiques (réduction drastique des délais, échanges facilités avec l’imprimeur et meilleure gestion des flux) pour finir de rendre la chose profitable – et déjà observable – au-delà de sa stricte dimension éthique.
Structurer des outils collectifs destinés à valoriser une fabrication du livre qui soit ‘locale’, ou à tout le moins, ‘nationale’.
Vers un label “Imprimé en France” ?
Preuve que les lignes bougent, l’éditeur Calmann-Lévy a pris l’initiative d’imprimer en quatrième de couverture de ses livres un label “Imprimé en France”, sous des traits nettement visibles, dans le but d’afficher une volonté proactive de défendre l’industrie française. Avec l’ambition aussi de promouvoir – c’est de bonne guerre – ses propres bonnes pratiques, sans pour autant chercher à tirer la couverture à soi. “Il souhaiterait que tous les autres éditeurs adhèrent à ce label, avec l’aide de tous les imprimeurs français de livres, afin que tous les livres faits en France portent cette marque” s’enthousiasme en effet Jean-Paul Maury (Maury Imprimeur), relatant ici une rencontre avec le Président des éditions Calmann-Lévy, dans un courrier adressé à l’UNIIC. “Nous sommes nous-mêmes sur une réflexion portant sur ‘l’achevé d’imprimer’ pour lui donner plus de force, mais dans le cas présent, il s’agit de valoriser la production française et ce, certes à la demande de nombreux imprimeurs, mais également d’acteurs majeurs du Syndicat National de l’Edition (SNE)” ajoute Pascal Bovéro, Délégué général de l’UNIIC, dans un courrier cette fois adressé au SNE. L’objectif : “trouver ensemble les formes les plus appropriées pour mettre en avant cette ‘signature’ appelée en fait à devenir une marque collective”, précise-t-il. En somme : montrer l’exemple et généraliser les bonnes pratiques, pour enfin structurer des outils collectifs destinés à valoriser une fabrication du livre qui soit ‘locale’, ou à tout le moins, ‘nationale’ : un combat qui se réclame d’un idéal socioéconomique fort et qui trouverait là une précieuse première avancée…
A l’heure où nous écrivons ces lignes, dans un contexte extrêmement précipité, le délai exigé entre la fin du dépôt des candidatures (dimanche 16 juin) et la livraison du matériel électoral imprimé (le mardi 18 juin à 18 h) apparaît trop court. L’UNIIC œuvre à obtenir un temps supplémentaire…
Les élections législatives sont des élections certes nationales, mais qui relèvent aussi d’un ancrage territorial fort, au travers notamment des rapports de confiance existant entre les candidats et leurs imprimeurs de proximité.
Ces élections, sauf exception, sont programmées et laissent ainsi le temps aux acteurs de la fabrication des documents de propagande électorale (imprimeurs et routeurs) de travailler sereinement dans le cadre des dispositifs prévus par le code électoral, des échanges avec le ministère de l’intérieur portant sur les tarifs de remboursement, l’agenda de livraison des documents, ainsi que les lieux notamment.
L’UNIIC qui participe depuis de longues années (depuis que la gestion est centralisée) à ces travaux techniques avec plusieurs imprimeurs, œuvre à leurs côtés pour remonter les contraintes rencontrées dans les circonscriptions.
Le cas de figure que nous rencontrons cette fois-ci est inédit tant la précipitation déstabilise les imprimeurs, confrontés en outre à une offre papetière contrainte et aux prix qui peuvent en découler, avec un agenda tellement serré qu’il peut nuire à la qualité de la mission confiée aux professionnels graphiques.
L’UNIIC, consciente de ce que représente le bouleversement des modes opératoires lié à l’urgence, met tout en œuvre pour attirer l’attention de l’Etat sur les risques que nous prenons collectivement à ne pas intégrer les contraintes productives des imprimeurs, les surcouts générés, les difficultés qui peuvent naitre dans certaines circonscriptions qui peuvent ne pas être livrées conformément au cahier des charges et engendrer des annulations.
Alors que les tarifs de remboursement sont ceux de 2022 (et que les évolutions des coûts de matières et de production sont hélas au rendez-vous), l’UNIIC insiste pour qu’un délai de 24 heures supplémentaires nous soit accordé pour remplir cette mission essentielle.
Le 4 juillet, l’UNIIC vous donne rendez-vous pour une journée technique et créative dédiée à la décoration et à l’agencement.
Nous nous sommes rendus chez Multisigne à Joué-lès-Tours en Indre-et-Loire, un spécialiste de l’impression grand format qui s’attache à affiner un positionnement en constante réflexion. Nouveaux marchés, ajustements techniques et approches innovantes, Emily Pornet – sa dirigeante – montre une volonté forte de ne pas scléroser l’activité d’une entreprise qui, dit-elle, s‘est toujours employée à devancer les tendances. « On essaie d’anticiper le plus possible, voire d’être avant-gardiste. C’est quelque chose que m’a inculqué mon père : il faut essayer d’être visionnaire » résume-t-elle…
C’est en 2018 que l’entreprise, jusqu’alors dirigée par Guy-Pascal Pornet, est reprise par sa fille. Et c’est peu dire qu’en six années, Emily Pornet a d’ores et déjà inscrit sa griffe et repositionné l’entreprise au gré de choix stratégiques muris. « Il faut bien se dire qu’en 2005, nous avions aménagé un bâtiment pour faire rentrer une quatre couleurs en sérigraphie. Autour, il n’y avait que des machines de sérigraphie. Nous avions 800 mètres carrés dédiés à cette technologie. Aujourd’hui, ce n’est plus qu’une offre mineure chez nous. Malheureusement, c’est un procédé qui a beaucoup souffert, l’offset est venu lui manger quelques parts de marché, en plus de l’impression numérique. Or, la sérigraphie réclame beaucoup de main d’œuvre, beaucoup de technicité et les compétences sont de plus en plus difficiles à trouver. La maintenance devenait difficile également, avec des pièces de plus en plus difficiles à trouver » éclaire Emily Pornet, pour illustrer un phénomène somme toute observable à l’échelle du tissu industriel français tout entier : alors que la sérigraphie décline pour devenir une (précieuse) technologie d’appoint, c’est l’impression numérique qui se taille la part du lion.
“Le fait est qu’on pratique à peu près tous les mêmes prix, avec des cadences machines et des niveaux de qualité similaires. Notre valeur ajoutée, c’est ce que l’on offre en plus.”
Affichage, signalétique, enseignes, panneaux, PLV (packaging, totems, kakémonos, banderoles et bâches, stop rayons, frontons, présentoirs), structures d’exposition (stands, roll up et enrouleurs, portes brochures, enseignes, drapeaux), décoration et agencements (papiers peints, stickers, toiles, tableaux, meubles)… Si Multisigne a fait des choix – technologiques, notamment – on ne peut pas dire que son offre se soit concentrée autour d’un nombre plus restreint de produits. Une variété de possibilités qui fut une chance, notamment lors de la crise sanitaire. « Notre avantage, c’est d’être très généralistes et de pouvoir à répondre à tout type de demande, ou presque. Pendant le Covid, on est arrivés à être flexible en prenant des choses par-ci, par-là : des banderoles, des stickers etc. Cela nous a permis de ne pas fermer. Paradoxalement, cette espèce d’improvisation constante a créé de la solidarité et de la cohésion dans l’équipe. La fidélité de nos fournisseurs a également été d’une grande aide, leur présence nous a permis d’anticiper en surstockant » se remémore-t-elle, même s’il reste à préciser les équilibres sur lesquels l’entreprise a décidé de miser. « La part de notre chiffre d’affaires consacrée aux affiches a été en baisse pendant des années, parce que nous produisions avec d’anciennes machines et que les prix avaient sensiblement baissé. Dans le même temps, nous avons développé l’activité PLV pour compenser au moins en partie. Là, nous avons racheté de nouvelles Aleph à encres aqueuses, ce qui nous permis de réenclencher une dynamique très positive sur l’affiche » précise Emily Pornet, qui ne cache cependant pas combien la réorientation de l’activité sur la PLV aura constitué un virage stratégique majeur, pour partie contraint, mais bel et bien salutaire. Un virage qui aura en effet notamment conduit l’entreprise à flexibiliser tant son organisation, par l’instauration d’un planning en 3/8, que son amplitude de production, Emily Pornet se faisant ainsi fort de souligner que Multisigne s’attache à produire à partir d’un seul exemplaire, jusqu’à imprimer de hauts volumes si nécessaire, pour servir des marchés plus massifiés. Là encore, l’objectif est clair : répondre à un maximum de demandes, de toute nature.
« Il a fallu trouver d’autres leviers lorsque le marché de l’affiche a commencé à baisser et dans le même temps nous constations une hausse sensible des demandes en PLV. Des gros faiseurs nous ont fait confiance et au fur et à mesure, on en est arrivé à faire 75 % de PLV. Alors que dix ans plus tôt, près des trois quarts de notre activité était consacré à l’affiche. On a complètement basculé, presque changé de métier, mais nous n’avions pas le choix » explique-t-elle. Un contexte qui explique en partie cette volonté d’ouverture sur les opportunités qui peuvent se faire jour dans le domaine de la communication visuelle au sens large, l’entreprise se montrant particulièrement soucieuse de ne pas s’enfermer dans une offre rigide. Et pour cause : « On est presque devenus une agence de communication. Il faut accompagner les clients sur l’idée, parfois même sur la créa’, sur le prix, sur le cahier des charges, notre bureau d’étude les accompagne sur la conception etc. L’imprimerie, ce n’est plus un simple travail d’exécution ‘Je vous envoie un fichier et vous l’imprimez sur un bout de PVC’. Pour moi la valeur n’est plus tant sur l’impression que sur ce que l’on est capables de proposer. Le fait est qu’on pratique à peu près tous les mêmes prix, avec des cadences machines et des niveaux de qualité similaires. Notre valeur ajoutée, c’est ce que l’on offre en plus » résume Emily Pornet. Or, ces ‘plus’ nécessitent fatalement de couvrir davantage de services, notamment dans ce qui se situe en aval de l’impression : finition, conditionnement, expédition… « On a recruté parce que c’est une transformation qui a demandé beaucoup de main d’œuvre, surtout sur la partie finition et conditionnement. Auparavant, nous ne nous occupions pas de tout ce qui concerne la répartition des expéditions, aujourd’hui c’est géré en interne, en travaillant notamment avec des ESAT. On fait venir des gens ponctuellement sur certains dossiers » confirme la dirigeante.
“En soi, on fait de l’ultra-personnalisation, mais il faut marketer ce que l’on fait et accompagner les gens, sinon ça ne marche pas.”
« En fonction des commandes, nous avons des machines petites, moyennes et grandes quantités. Sur certains nouveaux équipements, nous pouvons maintenant faire du roll-to-roll, alors que nous imprimions uniquement en aplat auparavant. L’idée, c’est donc d’aller creuser d’autres marchés » poursuit Emily Pornet, même si lorsqu’on lui demande comment ces arbitrages de volumes sont concrètement traités, les critères d’appréciation s’éloignent beaucoup de ce que diraient nombre d’offsettistes dits ‘traditionnels’ : « C’est compliqué parce que si on parle de plaques de 3 par 2, dès la centaine d’exemplaires on imprime une quantité importante en m². Alors qu’à l’inverse, 2000 petits stickers, c’est un petit dossier. On arbitre les quantités en fonction du nombre de plateaux que l’on passe, sur tout type de matières : supports rigides, souples, du carton, du plexiglas, du PVC, du bois etc. Mais on fait de plus en plus de PLV durables, donc pas mal de bois. On s’appuie sur des machines plutôt typées haute qualité qui impriment en petites séries à 40 m² de l’heure. C’est justement typiquement avec ces machines que l’on imprime du bois pour des enseignes durables » développe-t-elle en effet. Cette volonté de souplesse ne transparaît toutefois pas qu’au travers de choix d’investissements techniques, puisque l’on découvre chemin faisant que Multisigne cache d’autres atouts dans sa manche, hébergeant un matériel de production en réalité partiellement dédié à des entités satellites, bénéficiant de leur propre identité et d’un marketing singulier. « J’ai une deuxième entreprise qui est Pixpano. Multisigne, c’est une cinquantaine de salariés, Pixpano c’est vingt salariés. On fait exclusivement de la crédence de cuisine, des parois de douche, de la verrière personnalisée etc. On vise donc clairement les marchés de la décoration intérieure, ce qui est un positionnement bien spécifique. Les deux entreprises sont donc managées à part, parce qu’elles n’ont pas du tout la même façon de fonctionner. Néanmoins, l’équipement est partagé » explique-t-elle, avec une volonté manifeste d’adapter la communication au produit, le plus possible. « Les marchés de la décoration sont très porteurs et je pense qu’aujourd’hui, c’est un axe de développement à fort potentiel. Sur de la crédence, je travaille pour des professionnels qui sont des cuisinistes, des architectes, des décorateurs d’intérieur etc. Ces marchés sont peut-être encore un peu complexes quand on cherche à s’adresser directement au consommateur final. De mon point de vue, ça fonctionne mieux quand on crée des gammes standardisées. En soi, on fait de l’ultra-personnalisation, mais il faut marketer ce que l’on fait et accompagner les gens, sinon ça ne marche pas » prend-elle soin de préciser, décrivant un écosystème industriel mutualisé, mais des approches marketing volontairement plus éclatées, de sorte à maximiser les chances de toucher des cibles diverses, lesquelles n’auraient pas forcément l’idée d’aller solliciter un imprimeur grand format, ou à tout le moins identifié comme tel. Il aura souvent fallu se signaler autrement. Mais plus encore, Multisigne & Pixpano – qui génèrent respectivement 8 et 4 millions d’euros de chiffre d’affaires – s’inscrivent dans une philosophie consistant à mêler production industrielle, offre de services élargie et marketing ciblé : une triple approche qui fait presque figure aujourd’hui de seule stratégie viable, pour sortir le print d’une ornière strictement industrielle de plus en plus restrictive.
Culture Papier recevait Guillaume Pitron, journaliste et auteur notamment de « La guerre des métaux rares, la face cachée de la transition énergétique et numérique » en 2018, puis de « L’enfer numérique : voyage au bout d’un like » en 2021, aux éditions Les liens qui libèrent. Retour sur un échange aussi passionnant que glaçant, tant l’hégémonie numérique porte des externalités négatives croissantes (c’est un euphémisme), qu’il semble extrêmement difficile – sinon de défaire – seulement de contenir.
Il le reconnaît volontiers : s’il n’avait pas acquiescé aux desideratas de son éditeur, le dernier ouvrage signé Guillaume Pitron n’aurait gardé que son sous-titre pour s’intituler plus volontiers « Voyage au bout d’un like ». A la fois parce que la formule lui semblait plus fidèle à l’esprit du livre et surtout parce que loin d’être un technophobe patenté, Guillaume Pitron refuse d’être vu comme l’anti-numérique qu’il n’est pas. Car il s’agit bien de décrypter la machinerie numérique pour en comprendre chaque rouage et, dit-il, « développer une perception sensorielle d’Internet ». C’est-à-dire donner à voir la matérialité de ce qui est supposément immatériel, dans des proportions à ce point vertigineuses qu’elles ramènent à un constat implacable : sauf à imposer des garde-fous d’urgence, l’enfer numérique est bel et bien devant nous.
Personne n‘envoie une lettre papier pour dire à un ami ‘j’arrive’. On ne remplace pas une lettre par un email, mais par des centaines d’emails. Il s’envoie 163 milliards de mails par jour, l’effet rebond c’est ça.
« Nous allons consommer plus de métaux ces 3 prochaines années qu’en cumul depuis 70 000 ans. Et il faut se figurer qu’en 2060, le niveau global de consommation de ressources sur la planète aura été multiplié par 2,5 par rapport à 2011 » assène Guillaume Pitron, désireux de démontrer combien « l’infrastructure numérique est en passe de devenir la plus grande infrastructure jamais constituée par l’être humain ». Rien de moins, sans qu’il ne soit même seulement concevable que pareille prophétie n’advienne pas. Car le terme ‘infrastructure’ n’est pas choisi au hasard : si un smartphone contient déjà une cinquantaine de métaux rares, il n’est rien sans l’immense écosystème qui lui permet d’être continument connecté, sans la masse exponentielle de données hébergées dans des data centers, sans les centrales électriques spécifiquement dédiées à ces serveurs ou encore sans les câbles qui font transiter la bande-passante au travers des mers (99 % du trafic Internet passe en effet par des câbles, très marginalement via des satellites). De sorte que nous sommes évidemment loin des contenus prétendument « dématérialisés » qui voyageraient de façon fluide par terminaux numériques interposés, avec des appellations marketing flatteuses tels que le « cloud », qui porte en réalité très mal son nom. « On estime, selon le concept du sac à dos écologique, qu’en moyenne un objet manufacturé – comme une tasse par exemple – pèse 40 fois son poids, au vu des ressources, directes et indirectes, qu’il a fallu mobiliser. Le smartphone a un des ratios les plus élevés au monde : c’est comme s’il pesait 1200 fois son poids » illustre Guillaume Pitron, insistant sur l’extraordinaire complexité d’une technologique pourtant ultra-compacte. « Les puces électroniques sont un peu l’emblème de cette matérialité cachée. C’est quelque chose de minuscule, qui aura nécessité l’apport de nombreux sous-traitants et engagé énormément de matières dans le processus de fabrication. Une puce pèse ainsi en moyenne 16 000 fois son poids, c’est le ratio le plus élevé jamais mesuré. Qu’est-ce que ça veut dire ? Que souvent, avec le numérique, plus c’est petit, plus c’est gros ».
L’obsession des acteurs du numérique aujourd’hui, c’est la continuité de service. L’enfer du numérique vient précisément se nicher ici. Parce qu’on ne peut pas arrêter Internet, jamais.
Bien que connu et largement documenté, « l’effet rebond » peine encore à intégrer les réflexions et autres calculs d’impacts dès qu’il s’agit de s’appuyer sur des comparatifs. « Le Figaro m’avait interrogé l’été dernier en me demandant s’il valait mieux envoyer une lettre ou un email. Je leur ai répondu que la question était passionnante mais surtout très mal posée. Bien sûr qu’à première vue, il vaut mieux envoyer un email. Mais personne n‘envoie une lettre papier pour dire à un ami ‘j’arrive’. On ne remplace pas une lettre par un email, mais par des centaines d’emails. Il s’envoie 163 milliards de mails par jour, l’effet rebond c’est ça » illustre Guillaume Pitron pour rappeler une évidence qui pourtant, instinctivement, s’impose rarement comme telle. Mais là n’est pas l’entier du problème que nous pose la mesure des impacts numériques, tant nous sommes désormais massivement incapables de tolérer une panne ou des déconnexions intempestives. « L’obsession des acteurs du numérique aujourd’hui, c’est la continuité de service. L’enfer du numérique vient précisément se nicher ici. Parce qu’on ne peut pas arrêter Internet, jamais. Si Facebook vous dit ‘veuillez vous reconnecter dans deux minutes’, vous ne l’acceptez pas. Pour remédier à ça, on redonde l’infrastructure de sorte que si un centre de données tombe en panne, un autre prend immédiatement le relais. Il existe ainsi des centres de données qui ne seront certainement jamais utilisés, parce qu’on veut prévoir ce qui n’arrive jamais » se désole-t-il, décrivant un surdimensionnement d’infrastructures d’autant plus gloutonnes qu’elles répondent à un niveau de précaution quasi-paranoïaque. Davantage que des pannes, c’est même seulement la latence numérique qui est honnie par l’immense majorité des utilisateurs : on ne supporte plus de voir une application ‘ramer’ et tarder à nous répondre. Là encore, pour réduire la latence, on multiplie les relais. A tel point que se sont donc constituées des infrastructures à l’avenant, bel et bien matérielles en effet, très au-delà même de ce qu’un usage raisonné réclamerait.
Raisonner les usages, c’est justement ce qui a valu un bad buzz cinglant à Najat Vallaud-Belkacem, l’ex-Ministre de l’Education nationale proposant notamment dans une Tribune parue dans les pages du Figaro, de « rationner Internet ». Ainsi s’est-elle-même risquée à y attacher un ordre de grandeur : trois gigas de données par utilisateur et par semaine. Suscitant l’hilarité moqueuse des uns, mais aussi l’appui bienveillant de quelques autres, cette tentative visant à poser une limite à ce qui semble ne plus devoir en avoir, illustre toutefois combien la problématique soulevée ici est sensible. Peut-on seulement concevoir un retour en arrière ? Probablement pas encore. « Open AI ne communique pas encore sur les chiffres de ChatGPT4, mais on connaît ceux de ChatGPT3. Pour la phase d’entraînement, c’est de l’ordre de 150 tonnes d’équivalent CO2, soit environ 200 allers/retours Paris/New York, ce qui est en soi assez peu. En revanche, la phase d’utilisation, pour environ 13 millions d’utilisateurs par an, on considère que l’impact est 200 fois plus élevé que pour la phase d’entraînement », sachant que la dernière mesure du nombre d’utilisateurs du désormais célèbre agent conversationnel d’Open AI culmine à plus de 180 millions (décembre 2023), loin des 13 millions servant ici de base de calcul. « Mais on conjecture que ChatGPT 4, c’est encore 100 fois supérieur aux impacts de ChatGPT3 », précise Guillaume Pitron. Des ratios qui donnent le vertige, alors que loin d’agir pour une sobriété numérique sérieuse, les pouvoirs publics poussent pour voir naître un champion français en la matière, parce que les priorités sont celles-là : il s’agit de tirer profit d’une manne économique majeure, sans se voir aspiré par les géants américains ou chinois. « On ne veut pas être dépendants d’infrastructures qui, potentiellement, nous espionnent. Dans un monde qui, géopolitiquement, se tend, je ne vois pas comment on va s’arrêter. On sait que dominer le cyberespace est un levier de puissance » estime-t-il, dans un mélange contraint de fatalisme et de lucidité. Pourtant, les signes faisant état d’un trop-plein numérique ne manquent pas. Et ils sont annonciateurs du fait qu’immanquablement, un jour, il faudra freiner des quatre fers.
Il ne faut pas attendre de limites de ressources à l’expansion numérique : il y aura toujours quelque part du métal à extraire et des substituts seront créés pour les besoins du marché.
« Il faut peut-être aussi redire à quel point le numérique est archi-nécessaire. Qu’aurait-on fait sans lui pendant le Covid ? Les conséquences économiques et sociales auraient été bien plus lourdes encore. C’est aussi un outil de connaissances incroyable : grâce à lui, on sait en temps réel comment se porte la barrière de corail par exemple. Il ne faut pas attendre de limites de ressources à l’expansion numérique : il y aura toujours quelque part du métal à extraire et des substituts seront créés pour les besoins du marché. Les limites sont plus sûrement psychologiques, on a vu le sujet surgir ces dernières années pour des raisons de santé physique et mentale. Une autre limite, c’est la démocratie, raison pour laquelle nous sommes en train d’essayer de réguler les réseaux sociaux. Et l’autre limite, la plus évidente, est environnementale, même si le niveau de conscience est très hétérogène selon les pays. Il est assez élevé en France, pas du tout aux Etats-Unis par exemple » tient à conclure Guillaume Pitron, pour laisser enfin entrevoir l’espoir d’un revirement salvateur. Car si l’enfer numérique est devant nous, il faudra se rappeler que rien ne nous oblige à nous y rendre sans réagir collectivement. La matérialité imprimée est certainement une réponse – modeste – parmi tant d’autres, pour offrir des alternatives à un tout-numérique dont on sait aujourd’hui à quel point il s’avèrera néfaste. Et à ce stade, toutes les alternatives – a fortiori quand elles ont fait leurs preuves – sont bonnes à prendre.
Exceptionnelle à plus d’un titre, après huit ans d’absence sous son format “physique”, cette Drupa 2024 s’est présentée, au gré d’une récente conférence de presse, sous des traits plus internationaux que jamais : avec une forte percée des marchés dits “émergents” et des tendances très favorables au packaging dans les régions du monde où les croissances démographiques sont les plus fortes, l’industrie du print montre des dynamiques globalement positives, bien que très hétérogènes à l’échelle mondiale. Dans pareil contexte, qu’attendre du salon de Düsseldorf ?
On ne cesse de le rappeler, mais alors que le Covid est encore frais dans les mémoires, “nous vivons des temps agités, il s’est passé plus d’événements en quatre ans qu’en des décennies entières” résume Sabine Geldermann, Directrice du salon. Une façon de faire référence certes à la fois à la crise sanitaire, mais aussi à des phénomènes sectoriels (crise du papier, manque de main d’œuvre), plus communément industriels et/ou économiques (crise logistique, inflation, règlementations environnementales), voire géopolitiques (guerre en Ukraine et au Proche-Orient). De quoi en être assuré : cette Drupa ne sera pas comme les autres et les enjeux qu’elle renferme excèdent la seule dimension technologique des matériels, hardware et software.
Certainement plus qu’aucune autre édition avant elle, cette Drupa sera à l’image de ce qu’est aujourd’hui le marché mondial du print, dans toutes ses dimensions. “Selon la Smithers Pira Limited, le chiffre d’affaires global du print dans le monde atteint désormais les 950 milliards de dollars” rappelle Sabine Geldermann : un record qui cache évidemment des situations extrêmement disparates, selon les sous-marchés considérés. Car s’ils sont très majoritairement matures en Europe – avec des surcapacités de production qui induisent des tensions inévitables chez les industriels – la demande demeure globalement croissante, tirée par les marchés émergents. “Entre 2015 et 2030, la classe moyenne croit nettement à l’échelle internationale, notamment en Asie, où il y a par ailleurs beaucoup moins de problèmes de main d’œuvre” résume la Directrice du salon, qui donne déjà là quelques éclairages quant à l’omniprésence remarquée des fournisseurs chinois. Sur les 50 pays représentés à cette Drupa, ils occupent en effet la deuxième place en termes de mètres carrés occupés (23 652 m²), derrière l’Allemagne (40 761 m²) et devant l’Italie (13 339 m²), qui complète le podium. A titre de comparaison, avec 25 stands confirmés à l’heure actuelle (30 sont attendus à terme), la France occupe 1843 m². Il faudrait par ailleurs ajouter que le Japon, s’il affiche “seulement” 4276 m² d’exposition, dépasse probablement virtuellement les 20 000 m², au travers d’une présence qui se fait majoritairement via ses filiales européennes. De nouveaux équilibres qui ne sont pas sans conséquences sur les produits imprimés eux-mêmes, puisque ce sont le packaging, l’étiquette et l’impression numérique qui tirent la couverture à eux, tandis que l’impression dite “commerciale” reste globalement stable à l’échelle mondiale, avec un déclin entamé sur les marchés matures – européens, notamment – évoqués plus tôt.
Même si des absences notoires se sont fait jour (citons notamment Xerox, Agfa, Manroland ou Domino), le plateau de fournisseurs présent à Düsseldorf est donc copieusement garni, loin des inquiétudes qui avaient pu être exprimées en 2020, lorsque certains redoutaient un ‘monde d’après’ délesté de ces grands salon physiques, au profit d’une communication numérique plus segmentée. Comme en 2016, c’est HP qui fera figure de premier exposant, avec environ 6000 m² et un hall entièrement dédié à ses solutions, même si l’impression dite “conventionnelle” est loin d’être en reste : poussé par le marché feuille, l’offset devrait en effet abattre des cartes intéressantes, avec notamment une présence renforcée d’Heidelberg, Koeing & Bauer ou encore Komori. Le salon inaugurera pour l’occasion de nouveaux espaces, dédiés à se faire l’écho de tendances sectorielles fortes :
Avec plus de 1 800 exposants et plus de 260 000 visiteurs attendus, cette Drupa sera peut-être bien celle des grands écarts, se faisant tout à la fois l’écho d’une croissance mondiale très liée à de purs aspects démographiques, ainsi que d’un plafonnement des marchés dans des régions du monde où les ajustements stratégiques réclameront une connaissance pointue des tendances à l’œuvre, sur des marchés moins attachés que jamais à des logiques de massification.
L’UNIIC et ses partenaires vous donneront l’occasion d’en juger sur place : les forfaits proposés, pour des voyages qui s’effectueront – au choix – du 28 au 30 mai, ou du 4 au 6 juin (de possibles aménagements peuvent, le cas échéant, être discutés), sont consultables sur notre page de préinscription. Les places partent vite, ne tardez pas !
En application des dispositions de l’article L2261-32 du code du travail, les pouvoirs publics ont procédé à la fusion de la convention collective des industries de la sérigraphie et des procédés d’impression numérique connexes (IDCC 614), avec la convention nationale de l’imprimerie de Labeur et des industries graphiques (IDCC 184). Un rattachement devenu opérant le 1er février 2024, généralisant de fait sur les bulletins de salaire le code d’identification CCN 0184.
Si la convention collective de la sérigraphie et des procédés d’impression numériques connexes ressemble pour l’essentiel de ses dispositions à celle du Labeur, la classification des emplois, la structuration d’une couverture de prévoyance collective et – dans certains cas – les aspects Formation (certificats de qualification et diplômes notamment), nécessitent quelques ajustements. De façon à faciliter le basculement, il a ainsi été décidé :
– Que les entreprises relevant de l’ex-champ de la sérigraphie n’auraient pas, au titre de l’année 2024, à contribuer aux collectes conventionnelles IDCC 184.
– Que la politique salariale portant sur les minimas conventionnels devait être repensée pour tenir compte des spécificités des industries créatives.
– Que nous devions construire des emplois repères dédiés à la spécificité des sérigraphes et imprimeurs numériques grand format, jusque sur les fonctions support. Un travail qui relève d’une phase d’accompagnement des entreprises sur des classifications encore sujettes à réflexion, au vu des demandes qui parviennent à l’UNIIC.
– De proposer une couverture de prévoyance collective, sous l’égide du Groupe Lourmel, dédiée à la spécificité des métiers anciennement rattachés à l’IDCC 614.
Nos services sont mobilisés pour vous accompagner sur ces sujets, n’hésitez pas à vous rapprocher de nous.
Indésirables dans le packaging alimentaire, les hydrocarbures aromatiques d’huiles minérales (MOAH) sont suspectés d’être des perturbateurs endocriniens cancérigènes. Exclues à cette fin des procédés d’impression d’emballage, ces MOAH demeuraient toutefois potentiellement présentes dans les encres offset (heatset et coldset), risquant de contaminer les packagings (primaires et secondaires) recyclés.
Sur demande de la DGPR, un groupe de travail lancé par Citeo avec les différentes parties prenantes, a vu l’UNIIC s’engager, depuis 2017, à travailler sur des encres alternatives : les imprimeurs et acteurs amont/aval (producteurs d’encres, fournisseurs et transformateurs d’emballages, éditeurs, industriels de recyclage etc.) ont ainsi travaillé sur des solutions alternatives techniquement disponibles et économiquement supportables. Depuis 2022, de nouvelles formulations ont résulté de ces travaux, avec un taux d’appropriation de 97 % par les industriels français. Mais, comme nous le mentionnions avec la FIPEC dans un communiqué commun en décembre 2022, “l’arrêté du 13 avril 2022 précisant les substances contenues dans les huiles minérales dont l’utilisation est interdite sur les emballages et pour les impressions à destination du public (…) provoque une déstabilisation de toute la filière puisque les modalités de contrôle rendent impossible la mise en œuvre de la loi : toutes les encres, dont les encres à base végétale, seront de fait interdites, à échéance 2025, sur le marché français, si les seuils limites restent sous les capacités de détection de l’industrie et des laboratoires“.
Travaillant tant auprès de l’Etat que de l’ANSES, l’UNIIC poursuit son travail d’information, en portant notamment à la connaissance de nos interlocuteurs les réalités suivantes :
– Limiter les contaminations de MOAH à la source via une réglementation française apparaît d’autant plus inenvisageable que les flux de matières imprimées sont à minima européens, voire mondiaux. La traçabilité des papiers récupérés – lesquels sont envoyés par balles à l’étranger pour une production recyclée qui n’existe, hélas, quasiment plus en France – est ainsi en l’état impossible à assurer. L’autre solution, qui consisterait à revoir le schéma de collecte des déchets pour éviter tout mélange problématique, se heurte (entre autres) au fait que ce sont les collectivités elles-mêmes qui en déterminent les propriétés de façon indépendante et – donc – hétérogène.
– Où effectue-t-on les contrôles ? Si ce sont les encres d’imprimerie qui ont concentré l’attention du législateur, les dérivés d’huiles minérales – à l’état de traces – peuvent tout à fait provenir du substrat lui-même, des colles & adhésifs ou d’une contamination croisée via les aliments eux-mêmes. Elles peuvent également être présentes dans les camions et conteneurs dédiés à assurer le transport des marchandises imprimées.
– Si le secteur s’est déjà attaché à produire de nouvelles formulations d’encres largement exemptes de dérivés d’huiles minérales, aller plus loin – jusqu’à en éliminer toute trace – suppose des travaux d’identification des problématiques, puis de recherche & développement, qui nécessitent 3 à 5 ans de travail supplémentaire. Un temps qui nous met déjà hors-délai vis-à-vis de la règlementation, telle que définie à ce jour.
Pour rappel, la nouvelle législation relative aux seuils maximum tolérés de dérivés d’huiles minérales dans les produits imprimés est appelée à s’appliquer au 1er janvier 2025.
Plusieurs questions nous parviennent sur le devenir de l’expérimentation Oui Pub, qui doit s’achever le 30 avril 2025, après avoir été mise en place dans 14 localités. Explications.
L’UNIIC participe au Comité de Pilotage ‘Oui Pub’, une implication qui court depuis 2020, aux côtés notamment de la Fédération du Commerce Associé (FCA), la Copacel, les acteurs de la distribution (Mediapost et Milee), les grandes enseignes alimentaires, l’Ademe, l’Inspection Générale de l’Emploi et du Développement Durable (IGEDD), des représentants des localités engagées etc. L’objectif : dresser des constats intermédiaires, quantifier de premiers effets, mettre le doigt sur des points de dissension et, le cas échéant, faire entendre nos réserves.
L’UNIIC est intervenue pour souligner différents points (conséquences socioéconomiques attachées au secteur élargi de l’imprimerie, manquements apparents de l’expérimentation etc.). Pour ce faire, nous avons adressé un questionnaire à des imprimeurs directement positionnés sur ces marchés, pour quantifier au mieux les effets de l’expérimentation sur les profils les plus exposés. Etant entendu que les conséquences en sont étendues en cascade, les marchés de la publicité s’en trouvant reconfigurés au-delà des zones-test, affectant l’activité dans son entier.
A ce stade, plusieurs points majeurs sont à souligner :
– Le taux d’apposition Oui Pub – très irrégulier selon les localités considérées – souligne combien tout le monde n’a pas joué le jeu d’une communication transparente. Quasi-nul dans certaines zones, proche des 50 % dans d’autres : tel différentiel ne semble pouvoir être expliqué que par le fait que l’existence même d’un Oui Pub n’a pas été portée à la connaissance de tous les usagers, dont une part importante ignore toujours qu’elle se trouve en zone d’expérimentation. De son côté, Mediapost indique renoncer à servir les boites aux lettres, en dessous d’un taux d’apposition de 30 %.
– L’UNIIC s’investit pour alimenter les pouvoirs publics sur la quantification et la qualification des conséquences économiques et sociales de l’expérimentation. C’est dans ce contexte que nous surveillerons avec attention l’indicateur 2, qui porte sur le volume de la production et la diffusion estimées des IPSA (Imprimés Publicitaires Sans Adresse), des IPA (Imprimés Publicitaires Adressés) et des messages numériques, quel que soit le format. Pour mesurer les impacts en termes de gestion des déchets et donc de paralysie de l’économie circulaire, l’UNIIC sera particulièrement vigilante quant aux évolutions des tonnages de déchets.
– L’UNIIC pousse pour l’élaboration d’une ACV comparative entre les modes de communication imprimés et numériques, de façon à sortir des arguments présumés sur les bienfaits d’une dématérialisation dont on sous-estime encore les impacts. Car il faut le rappeler : les décisions relatives à l’arrêt d’une distribution d’IPSA ne signifient en rien une suppression de la communication associée, les prospectus étant le plus souvent ‘simplement’ réaffectés à d’autres canaux, dotés de leurs propres impacts. En première ligne pour exiger en son temps, y compris auprès des parlementaires, une mesure scientifique de l’évaluation environnementale comparative des campagnes par voie de distribution d’imprimés et par voie numérique, l’UNIIC s’attachera à tirer toutes les conséquences de l’unité dite fonctionnelle puisque l’étude comparative se placera à l’échelle d’un catalogue. Afin qu’il n’y ait aucun biais, nous nous attacherons à ce que soient prises en compte toutes les pratiques actuelles, tant en matière de publicité digitale qu’en matière de formats papier.
– Il apparaît que le Stop Pub est plus respectueux de la volonté des usagers : 89 % des usagers ayant apposé un ‘Stop Pub’ sur leur boite aux lettres disent être à l’aise avec l’idée de ne plus recevoir aucun prospectus, au risque de rater une information intéressante. A l’inverse, ce même taux n’est plus que de 34 % dans un système ‘Oui Pub’, une nette majorité d’usagers n’apposant pas de macaron ‘Oui Pub’ admettant en effet qu’elle préfèrerait continuer de recevoir les prospectus les plus susceptibles de les intéresser, selon l’enquête menée par Galileo pour l’Ademe.
Les travaux se poursuivent et l’UNIIC s’engage à faire entendre des arguments qui portent suffisamment pour que l’extension de l’expérimentation Oui Pub à l’ensemble du territoire ne soit pas déjà jouée. Un combat qui n’est bien sûr pas anodin, même s’il apparaît clair que les marchés de l’imprimé publicitaire s’en trouveront sévèrement affectés de toute façon, la démassification desdits marchés étant déjà engagée.
Nous ne manquerons pas de vous informer très prochainement sur notre implication au sein du groupe de travail sur l’ACV, qui va désormais constituer un chantier majeur.
UNIIC
11, boulevard Brune
75014 PARIS